Les nouvelles méthodes de destruction de la muqueuse de l'utérus (ablation endométriale) sont-elles plus efficaces et plus sûres que les méthodes établies ?

Problématique

Cette revue a comparé l'efficacité, l'innocuité, l'acceptabilité et les taux de complications des méthodes de première, deuxième et troisième génération disponibles pour détruire l'endomètre (paroi de l'utérus) pour le traitement des menstruations excessives (règles abondantes) chez les femmes préménopausées.

Contexte

Les médicaments et l'hystérectomie (chirurgie pour enlever l'utérus) étaient autrefois les principales options thérapeutiques pour les menstruations excessives. Ces deux options sont encore efficaces et sûres, mais les nouveaux traitements disponibles se concentrent sur l'ablation de la muqueuse de l'utérus (endomètre) d'où provient le saignement. Ces procédures impliquent soit l'ablation de l'endomètre (résection), soit sa destruction par l'énergie thermique (chaleur) d'un laser, d'instruments électriques ou d'autres dispositifs (ablation). Ces traitements peuvent arrêter ou réduire les menstruations.

Caractéristiques de l’étude

Cette revue a identifié 28 essais contrôlés randomisés portant sur 4287 femmes. La plupart des femmes savaient quel traitement elles recevaient, ce qui peut avoir influencé leur jugement sur la perte de sang menstruel et la satisfaction. D'autres aspects de la qualité des études variaient d'un essai à l'autre. Les données probantes sont à jour jusqu’en date de mai 2018. Dix-neuf des 28 essais ont reconnu avoir reçu un financement, de l'équipement ou de l'aide technique de l'industrie pharmaceutique et des fabricants de matériel.

Principaux résultats

Des données de qualité moyenne à très faible suggèrent que les méthodes de première et de deuxième génération ont été aussi efficaces dans le traitement des menstruations excessives. Les nouvelles méthodes (de deuxième génération) étaient plus sûres pour ce qui est des taux des troubles de résorption du liquide de distension, de lacérations cervicales et d'hématomes, avec des taux similaires de perforation utérine. Les nouvelles méthodes (ablation de deuxième génération) étaient plus rapides et plus susceptibles d'être pratiquées sous anesthésie locale (plutôt que générale) que les méthodes de première génération. La plupart des femmes des deux groupes étaient satisfaites des résultats de l'intervention. On ne dispose pas de suffisamment de données probantes pour montrer quelles méthodes de deuxième génération sont supérieures aux autres, et il n’y pas de données permettant de comparer avec les méthodes de troisième génération.

Niveau de qualité des données probantes

La qualité des données probantes variait de moyenne à très faible. Peu d'études ont été réalisées en aveugle, les données étaient limitées et l'hétérogénéité était importante pour certains critères d’évaluation, ce qui a entraîné une dépréciation de la qualité des données probantes.

Conclusions des auteurs: 

Les méthodes d'ablation de l'endomètre sont passées des techniques de première génération à de nouvelles méthodes de deuxième et de troisième génération. Les données probantes actuelles suggèrent que comparativement aux techniques de première génération (ablation au laser de l'endomètre, résection transcervicale de l'endomètre, ablation endométriale par ballonnet), les méthodes de deuxième génération (ablation endométriale par ballon thermique, ablation endométriale par micro-ondes, ablation hydrothermique, ablation endométriale par radiofréquence bipolaire, cryothérapie endométriale) sont aussi efficaces pour les menstruations excessives, avec des taux comparables d’aménorrhée et un meilleur score PBAC. Les techniques de deuxième génération sont associées à des temps d'opération plus courts et sont pratiquées plus souvent sous anesthésie locale que sous anesthésie générale. Il n'est pas certain que les taux de perforation diffèrent entre les techniques de deuxième et de première génération. Les preuves étaient insuffisantes pour montrer quelles méthodes de deuxième génération étaient supérieures aux autres et pour révéler l'efficacité et l'innocuité des techniques de troisième génération par rapport aux techniques de première et de deuxième génération.

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Contexte: 

Les menstruations excessives constituent un problème de santé important chez les femmes préménopausées ; elles peuvent réduire leur qualité de vie et causer des perturbations sociales et des problèmes physiques comme l'anémie ferriprive. Le traitement de première intention consiste traditionnellement en un traitement médical (hormonal et non hormonal), mais il n'est pas toujours efficace pour réduire les saignements menstruels à des niveaux acceptables. L'hystérectomie est un traitement définitif, mais elle est plus coûteuse et comporte certains risques. L'ablation de l'endomètre, qui préserve l'utérus, peut être une alternative à l'hystérectomie. De nombreuses techniques ont été mises au point pour réaliser l’ablation de l'endomètre. Les techniques de première génération nécessitent la visualisation de l'utérus à l'aide d'un hystéroscope pendant l'intervention ; bien qu'elle soit sûre, cette intervention nécessite des compétences techniques spécifiques. De nouvelles techniques d'ablation de l'endomètre (techniques de deuxième et de troisième génération) ont été mises au point et sont plus rapides que les techniques précédentes, car elles ne nécessitent pas de visualisation hystéroscopique pendant l'intervention.

