Paiement à la performance pour améliorer les prestations de soins dans les pays à revenu faible et intermédiaire

L'objectif de cette revue Cochrane était d'évaluer les effets du « paiement à la performance » sur la prestation des services de santé dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Les auteurs de la revue ont collecté et analysé toutes les études pertinentes sur cette question et ont trouvé 59 études.

Principaux messages

Les études incluses dans cette revue ont examiné des méthodes de rémunération à la performance qui variaient dans leur conception, dans leur cadre et dans leur mise en œuvre. La revue montre que le paiement à la performance pourrait avoir des effets tant positifs que négatifs sur les services de santé ciblés. Il pourrait également avoir des effets positifs sur d'autres services de santé qui ne sont pas directement visés et pourrait avoir d'effets négatifs non intentionnels sur ces services. Cependant, la plupart des données probantes sont d’un niveau de confiance faible et nous avons besoin de davantage d'études bien menées sur ce sujet.

Qu'est-ce que le « paiement à la performance » ?

Dans le cadre d'une approche de « paiement à la performance », les personnes reçoivent une gratification financière ou autre si elles effectuent une tâche particulière ou atteignent un objectif spécifique. Le paiement à la performance s'adresse généralement aux professionnels de santé ou aux établissements de soins. Les personnels de santé ou les établissements de soins de santé sont récompensés s'ils offrent des services spécifiques, s’ils dispensent des soins d'une certaine qualité, ou si leurs patients utilisent des services spécifiques qui améliorent leur santé.

Le paiement à la performance peut être utilisé pour cibler des problèmes de santé et des services spécifiques qui demandent à être améliorés. Mais ce programme pourrait également influer sur d'autres services qui ne sont pas spécifiquement visés. Par exemple, il pourrait amener les agents de santé à améliorer la qualité des autres services dispensés. Mais le paiement à la performance pourrait aussi les amener à éviter les services qui ne donnent pas lieu à un paiement supplémentaire. Pour en savoir plus, les auteurs de la revue ont évalué les effets du paiement à la performance sur les services ciblés et non ciblés. Il s'agissait notamment de rechercher d'éventuels effets non intentionnels.

Quels sont les principaux résultats de cette revue ?

La revue a porté sur 59 études pertinentes. La plupart étaient originaires d'Afrique subsaharienne et d'Asie. La plupart des programmes de paiement à la performance étudiés ont été financés par les ministères de la santé, avec également le soutien de la Banque mondiale.

Quarante-neuf études ont comparé les établissements de santé ayant eu recours au programme du paiement à la performance avec ceux ayant procédé comme d'habitude. Dix-sept études ont comparé les établissements de santé ayant eu recours au programme du paiement à la performance avec ceux utilisant d'autres approches. La plupart de ces approches consistaient à allouer un montant similaire, mais sans insister sur la notion de paiement à la performance.

Effets du paiement à la performance par rapport aux pratiques habituelles

Pour les services de santé spécifiquement ciblés, le paiement à la performance :

- pourrait améliorer certains critères de jugement cliniques, pourrait améliorer la qualité des services et probablement accroître la disponibilité des professionnels de santé et des médicaments ainsi que le bon fonctionnement des infrastructures et des équipements ; mais

- il pourrait avoir des effets tant positifs que négatifs sur la prestation et l'utilisation des services de santé.

Pour les services de santé non ciblés, le paiement à la performance :

- améliore probablement certains critères de jugement cliniques ;

- pourrait améliorer la prestation, l'utilisation et la qualité de certains services de santé, mais ne faire que peu ou pas de différence pour d'autres ; et

- pourrait avoir peu ou pas d’effets non intentionnels.

Nous ne connaissons pas les effets du paiement à la performance sur la disponibilité des médicaments et des autres ressources, car les données probantes sont d’un niveau de confiance faible.

Effets du paiement à la performance comparativement à d'autres approches

Pour les critères de jugement cliniques et les services spécifiquement ciblés, le paiement à la performance :

- pourrait améliorer la qualité du service ;

- pourrait n’apporter que peu ou pas de différence dans les critères de jugement cliniques ; et

- pourrait avoir des effets tant positifs que négatifs sur la prestation et l'utilisation des services de santé ainsi que sur la disponibilité des équipements et des médicaments.

Pour les critères de jugement cliniques et les services de santé non ciblés, le paiement à la performance:

- pourrait faire peu ou pas de différence dans les critères de jugement cliniques et dans la prestation et l'utilisation des services de santé.

