Les lymphomes non-hodgkiniens (LNH) agressifs sont des formes de lymphome à croissance rapide. Le type le plus courant est le lymphome diffus à grandes cellules B (LDGCB) mais il existe plusieurs autres sous-types de lymphome agressif et variantes de lymphome diffus à grandes cellules B, notamment le lymphome centroblastique, l'immunoblastosarcome ou le lymphome anaplasique à grandes cellules B. Les lymphomes non-hodgkiniens agressifs sont généralement sensibles aux traitements anticancéreux conventionnels tels que la chimiothérapie et la radiothérapie. Dans les années 1980, un grand nombre de chercheurs ont rapporté que certains patients atteints d'un lymphome diffus à grandes cellules, qui n'avaient pas répondu à la chimiothérapie conventionnelle, ont pu être guéris par une chimiothérapie à haute dose et une autogreffe de cellules souches ou une greffe de moelle osseuse. Ces techniques peuvent être utilisées pour traiter le cancer, parce que les hautes doses de chimiothérapie peuvent détruire la moelle osseuse du patient. C'est pourquoi on procède à des prélèvements de cellules souches ou de moelle osseuse sur le patient avant le traitement. La moelle osseuse ou les cellules souches sont ensuite congelées et le patient reçoit une chimiothérapie à haute dose avec ou sans radiothérapie pour traiter le cancer. La moelle osseuse ou les cellules souches qui ont été prélevées sont ensuite décongelées et ré-introduites à l'aide d’une aiguille dans une veine pour remplacer la moelle qui a été détruite. Ce type de greffe s'appelle la greffe autologue. Si la moelle introduite est prélevée sur une autre personne, la greffe est une greffe allogénique. Pendant la première décennie d'études consacrées à la greffe autologue pour le traitement du lymphome agressif, l'accent a été mis sur l'application de cette approche pour sauver des patients après une récidive ou si la maladie avait déjà progressé sous une chimiothérapie standard. Ces résultats encourageants concernant le lymphome progressif ou récidivant ont conduit à des tests de la technique au titre de traitement principal de la maladie. Toutefois, il était également important d'identifier les facteurs susceptibles de prédire le résultat du traitement chez des patients atteints de lymphome agressif. Le score IPI (Index pronostique international) a été établi en 1993. Ce score a été mis au point en vue de mieux prédire l'évolution du lymphome agressif. D'après le nombre de facteurs pronostiques négatifs présents au moment du diagnostic (âge > 60 ans, maladie aux stades III/IV, taux élevé de lactodéshydrogénase [LDH], indice de performance ECOG > 2 (Eastern Cooperative Oncology Group), maladie avec plusieurs sites extra-ganglionnaires), quatre groupes de résultat (à risque faible, à risque faible-intermédiaire, à risque élevé-intermédiaire et à risque élevé) ont été identifiés avec une survie globale sur 5 ans allant de 26 % à 73 %.
Au cours des quelques dernières années, plusieurs essais randomisés portant sur la chimiothérapie à haute dose avec greffe autologue chez des patients atteints de lymphome agressif ont été rapportés. Ces études ont inclus l'incorporation de l'autogreffe dans le traitement initial, l'utilisation d'une autogreffe adjuvante chez les patients à réponse complète, et l'utilisation de cette approche de traitement chez des patients ayant eu une réponse lente ou incomplète à leur premier régime de chimiothérapie. Dans ces essais, des résultats contradictoires de chimiothérapie à haute dose avec autogreffe dans le cadre d'un traitement de première ligne ont été rapportés. Quelques études ont indiqué une tendance en faveur d'une meilleure survie chez les patients ayant un mauvais pronostic selon le score IPI (Index pronostique international) adapté à l'âge, tandis que d'autres n'ont pas réussi à démontrer le moindre avantage pour la première chimiothérapie à haute dose. Nous avons donc effectué cette revue systématique avec méta-analyse afin d'évaluer les effets de ce type de traitement sur la survie globale chez des patients atteints de lymphome non-hodgkinien agressif.
Les principaux résultats de cette analyse sont les suivants :
(i) D'une manière générale, il n'existait aucune preuve que la chimiothérapie à haute dose améliore la survie globale (SG) (HR 1,05 ; IC 0,92 à 1,19) ou la survie sans événement (EFS) (HR 0,92 ; IC 0,80 à 1,05).
(ii) Chez les patients ayant un bon score aaIPI de risque (score IPI adapté à l'âge), il existait certaines preuves d'une aggravation de la survie globale (SG) (HR 1,46 ; IC 1,02 à 2,09) s'ils avaient été traités par une chimiothérapie à haute dose.
(iii) En revanche, il existait des preuves suggérant mais ne confirmant pas que les patients ayant un mauvais score de risque pourraient bénéficier de la chimiothérapie à haute dose.
Globalement, par rapport à la grande population incluse dans nos analyses et aux tentatives menées dans le but de minimiser les biais et les facteurs de confusion, nous en concluons qu'il n'existe pas de preuve d'un bénéfice général du principe thérapeutique de la chimiothérapie myéloablative suivie d'une autogreffe de cellules souches pour les patients atteints de lymphome non-hodgkinien (LNH) agressif comme traitement de première ligne d'après les données dont nous disposons à l'heure actuelle.
Nous avons constaté des améliorations des taux de survie sans rechute et de rémission complète mais elles ne se sont pas traduites en effet bénéfique concernant la survie globale (SG) dans les groupes respectifs.
