La codéine est un médicament opiacé couramment utilisé dans le monde pour traiter la douleur, y compris les douleurs causées par les cancers. Par voie orale, seule ou en combinaison avec le paracétamol, elle soulage bien la douleur dans certains cas de cancer, si l'on en croit les informations limitées dont on dispose.
Dans cette revue, nous avons décidé d'estimer dans quelle mesure la codéine était efficace, combien de personnes ont eu des effets secondaires et quelle était a gravité de ceux-ci (par exemple s'ils étaient sévères au point que les participants ont cessé de prendre de la codéine par voie orale). Nous avons inclus 15 études portant sur 721 participants. Les études que nous avons trouvées avaient des lacunes méthodologiques : elles étaient de petite taille et de courte durée. En outre, elles rapportaient les résultats de différentes manières, de sorte qu'il n'a pas été possible de combiner leurs résultats. Dans sept des huit études comparant la codéine à un placebo, la codéine donnait de meilleurs résultats que le placebo. Dans les études comparant la codéine avec un autre médicament, les résultats étaient similaires. La codéine à des doses de 30 mg à 120 mg, seule ou en combinaison avec le paracétamol, semble effectivement bien soulager les douleurs causées par les cancers chez certains patients. Nous ne pouvons pas être certains du nombre de personnes qui bénéficieraient de cet effet et ne savons pas si l'ajout de paracétamol renforce l'effet de la codéine, ni dans quelle mesure. La codéine augmente les nausées, les vomissements et la constipation ; en outre, elle peut causer une somnolence ou des étourdissements si elle est utilisée pendant plus d'une semaine. Certaines personnes arrêtent de prendre de la codéine à cause des effets secondaires.
D'autres essais comparant la codéine avec d'autres traitements et utilisant des critères d'évaluation centrés sur les patients sont nécessaires. Il y aurait lieu d'étudier le rôle de la codéine en cancérologie contre les douleurs légères, en plus des douleurs modérées à sévères.
Nous n'avons identifié qu'une petite quantité de données dans des études à la fois randomisées et à double insu. Les études étaient de petite taille, de courte durée, et la plupart avaient des lacunes de compte-rendu importantes. Les données disponibles indiquent que la codéine est plus efficace contre la douleur cancéreuse que le placebo, mais avec un risque accru de nausées, vomissements et constipation. L'incertitude demeure quant à l'ampleur et à l'évolution dans le temps de l'effet analgésique et quant à l'innocuité et à la tolérabilité au long cours. Il n'y avait pas de données pour les enfants.
Les cancers provoquent très souvent des douleurs. Pour la gestion de la douleur cancéreuse, en particulier légère à modérée, les principales lignes directrices accordent une place importante aux analgésiques opiacés. Largement disponible et peu coûteuse, la codéine peut être un bon choix, en particulier lorsque les ressources sont limitées. Son utilisation est cependant controversée, en partie parce qu'elle n'est pas efficace chez une minorité de patients qui ne peuvent pas la convertir en son métabolite actif (morphine), et aussi en raison de préoccupations au sujet du risque d'abus et de l'innocuité chez les enfants.
Déterminer l'efficacité et l'innocuité de la codéine, utilisée seule ou en association avec le paracétamol, pour soulager la douleur du cancer.
Nous avons effectué des recherches dans le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL ; La Bibliothèque Cochrane 2014, n° 8), MEDLINE et EMBASE (de leur création au 5 mars 2014), ainsi que dans des registres d'essais cliniques et dans les références bibliographiques des études identifiées et des revues antérieures.
Nous avons cherché des essais contrôlés randomisés en double aveugle utilisant des doses uniques ou multiples de codéine, avec ou sans paracétamol, pour le traitement de la douleur cancéreuse. Les essais pouvaient être menés en parallèle ou croisés et devaient compter au moins 10 participants par groupe de traitement. Les études chez les enfants ou les adultes rendant compte de tous les types, grades et stades de cancer étaient admissibles. Nous avons accepté toutes les formulations, posologies et voies d'administration de la codéine, et un contrôle par placebo aussi bien que par un médicament actif.
Deux auteurs de la revue ont lu de façon indépendante les titres et résumés de toutes les études identifiées par la stratégie de recherche et exclu celles qui ne répondaient manifestement pas aux critères d'inclusion. Pour les études restantes, deux auteurs ont lu les manuscrits complets et les ont évalués en vue de leur inclusion. Nous avons résolu les désaccords entre les auteurs par la discussion. Les études incluses ont été décrites qualitativement, puisque aucune méta-analyse n'était possible en raison de la faible quantité de données obtenues et de l'hétérogénéité clinique et méthodologique entre les études.
Nous avons inclus 15 études comptant 721 participants souffrant de douleurs causées par divers types de cancer. Toutes les études avaient été réalisées sur des adultes ; il n'y avait aucune étude en pédiatrie. Les études incluses étaient de qualité méthodologique adéquate, mais toutes sauf une ont été jugées à risque élevé de biais en raison de leur petite taille, et six en raison des méthodes utilisées pour traiter les données manquantes ou de taux élevés de retrait. Trois études utilisaient un modèle en groupes parallèles ; les autres étaient des essais croisés prévoyant une période de sevrage suffisante, mais une seule rapportait séparément les résultats de chaque période de traitement.
Douze études utilisaient la codéine en monothérapie et trois en association avec le paracétamol. Dix études comportaient un bras placebo et quatorze incluaient un ou plusieurs médicaments actifs de comparaison (16 en tout) ou comparaient différentes voies d'administration. La plupart des études étudiaient l'effet d'une dose unique de médicament, tandis que cinq portaient sur des périodes de 1, 7 ou 21 jours de traitement. La plupart des études utilisaient la codéine à des doses de 30 mg à 120 mg.
Les données étaient insuffisantes pour toute analyse groupée. Seules deux études ont rapporté les résultats de notre critère de réponse privilégié : « participants rapportant une réduction d'au moins 50 % de la douleur » ; deux autres faisaient état des « participants rapportant une douleur légère au maximum ». Onze études ont rapporté des mesures moyennes par groupe de traitement de l'intensité de la douleur ou de son soulagement ; dans l'ensemble, pour ces mesures de résultats, la codéine ou la codéine plus paracétamol donnait des résultats numériquement supérieurs au placebo et équivalents aux principes actifs de comparaison.
Les effets indésirables étaient insuffisamment rapportés : seules deux études rendent compte du nombre de participants affectés par un événement défavorable spécifié par groupe de traitement et une seule rapporte le nombre de participants ayant subi un événement indésirable grave. Dans les études à doses multiples, les nausées, vomissements et constipation ont été fréquents. L'étude sur 21 jours fait état de somnolence et de vertiges fréquents. Le retrait des études, lorsqu'il est déclaré, a été inférieur à 10 %, sauf dans deux études. Trois décès ont été rapportés, tous causés par le cancer sous-jacent.
Traduction réalisée par le Centre Cochrane Français