Nous ne savons pas quels sont les effets du paiement à la performance sur la qualité des services, sur la disponibilité des ressources et sur les effets non intentionnels, car il manque des données probantes ou elles sont d’un niveau de confiance très faible.

Dans quelle mesure cette revue est-elle à jour ?

Les auteurs de la revue ont inclus les études qui avaient été publiées jusqu'en avril 2018.

Conclusions des auteurs: 

Les données probantes basées sur l'impact du paiement à la performance (P4P) s'est considérablement développée, avec une amélioration progressive de la qualité des études. Les programmes P4P pourraient avoir des effets variables sur les critères de jugement d'intérêt, et il existe une grande hétérogénéité dans les types de programmes mis en œuvre et les évaluations réalisées. Le P4P ne se présente pas comme une intervention homogène, mais plutôt comme un éventail d'approches. Ses effets dépendent de l'interaction de plusieurs variables, notamment de la conception de l'intervention (par exemple, qui reçoit les paiements), du montant du financement supplémentaire, des composantes annexes (telles que le support technique) et des éléments de contexte (y compris organisationnels).

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Contexte: 

Le paiement à la performance (P4P), ou rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP), suscite un intérêt croissant en tant que mode d’incitation des prestataires de soins de santé à s’aligner sur des objectifs de santé publique. Nous manquons de données probantes quant à l'efficacité de ces stratégies pour améliorer les soins et la santé dans les pays à revenu faible et intermédiaire (PRFI); il s'agit ici d'une mise à jour de la revue menée en 2012 sur ce sujet.

Objectifs: 

Évaluer les effets du paiement à la performance sur la prestation de soins de santé et sur les critères de jugement cliniques dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL, MEDLINE, Embase et 10 autres bases de données entre avril et juin 2018. Nous avons également consulté deux registres d’essais, des sites Web, les ressources en ligne de diverses agences internationales, organisations et universités, et nous avons contacté des experts du domaine. Les études identifiées comme recherches reconduites en 2020 figurent sous la rubrique « Études en attente de classification ».

Critères de sélection: 

Nous avons inclus des essais randomisés et non randomisés, des études contrôlées avant-après ou des études de séries chronologiques interrompues menées dans des PRFI (tels que définis par la Banque mondiale en 2018). P4P désigne un transfert d'argent ou de biens matériels conditionné par la réalisation d'une action mesurable ou par l'atteinte d'un objectif de performance prédéterminé. Pour être incluse, une étude devait mentionner au moins l’un des critères de jugement suivants : les critères de jugement cliniques des patients, changements dans les mesures ciblées de performance des prestataires (tels que la réalisation des soins), effets non intentionnels ou changements dans l'utilisation des ressources.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons extrait les données conformément au protocole initial de la revue et avons fait une synthèse descriptive des résultats. Nous avons suivi les procédures méthodologiques standard définies par Cochrane. Étant donné la diversité et la variabilité des types d'intervention, des populations de patients, des analyses et des rapports de critères de jugement, nous avons jugé la méta-analyse inappropriée. Nous avons noté l’éventail des effets associés à la P4P par rapport à chaque critère de jugement d’intérêt. En nous fondant sur les descriptions d'interventions fournies dans les documents, nous avons effectué un classement des programmes et étudié leurs différences en termes d’efficacité.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 59 études: des études contrôlées avant-après (19), des essais non randomisés (16) ou randomisés en grappes (14) et des études de séries chronologiques interrompues (9). Une étude comprenait à la fois une série chronologique interrompue et une étude contrôlée avant-après.

Les études se sont concentrées sur un large éventail d'interventions P4P, incluant les rémunérations sur objectifs et la rémunération aux résultats en fonction de la qualité (ou évaluations de la qualité et de l'équité). Une seule étude a évalué les aides basées sur les résultats. De nombreux programmes ont été subventionnés par les gouvernements nationaux (23 études), la Banque mondiale soutenant la plupart des projets à financement externe (11 études). Les services ciblés étaient variables; toutefois, la plupart des interventions étaient axées sur les indicateurs de santé reproductive, maternelle et infantile. Les participants se trouvaient principalement dans des établissements publics ou dans une diversité d'établissements publics, non gouvernementaux et confessionnels (54 études). Le P4P a été évalué principalement au niveau des établissements de santé, bien que d'autres niveaux tels que les administrations de district aient également été concernés.