Mais plus important encore, il semble que la chimiothérapie à haute dose dans le cadre du traitement de première ligne soit nocive chez les patients ayant un score IPI à risque faible : patients. En outre, grâce à la disponibilité de l'anticorps monoclonal anti-CD20, Rituximab, les patients ayant un bon score de risque auront un meilleur résultat global après une immunochimiothérapie conventionnelle combinée. Toutefois, si la chimiothérapie à haute dose est employée chez les patients à risque élevé, il peut y avoir un effet bénéfique, mais les médecins ne devraient pas employer arbitrairement la chimiothérapie à haute dose au cours du traitement de première ligne. Il existe un besoin urgent de traiter ce groupe de patients à risque élevé dans des essais à grande échelle avec des procédures et des définitions harmonisées, ce qui faciliterait la comparabilité des résultats, et améliorerait l'évaluation de l'intervention thérapeutique. Des recherches supplémentaires devraient s'intéresser soit à la reproduction des études révélant des tendances positives soit à l'application de nouvelles approches qui ne s'appuient pas exclusivement sur le principe de chimiothérapie à haute dose avec greffe autologue.
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Malgré des taux de réponse complète plus élevés, il n'existe aucun effet bénéfique de la chimiothérapie à haute dose avec autogreffe de cellules souches comme traitement de première ligne chez les patients atteints de lymphome non-hodgkinien (LNH) agressif.
La chimiothérapie à haute dose avec autogreffe de cellules souches (HDT) s'est révélée efficace dans le lymphome non-hodgkinien (LNH) agressif récidivant. Cependant, des résultats contradictoires de la chimiothérapie à haute dose dans le cadre du traitement de première ligne ont été rapportés dans des essais contrôlés randomisés (ECR). Nous avons effectué une revue systématique avec méta-analyse afin d'évaluer les effets de ce type de traitement.
Déterminer si la chimiothérapie à haute dose avec autogreffe de cellules souches dans le cadre du traitement de première ligne améliore la survie des patients atteints de lymphome non-hodgkinien agressif.
Des recherches ont été effectuées dans MEDLINE, EMBASE, Cancer Lit, The Cochrane Library et des bases de données plus petites, des bases de données d'essais en cours accessibles sur Internet, des actes de conférences de la société ASCO (American Society of Clinical Oncology) et de la société ASH (American Society of Hematology) jusqu'au mois de septembre 2006. Une mise à jour de la recherche dans MEDLINE et CENTRAL a été effectuée en juin 2010, aucun essai supplémentaire répondant aux critères d'inclusion n'a été identifié. Nous avons inclus des versions intégrales et des abstracts de publications et des données non publiées.
Les essais contrôlés randomisés comparant la chimiothérapie conventionnelle à la chimiothérapie à haute dose dans le traitement de première ligne des adultes atteints de lymphome non-hodgkinien agressif ont été inclus dans cette revue.
L'évaluation de l'éligibilité et de la qualité méthodologique des essais, l'extraction et l'analyse des données ont été effectuées à deux reprises. Tous les auteurs ont été contactés pour obtenir les données manquantes et ont été invités à fournir les données de patients individuels.
Quinze essais contrôlés randomisés (ECR) incluant 3 079 patients étaient éligibles à cette méta-analyse. La mortalité globale liée au traitement était de 6,0 % dans le groupe sous chimiothérapie à haute dose et n'était pas significativement différente par rapport à celle de la chimiothérapie conventionnelle (OR 1,33 [IC à 95 % 0,91 à 1,93], P = 0,14). 13 études incluant 2 018 patients ont mis en évidence des taux de réponse complète significativement plus élevés dans le groupe recevant la chimiothérapie à haute dose (OR 1,32, [IC à 95 % 1,09 à 1,59], P = 0,004). Toutefois, la chimiothérapie à haute dose n'a pas eu d'effet sur la survie globale (SG), comparée à la chimiothérapie conventionnelle. Le HR regroupé était de 1,04 ([IC à 95 % 0,91 à 1,18], P = 0,58). Il n'y avait pas d'hétérogénéité statistique entre les essais. Les analyses de sensibilité ont mis en évidence la robustesse de ces résultats. L’analyse en sous-groupes des groupes pronostiques conformément au score IPI n'a pas révélé de différence quant à la survie entre la chimiothérapie à haute dose et les témoins dans 12 essais (score IPI à risque faible et à risque faible-intermédiaire : HR 1,41 [IC à 95 % 0,95 à 2,10], P = 0,09 ; score IPI à risque élevé-intermédiaire et à risque élevé : HR 0,97 [IC à 95 % 0,83 à 1,13], P = 0,71. De même, en ce qui concerne la survie sans événement (EFS), aucune différence significative n'a été révélée entre la chimiothérapie à haute dose et les témoins (HR 0,93, [IC à 95 % 0,81 à 1,07], P = 0,31). D'autres facteurs de risque possibles tels que la proportion de patients atteints de lymphome diffus à grandes cellules, le respect du protocole, la stratégie de chimiothérapie à haute dose, le statut de réponse avant la chimiothérapie à haute dose, les schémas de conditionnement et les questions méthodologiques ont été analysés dans les analyses de sensibilité. Toutefois, il n'existait aucune preuve d'une association entre ces facteurs et les résultats de nos analyses.