Les taux d'accidents du travail chez les ouvriers du bâtiment sont les plus élevés parmi les secteurs économiques majeurs. Alors que différentes organisations ont proposé plusieurs stratégies de contrôle des accidents, leur efficacité pour réduire le taux de blessures dans le secteur du bâtiment reste indéterminée.
Quel est l’objectif de cette revue ?
Déterminer quelles interventions sont les plus efficaces pour réduire les blessures en milieu de travail chez les travailleurs de la construction.
Principaux messages
Des recherches systématiques dans la littérature ont été réalisées sur la prévention d'accidents du travail chez les ouvriers du bâtiment. Nous avons inclus 17 études dans cette revue mise à jour, qualifiant les preuves de très faibles. Ces preuves indiquent que les interventions multidimensionnelles et les mesures qui incitent les entreprises à améliorer l'équipement peuvent être efficaces pour réduire les blessures. Cependant, il manque toujours des données probantes pour la grande majorité des mesures de sécurité que les manuels de sécurité, les consultants et les cours de sécurité recommandent systématiquement.
Ce qui a été étudié dans cette revue
Nous avons examiné différents types d’interventions en milieu de travail, y compris l’introduction de nouveaux règlements, les campagnes de sécurité, les formations, les inspections, les services de santé au travail et les subventions aux entreprises. Nous avons évalué la qualité des études et l’efficacité des interventions; globalement, les preuves passées en revue sont de très faible qualité.
Quels sont les principaux résultats de la revue ?
L’adoption de règlements à elle seule peut être efficace ou non pour prévenir les blessures non mortelles et mortelles chez les travailleurs de la construction. il semblerait que les interventions régionales telles que les campagnes de sécurité, les formations, les inspections ou les services de santé au travail ne soient pas efficaces pour réduire les blessures non mortelles chez les travailleurs de la construction. En revanche, une campagne de sécurité à plusieurs composantes et une intervention anti drogue multidimensionnelle en milieu de travail au niveau de l’entreprise, ainsi que des subventions pour le remplacement d’échafaudages, peuvent être efficaces pour réduire les blessures non mortelles.
Des stratégies supplémentaires sont requises pour que les employeurs et les ouvriers respectent davantage les mesures de sécurité prescrites par la réglementation.
Cette revue est-elle à jour ?
Nous avons recherché des études ayant été publiées jusqu'au 1er Avril 2017.
La grande majorité des interventions visant à adopter les mesures de sécurité recommandées par les textes standard sur la sécurité, les consultants et les cours de sécurité n'ont pas fait l'objet d'une évaluation adéquate. Il existe des preuves de très faible qualité indiquant que l'introduction de règlements en tant que tels peut ou non entraîner une diminution des blessures mortelles et non mortelles. Il existe également des preuves de très faible qualité selon lesquelles les campagnes régionales de sécurité, la formation, les inspections ou l'introduction de services de santé au travail peuvent ne pas réduire les blessures non mortelles dans les entreprises de construction. Il existe des preuves de très faible qualité selon lesquelles les interventions de sécurité axées sur l'entreprise, comme une campagne de sécurité diversifiée et un programme diversifié de lutte anti-drogue sur le lieu de travail, peuvent réduire le nombre de blessures non mortelles chez les ouvriers du bâtiment. D'autres études, de préférence des essais contrôlés randomisés en grappes, sont nécessaires pour évaluer différentes stratégies visant à accroître l'adhésion des employeurs et des travailleurs aux mesures de sécurité prescrites par la réglementation.
Les ouvriers du bâtiment sont fréquemment exposés à différents types de risques pouvant causer des blessures. Il existe diverses interventions de prévention des blessures, mais leur efficacité est incertaine.
Évaluer les effets des interventions visant la prévention des blessures chez les ouvriers du bâtiment.
Nous avons consulté le registre spécialisé du groupe Cochrane sur les blessures, CENTRAL (numéro 3), MEDLINE, EMBASE et PsycINFO pour des études publiées jusqu’en Avril 2017. Les recherches n'ont fait l'objet d'aucune restriction de langue ou statut de publication. Nous avons également écumé les listes bibliographiques des articles et revues pertinents.