La plupart des études ont évalué les effets du P4P par rapport à un groupe témoin (statu quo) (49 études); cependant, certaines études ont évalué le P4P par rapport à d’autres interventions (la plupart du temps une bonification financière destinée à égaler le P4P (17 études)). Quatre études ont observé les effets de l'intervention à la fois par rapport à un autre élément de comparaison et par rapport au statu quo.

Les études contrôlées avant-après présentaient un risque de biais plus élevé que les autres types d'étude. Mais certains essais randomisés ont également été déclassés en raison du risque de biais. Les études de séries chronologiques interrompues n'ont pas fourni suffisamment d'informations sur d'autres changements concomitants dans le cadre de l'étude.

Le P4P par rapport au statu quo

Concernant les services de santé spécifiquement ciblés, le P4P pourrait améliorer légèrement les critères de jugement cliniques (données probantes d’un niveau de confiance faible), mais peu d'études ont évalué cet aspect. Le P4P pourrait également améliorer la qualité globale des services (données probantes d’un niveau de confiance faible); il augmente probablement la disponibilité des professionnels de santé, des médicaments et des infrastructures et équipements performants (données probantes d’un niveau de confiance modéré). Le P4P pourrait produire des effets variables sur la prestation et l'utilisation des services (données probantes d’un niveau de confiance faible). Il pourrait avoir quelques effets involontaires de distorsion ou bien aucun, sur les critères de jugement non ciblés (données probantes d’un niveau de confiance faible), mais peu d'études ont évalué cela. Pour les critères de jugement secondaires, le P4P pourrait avoir peu ou pas de différence en ce qui concerne l'absentéisme, la motivation ou la satisfaction des prestataires (données probantes d’un niveau de confiance faible), mais pourrait améliorer la satisfaction et l'acceptabilité des patients (données probantes d’un niveau de confiance faible) et pourrait avoir un effet positif sur l'autonomie de gestion des établissements (données probantes d’un niveau de confiance faible). Le programme P4P n’apporte probablement que peu ou pas de différence dans la qualité d’organisation ou la gestion des installations (données probantes d’un niveau de confiance faible). Impacts mitigés sur l’équité (données probantes d’un niveau de confiance faible).

Pour les services de santé non ciblés, le P4P améliore probablement certains critères de jugement cliniques (données probantes d’un niveau de confiance modéré) ; il pourrait améliorer la prestation, l'utilisation et la qualité de certains services de santé, mais pour d’autres il pourrait n’y avoir que peu ou pas de différence (données probantes d’un niveau de confiance faible) ; et il pourrait avoir peu ou pas d'effets involontaires de distorsion (données probantes d’un niveau de confiance faible). Les effets du P4P sur la disponibilité des médicaments et d'autres ressources sont incertains (données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Le P4P comparé à d'autres stratégies

Concernant les critères de jugement cliniques et les services spécifiquement ciblés, le P4P pourrait faire peu ou pas de différence pour les critères de jugement cliniques (données probantes d’un niveau de confiance faible). Cependant peu d’études ont évalué cet aspect. Le P4P pourrait améliorer la qualité des services (données probantes d’un niveau de confiance faible) ; il pourrait avoir des effets variables sur la prestation et l'utilisation des services de santé ainsi que sur la disponibilité des équipements et des médicaments (données probantes d’un niveau de confiance faible).

Pour les critères de jugement cliniques et les services non ciblés, le P4P pourrait faire peu ou pas de différence sur les critères de jugement cliniques ainsi que sur la prestation et l'utilisation des services de santé (données probantes d’un niveau de confiance faible). Quant aux effets du P4P sur la qualité des services, sur la disponibilité des ressources et sur les effets non intentionnels, ils sont incertains (données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Résultats des analyses de sous-groupes

Les aides basées sur les résultats ainsi que les programmes utilisant la rémunération aux résultats en fonction de la qualité du service semblent avoir les effets positifs les plus importants sur les critères de jugement. Toutefois, une seule étude a évalué les aides basées sur les résultats, de sorte que les effets rapportés pourraient être trompeurs Dans l'ensemble, les programmes qui, à la fois, tiennent compte de la qualité du service et récompensent une prestation équitable semblent les plus performants en ce qui concerne l'utilisation des services.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Catherine Polge et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.