Objectifs: 

Comparer l'efficacité, l'innocuité et l'acceptabilité des techniques de destruction de l'endomètre pour réduire les menstruations excessives chez les femmes préménopausées.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons fait des recherches dans le Registre spécialisé des essais contrôlés du groupe de travail Cochrane la gynécologie et la fertilité, le Registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL) dans la Bibliothèque Cochrane, MEDLINE, Embase, CINAHL et PsycInfo (inclusion jusqu’à mai 2018). Nous avons également effectué des recherches dans les registres d'essais cliniques, dans d'autres sources de littérature grise et consulté les références des études trouvées, et nous avons pris contact avec des experts dans le domaine et avec des sociétés pharmaceutiques qui fabriquent des dispositifs d'ablation.

Critères de sélection: 

Les essais contrôlés randomisés (ECR) comparant différentes techniques d'ablation ou de résection de l'endomètre chez les femmes présentant des menstruations excessives sans pathologie utérine connue, autres que les fibromes situés hors de la cavité utérine et inférieurs à 3 centimètres, étaient éligibles. Les critères des jugements étaient l'amélioration des menstruations excessives et de la qualité de vie, la satisfaction des patients, les résultats opératoires, les complications et la nécessité d'une nouvelle chirurgie, y compris l'hystérectomie.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de revue ont choisi, de manière indépendante, les essais à inclure, évalué les essais pour déterminer le risque de biais et extrait les données. Nous avons contacté certains auteurs d’étude pour obtenir des précisions sur les méthodes ou des données supplémentaires. Nous n'avons évalué les évènements indésirables que s'ils ont été mesurés séparément dans les essais inclus. Nous avons effectué des comparaisons entre les différentes techniques ainsi qu'une comparaison globale entre les méthodes de première et deuxième génération.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus dans cette mise à jour 28 études (4287 femmes) avec des échantillons allant de 20 à 372. La plupart des études présentaient un faible risque de biais pour la randomisation, l'attrition et la notification des résultats. L’assignation secrète était adéquate dans moins de la moitié de ces études, et la plupart d'entre elles n'étaient pas réalisées en aveugle. À l'aide de la méthode GRADE, nous avons déterminé que le valeur probante des données variait de moyenne à très faible. Nous avons révisé à la baisse le niveau de qualité des preuves concernant le risque de biais, d'imprécision et d'incohérence.

La comparaison globale des techniques de deuxième génération par rapport aux techniques de première génération (c.-à-d. ablation hystéroscopique de référence) n'a révélé aucune différence en ce qui concerne l’aménorrhée à un an et après deux à cinq ans de suivi (risque relatif (RR) 0,99, intervalle de confiance (IC) à 95 % 0,78 à 1,27 ; 12 études ; 2 145 femmes ; I² = 77 % et RR 1,16, IC à 95 % 0,78 à 1,72 ; 672 femmes ; 4 études ; I² = 80 % ; données de valeur probante très faible) et a montré une amélioration subjective après 1 an de suivi d’après le score PBAC (Pictorial Blood Assessment Chart) (score < 75 ou amélioration acceptable) (RR 1,03, IC à 95 % : 0,98 à 1,09 ; 5 études ; 1282 femmes ; I² = 0 % ; et RR 1,12, IC à 95 % : 0,97 à 1,28 ; 236 femmes ; 1 étude ; données de faible valeur probante). Les résultats de l'étude n'ont montré aucune différence dans la satisfaction des patientes entre les techniques de deuxième et de première génération à un an de suivi (RR 1,01, IC à 95 % : 0,98 à 1,04 ; 11 études ; 1 750 femmes ; I² = 36 % ; données de faible valeur probante) ni après deux à cinq ans de suivi (RR 1,02, IC à 95 % : 0,93 à 1,13 ; 672 femmes ; 4 études ; I² = 81 %).

Comparativement aux techniques de première génération, les techniques d'ablation endométriale de deuxième génération ont été associées à des temps opératoires plus courts (différence moyenne (DM) -13,52 minutes, IC à 95 % -16,90 à -10,13 ; 9 études ; 1822 femmes ; données de faible valeur probante) et plus souvent réalisées sous anesthésie locale plutôt que générale (RR 2,8, IC à 95 % 1,8 à 4,4 ; 6 études ; 1434 femmes ; données de faible valeur probante).

Nous ne savons pas trop si les taux de perforation différaient entre les techniques de deuxième et de première génération (RR 0,32, IC à 95 %, 0,10 à 1,01 ; 1885 femmes ; 8 études ; I² = 0 %).

Il n’y a eu que peu voire pas de différences rapportées dans les essais entre les techniques de deuxième et de première génération quant à la nécessité d'une chirurgie supplémentaire (ablation ou hystérectomie) à un an de suivi (RR 0,72, IC à 95 % : 0,41 à 1,26 ; 6 études : 935 femmes ; données de faible valeur probante). Après 5 ans, les résultats ont montré qu’il n’y avait probablement qu’une légère voire pas de différence entre les groupes quant à la nécessité d'une hystérectomie (RR 0,85, IC à 95 % : 0,59 à 1,22 ; 4 études ; 758 femmes ; données de valeur probante moyenne).

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Alan CHARISSOU et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.