Question de la revue
Les médicaments antiviraux oraux (aciclovir, famciclovir et valaciclovir) sont-ils efficaces par rapport au placebo ? L'un de ces trois médicaments est-il supérieur aux deux autres pour supprimer les poussées d'herpès génital chez les patients souffrant de quatre récidives ou plus par an ? Dans cette revue, l'efficacité a été évaluée en déterminant le risque de connaître au moins une récidive au cours de la période de traitement dans chaque groupe.
Contexte
L'herpès génital est une maladie sexuellement transmissible (MST) causée par le virus de l'herpès simplex de type 1 (HSV-1) ou 2 (HSV-2). Chez certaines personnes infectées par ce virus, des vésicules cutanéo-muqueuses douloureuses se développent dans une petite zone de la région génitale et évoluent en érosions et croûtes. La répétition de cet événement est appelée récidive. Chaque récidive dure de 5 à 10 jours. Les options de traitement en cas de récidive de l'herpès génital comprennent l'abstention thérapeutique, un traitement symptomatique, un traitement antiviral épisodique de quelques jours à chaque récidive et un traitement suppresseur continu quotidien.
Caractéristiques des études
Un total de 26 essais incluant 6 950 patients ont été inclus dans cette revue. Cinquante-quatre pour cent de ces patients étaient des femmes, l'âge moyen était de 35 ans, et le nombre moyen de récidives par an avant l'inclusion dans les essais était de 11. La durée du traitement était de deux à douze mois dans les essais. Au total, 14 essais ont comparé l'aciclovir à un placebo. Quatre essais ont comparé le valaciclovir à un placebo et deux essais le valaciclovir à l'absence de traitement. Trois essais ont comparé le famciclovir à un placebo. Deux essais ont comparé le valaciclovir au famciclovir et un essai l'aciclovir au valaciclovir et à un placebo. Parmi les 26 essais inclus, 22 déclaraient un financement par un laboratoire pharmaceutique. La dernière recherche d'études a été réalisée en février 2014.
Principaux résultats
Le traitement antiviral suppresseur par l'aciclovir, le valaciclovir ou le famciclovir chez les patients souffrant d'au moins quatre récidives par an diminue le nombre de patients ayant au moins une récidive par rapport au placebo. Il n'y a aucune preuve suggérant que l'un de ces médicaments soit supérieur aux autres.
Qualité des preuves
Bien que les trois antiviraux aient donné de meilleurs résultats que le placebo, nous sommes dans l'incertitude quant à l'ampleur de la différence qui peut leur être attribuée, en raison de problèmes de conduite et de compte-rendu des études et d'incohérence de leurs résultats. La qualité des preuves est mauvaise et nous pensons que la taille des effets pourrait changer si d'autres recherches étaient menées. Comme peu d'études ont comparé les trois médicaments les uns aux autres, le fait qu'il n'y ait pas de différence entre eux en termes d'efficacité nous semble moyennement certain.
Il existe des preuves de faible qualité (en raison du risque de biais et des incohérences) que le traitement antiviral suppresseur par l'aciclovir, le valaciclovir ou le famciclovir chez les patients souffrant d'au moins quatre récidives d'herpès génital par an diminue le nombre de patients ayant au moins une récidive par rapport au placebo. La méta-analyse en réseau des quelques comparaisons directes et des comparaisons indirectes n'a pas montré de supériorité d'un médicament par rapport à un autre.
L'herpès génital est causé par le virus de l'herpès simplex de type 1 (VHS-1) ou 2 (VHS-2). Certaines personnes infectées connaissent des flambées d'herpès génital, généralement caractérisées par des lésions vésiculaires et érosives génitales localisées et douloureuses.
Comparer l'efficacité et l'innocuité de trois médicaments antiviraux oraux (aciclovir, famciclovir et valaciclovir) prescrits pour supprimer les poussées d'herpès génital chez les patient(e)s en l'absence de grossesse.
Nous avons effectué des recherches dans le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), MEDLINE, EMBASE, le portail de recherche du Système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et les bases de données des laboratoires pharmaceutiques jusqu'à février 2014. Nous avons également cherché dans les bases de données de la US Food and Drug Administration et dans les actes de sept congrès, en remontant à 10 ans en arrière au maximum. Nous avons également contacté des auteurs d'essais et des laboratoires pharmaceutiques.
