L'aorte abdominale est un des principaux vaisseaux sanguins dans l'organisme qui transporte le sang depuis le cœur vers les organes principaux de la poitrine et de l'abdomen. Un anévrisme de l'aorte abdominale (AAA) est un renflement de l'aorte (dilatation) ressemblant à un ballon de plus de 3 cm de diamètre. La rupture d’un AAA (éclatement) est souvent fatale. Par conséquent, les AAA qui sont de plus de 5,5 cm sont généralement traités chirurgicalement afin de tenter de prévenir une telle rupture. Traditionnellement, les AAA sont traités à l'aide d'une technique de réparation chirurgicale ouverte (OSR), dans laquelle l'abdomen est ouvert (ce qu’on appelle une chirurgie ouverte) et l'aorte dilatée est réparée avec une structure de greffe. Cependant, au cours des 20 dernières années, une nouvelle technique en « trou de serrure » a été utilisée. Dans cette technique, l'AAA est réparée sans avoir recours à la chirurgie ouverte : un tube mince est passé via les vaisseaux sanguins dans l'aine, jusqu’à l'endroit de l'AAA. Une fois dans la position correcte, un introducteur fémoral est installé pour pallier à l'aorte dilatée, agissant comme un vaisseau sanguin artificiel à travers lequel le sang peut circuler, en contournant l'anévrisme. Par conséquent, le risque d’une augmentation de la dilatation ou d’une rupture de l'AAA est réduit. Cette technique est appelée réparation endovasculaire de l'anévrisme (EVAR). Comme l’EVAR est une technique moins invasive que l’OSR, puisqu’il n'est plus nécessaire de pratiquer une chirurgie ouverte, elle pourrait avoir des avantages par rapport à l’OSR. En outre, certaines personnes souffrant d'autres maladies, pour lesquelles la chirurgie ouverte peut être considérée comme une procédure à haut risque et dont l’état de santé ne leur permet pas de subir une OSR, peuvent se voir proposer l’EVAR à la place.
Les auteurs de la revue ont identifié quatre essais contrôlés randomisés (ECR) de bonne qualité, qui comparaient l’OSR avec l’EVAR, impliquant un total combiné de 2790 participants aptes à la chirurgie, et un ECR de bonne qualité qui comparait l’EVAR à l'absence d'intervention, impliquant un total de 404 participants considérés comme inaptes à l’OSR.
L'analyse combinée des quatre essais comparant l’OSR avec l’EVAR a montré que le taux de mortalité dans les 30 jours de l'opération ou pendant l'admission pour la chirurgie était significativement inférieur chez les personnes subissant une EVAR comparé à celles subissant une OSR (1,4 % versus 4,2 %). Cependant, il n'y avait aucune différence dans les taux de mortalité entre les groupes jusqu'à quatre ans après l'opération (suivi intermédiaire) ou au-delà (suivi à long terme). Les participants subissant une EVAR présentaient une incidence significativement plus élevée d'un besoin d'une intervention supplémentaire pour traiter toute complication de la procédure effectuée par rapport à ceux recevant une OSR. Les complications opératoires, la qualité de vie liée à la santé et les dysfonctions sexuelles étaient généralement comparables entre les deux procédures. Cependant, l'incidence des complications pulmonaires dans le groupe OSR était légèrement supérieure à celle du groupe EVAR. Les résultats de l’ECR qui comparait l’EVAR à l'absence d'intervention chez des individus considérés comme étant inaptes à l’OSR n'a montré aucune différence en termes de taux de mortalité globale et de taux de complication entre les groupes.
Chez les individus aptes à la chirurgie conventionnelle, l’EVAR était associée à une plus faible mortalité à court terme que l’OSR. Cependant, ce bénéfice n’a pas persisté à des suivis à moyen et long termes. Les personnes subissant une EVAR avaient un taux de réintervention plus élevé que les patients opérés en OSR. Toutefois, la plupart des réinterventions réalisées après une EVAR étaient des interventions basées sur un cathéterassociées à une faible mortalité. Les complications postopératoires, le faible niveau de qualité de vie liée à la santé et les dysfonctions sexuelles étaient généralement comparables entre EVAR et OSR. Cependant, il y avait une incidence des complications pulmonaires légèrement plus élevé dans le groupe OSR que dans le groupe EVAR.
Chez les individus considérés comme étant inaptes à la chirurgie ouverte, les résultats d'un seul essai n'ont révélé aucun effet global bénéfique à court ou long terme entre l’EVAR et une absence d'intervention en termes de mortalité toutes causes confondues. Toutefois, les individus peuvent différer et les préférences individuelles devraient toujours être prises en compte.
Une dilatation anormale de l'aorte abdominale est appelée anévrisme de l'aorte abdominale (AAA). En raison du risque de rupture, une réparation chirurgicale est proposée électivement aux individus présentant des anévrismes de plus de 5,5 cm. Traditionnellement, la réparation chirurgicale ouverte conventionnelle (OSR) a été considérée comme le traitement de première ligne. Cependant, au cours des deux dernières décennies, la réparation d'un anévrisme endovasculaire (EVAR) a gagné en popularité comme une option de traitement. Cet article envisage d'examiner le rôle de l’EVAR dans la prise en charge de l'AAA électif.