Les essais contrôlés randomisés, les études contrôlées avant-après (CAA) et les séries temporelles interrompues (STI) portant sur tous les types d'interventions visant à prévenir les blessures mortelles et non mortelles chez les ouvriers du bâtiment.
Deux auteurs de revue ont, de manière indépendante, sélectionné les études, extrait les données et évalué leur risque de biais. Pour les STI, nous avons réanalysé les études et utilisé un effet initial, mesuré par des variations du taux de blessures l'année suivant l'intervention, ainsi qu'un effet durable, mesuré par des variations de la tendance temporelle avant et après l'intervention.
Dix-sept études (14 STI et 3 études CAA) ont répondu aux critères d’inclusion dans cette version mise à jour de la revue. Les études STI ont évalué les effets de l'introduction ou de la modification de réglementations fixant des exigences en matière de sécurité et de santé sur les chantiers de construction (neuf études), une campagne de sécurité (deux études), un programme anti drogue (une étude), un programme de formation (une étude) et des inspections de sécurité (une étude) sur les accidents du travail mortels et non mortels. Une étude CAA a évalué la mise en place de services de santé au travail tels que l’évaluation des risques et la surveillance de la santé, une étude a évalué un programme de formation et une autre a évalué l’effet d’une subvention pour la mise à niveau d’échafaudages plus sûres Le risque de biais global dans les études incluses était élevé, car il n'était pas possible d'établir dans les STI si l'intervention était indépendante des autres modifications et si celle-ci pouvait donc être considérée comme étant la principale raison aux changements observés au niveau du critère de jugement. Nous avons par conséquent évalué les preuves comme étant de qualité très faible pour toutes les comparaisons.
Interventions obligatoires
En raison de résultats très incohérents (I² = 98 %), l’efficacité des interventions réglementaires au niveau national ou sectoriel est incertaine: elles pourraient avoir ou non un effet initial (ampleur de l'effet (ES) de -0,33 ; intervalle de confiance à 95 % (IC) de -2,08 à 1,41) et/ou un effet soutenu (ES -0,03 ; IC à 95 % -0,30 à 0,24) sur les blessures mortelles et non mortelles (9 études sur les STI). De même, il n’est pas établi que les inspections aient un effet sur des blessures non mortelles (ES 0,07 ; 95 % CI −2.83 à 2,97 ; 1 étude de STI).
Les interventions éducatives
Les interventions de formation en matière de sécurité peuvent ne pas entraîner de réduction significative des blessures non mortelles (1 étude STI et 1 étude CAA).
Les interventions d’information
Nous n’avons pas trouvé d’étude ayant évalué des interventions d’information seules, telles que des campagnes de communication des risques.
Interventions de persuasion
Nous n'avons trouvé aucune étude qui avait évalué les interventions de persuasion seules, comme les commentaires des pairs sur les mesures prises en milieu de travail pour accroître l'acceptation des méthodes de travail sécuritaires.
Interventions de facilitation
Les subventions monétaires aux sociétés peuvent conduire à une diminution plus forte des blessures non mortelles suite aux chutes à un niveau inférieur, comparé à aucune subvention (risque relatif (RR) de suivi: 0,93 ; IC95 : 0,30 à 2,91 de 3,89 RR au départ ; 1 étude CAA).
Interventions à composantes multiples
Une campagne de sécurité peut entraîner une diminution initiale (ES -1,82 ; IC à 95 % -2,90 à -0,74) et soutenue (ES -1,30 ; IC à 95 % -1,79 à -0,81) des blessures au niveau de l'entreprise (1 étude sur les STI), mais pas au niveau régional (1 étude sur les STI). Un programme d’intervention anti drogue sur le lieu de travail au niveau de l'entreprise peut réduire les blessures non mortelles de -7,6 par 100 années-personnes (IC à 95 % -11,2 à -4,0) et de -2,0 par 100 années-personnes (IC à 95 % -3,5 à -0,5) dans l'année qui suit la mise en œuvre (1 étude sur les STI). L'introduction de services de santé au travail peut n'entraîner aucune diminution des blessures mortelles ou non mortelles (une étude CAA).
Traduction réalisée par Cochrane France