Nous avons sélectionné des essais contrôlés randomisés en groupes parallèles et croisés, incluant des patients atteints d'herpès génital récidivant causé par le VHS quel qu'en soit le type (VHS-1, VHS-2 ou indéterminé), ayant au moins quatre récidives par an (nous n'avons pas retenu les essais menés sur des patients positifs pour le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) ni sur des femmes enceintes) et comparant le traitement antiviral suppresseur par l'aciclovir, le famciclovir ou le valaciclovir par voie orale avec un placebo ou un autre traitement antiviral suppresseur oral.
Deux auteurs de la revue ont sélectionné les essais et extrait les données de manière indépendante. Le risque de biais a été évalué à l'aide de l'outil correspondant. L'effet du traitement a été mesuré par le risque relatif (RR) d'avoir au moins une récidive d'herpès génital. Des RR groupés ont été obtenus par des méta-analyses par paires classiques. Une méta-analyse en réseau a permis d'estimer toutes les comparaisons deux par deux possibles entre les médicaments antiviraux.
Au total, 26 essais (dont six de conception croisée) ont été inclus. Parmi les 6 950 participants randomisés, 54 % (extrêmes de 0 et 100 %) étaient des femmes, l'âge moyen était de 35 ans (extrêmes de 26 et 45,1), et le nombre moyen de récidives par an était de 11 (fourchette de 6,3 à 17,8). La durée du traitement était de 2 à 12 mois. Le risque de biais a été jugé élevé pour la moitié des études et incertain pour l'autre moitié. Au total, 14 essais ont comparé l'aciclovir à un placebo, 4 essais ont comparé le valaciclovir à un placebo et 2 essais le valaciclovir à l'absence de traitement. Trois essais ont comparé le famciclovir à un placebo. Deux essais ont comparé le valaciclovir au famciclovir et un essai l'aciclovir au valaciclovir et à un placebo.
Nous avons analysé les données de 22 essais en définissant comme critère d'évaluation le risque d'avoir au moins une récidive clinique. Nous n'avons pas pu obtenir de données sur ce paramètre dans quatre essais. Dans les essais contrôlés par placebo, il existait des preuves de faible qualité d'une réduction du risque d'avoir au moins une récidive clinique avec l'aciclovir (neuf essais en groupes parallèles, n = 2 049 ; RR groupé 0,48, intervalle de confiance (IC) à 95 % de 0,39 à 0.58), le valaciclovir (quatre essais, n = 1 788 ; RR groupé 0,41, IC à 95 % de 0,24 à 0,69), ou le famciclovir (deux essais, n = 732 ; RR groupé 0,57, IC à 95 % de 0,50 au 0,64). Les six essais croisés ont montré, en moyenne, des effets plus importants du traitement que les essais en groupes parallèles. Nous avons trouvé des preuves d'un effet « petites études » pour les essais contrôlés par placebo de l'aciclovir (RR groupé ajusté 0,61, IC à 95 % de 0,49 à 0,75). En analysant les essais en groupes parallèles par dose quotidienne, nous n'avons trouvé aucune preuve claire d'une relation dose-réponse pour l'un des médicaments. Dans les essais de comparaison directe, le risque d'avoir au moins une récidive était augmenté avec le valaciclovir plus qu'avec l'aciclovir (un essai, n = 1 345 ; RR 1,16, IC à 95 % de 1,01 à 1,34) et n'a pas été significativement différent de celui observé avec le famciclovir par rapport au valaciclovir (un essai, n = 320 ; RR 1,18, IC à 95 % de 0,86 à 1,63).
Nous avons inclus 16 essais en groupes parallèles dans une méta-analyse en réseau, sans pouvoir déterminer lequel des médicaments était le plus efficace pour réduire le risque d'au moins une récidive clinique (après prise en compte de l'effet « petites études », RR groupé 0,83, IC à 95 % de 0,61 à 1,11 pour la comparaison valaciclovir-aciclovir ; RR groupé 1,04, IC à 95 % de 0,71 à 1,49 pour famciclovir-aciclovir, et RR groupé 1,26, IC à 95 % de 0,89 à 1,75 pour famciclovir-valaciclovir). Nous avons cherché des données sur l'innocuité mais elles étaient rapportées sous la forme du nombre total d'événements indésirables.
Traduction réalisée par Cochrane France