Évaluer l'efficacité de l’EVAR versus l’OSR conventionnelle chez les personnes atteintes d'AAA aptes à la chirurgie, et de l’EVAR versus meilleurs soins médicaux chez ceux considérés comme étant inaptes à la chirurgie. L’efficacité était déterminée en fonction de l'effet à court, moyen et long terme sur la mortalité, les complications liées à l’endoprothèse, le taux de nouvelles interventions et les taux de complications majeures.
Le coordinateur de recherche d'études (TSC) du groupe Cochrane sur les maladies vasculaires périphériques a effectué des recherches dans le registre spécialisé (janvier 2013) et le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL) (2012, numéro 12). Le TSC a également effectué des recherches dans des bases de données d'essais pour obtenir des détails sur les études en cours ou non publiées.
Essais contrôlés randomisés (ECR) prospectifs comparant EVAR et OSR chez les personnes atteintes d’AAA aptes à la chirurgie et comparant l’EVAR aux meilleurs soins médicaux chez les individus considérés comme inaptes à la chirurgie. Nous avons exclu les études ayant des données ou des techniques de randomisation inadéquates.
Trois évaluateurs ont évalué la pertinence des essais à inclure et extrait les données en utilisant le format élaboré par le groupe Cochrane MVP (PVD). Nous avons évalué la qualité des essais à l'aide de l'outil « Risque de biais » de la Collaboration Cochrane. Nous avons saisi les données recueillies dans Review Manager (version 5.2.3) pour l'analyse. Lorsque des comparaisons directes ne pouvaient être effectuées, nous avons déterminé les rapports de cotes (RC). Nous avons testé les études en termes d’hétérogénéité et, lorsque c’était possible, nous avons utilisé un modèle à effets aléatoires ; dans le cas contraire, nous avons utilisé un modèle à effets fixes. Nous avons compilé les données qui ne pouvaient pas être recueillies.
Quatre essais de haute qualité comparant EVAR et OSR (n = 2790) et un essai de bonne qualité comparant EVAR et absence d'intervention (n = 404) remplissaient les critères d'inclusion. Chez les individus aptes à la chirurgie, une analyse groupée incluant 1362 individus randomisés pour l’EVAR et 1361 randomisés pour l’OSR a observé une mortalité à court terme (comprenant la mortalité hospitalière ou à 30 jours, et excluant les décès avant l'intervention) significativement plus faible avec l’EVAR qu'avec l’OSR (1,4 % versus 4,2%, RC 0,33, intervalle de confiance à 95 % (IC) de 0,20 à 0,55 ; P < 0,0001). En analyse en intention de traiter (ITT), il n'y avait aucune différence significative dans la mortalité lors du suivi à moyen terme (jusqu'à quatre ans à compter de la randomisation), avec respectivement 221 (15,8 %) et de 237 (17 %) décès dans les groupes EVAR (n = 1393) et OSR (n = 1390) (RC 0,92, IC à 95 % 0,75 à 1,12 ; P = 0,40). Il n'y avait également aucune différence significative dans la mortalité à long terme (au-delà de quatre ans), avec 464 (37,3 %) décès dans le groupe EVAR et 470 (37,8 %) décès dans le groupe OSR (RC 0,98, IC à 95 % 0,83 à 1,15 ; P = 0,78). De même, il n'y avait aucune différence significative en termes de mortalité liée à de l'anévrisme entre les groupes lors du suivi à moyen comme à long terme.
Les études ont montré tant l’EVAR que l’OSR étaient associées à une incidence de mortalité cardiaque (RC 1,14, IC à 95 % 0,86 à 1,52 ; P = 0,36) et un taux d’AVC mortels (RC 0,81, IC à 95 % 0,42 à 1,55 ; P = 0,52) similaires. Le taux de réintervention à long terme était significativement plus élevé dans le groupe EVAR que dans le groupe OSR (RC 1,98, IC à 95 % 1,12 à 3,51 ; P = 0,02 ; I 2 = 85 %). Les résultats de l'analyse de réintervention doivent être interprétés avec prudence en raison d'une hétérogénéité significative. Les complications opératoires, la qualité de vie liée à la santé et les dysfonctions sexuelles étaient généralement comparables entre les groupes EVAR et OSR. Cependant, il y avait une incidence des complications pulmonaires légèrement plus élevée dans le groupe OSR que dans le groupe EVAR (OR 0,36, IC à 95 % 0,17 à 0,75 ; P = 0,006).
Chez les individus considérés comme inaptes à l’OSR conventionnelle, le seul essai inclus n'a trouvé aucune différence entre les groupes avec et sans intervention EVAR en ce qui concerne la mortalité toutes causes confondues à la fin du suivi, avec 21,0 décès pour 100 personnes-années dans le groupe EVAR et 22,1 décès pour 100 personnes-années dans le groupe sans intervention (hazard ratio (HR) ajusté avec EVAR : 0,99, IC à 95 % 0,78 à 1,27 ; P = 0,97). Toutefois, les décès liés à un anévrisme étaient significativement plus élevés dans le groupe sans intervention que dans le groupe EVAR (HR ajusté de 0,53, IC à 95 % 0,32 à 0,89 ; P = 0,02). Il n'y avait aucune différence en termes d’événements myocardiques (HR 1,07, IC à 95 % 0,60 à 1,91) entre les groupes étudiés.