Question de la revue
Cette revue visait à déterminer l'efficacité et l'innocuité de la ventilation non invasive à pression positive (VNIPP) (pression aérienne positive continue (PAPC) ou VNIPP à deux niveaux) par rapport à l'oxygénothérapie seule chez les adultes souffrant d'insuffisance respiratoire aiguë après une chirurgie abdominale supérieure.
Contexte
L'insuffisance respiratoire aiguë, pathologie où du liquide s'accumule dans les poumons, empêchant l'oxygène de pénétrer dans le sang, est une complication relativement courante après une chirurgie abdominale et peut augmenter le risque de décès (mortalité).
La VNIPP est un type de traitement qui aide à améliorer la respiration sans avoir à insérer un tube dans la trachée du patient (intubation trachéale). Cette intervention est efficace dans le traitement de différentes maladies.
Caractéristiques de l'étude
Nous avons recherché dans les bases de données scientifiques des essais cliniques examinant le traitement des adultes souffrant d'insuffisance respiratoire aiguë après une chirurgie abdominale. Les essais comparaient la VNIPP avec les soins habituels (oxygénothérapie par un masque facial). Nous avons inclus deux essais portant sur 269 participants. Les participants étaient principalement des hommes (67 %) et avaient en moyenne 65 ans. Un essai a été mené dans plusieurs unités de soins intensifs (USI). Les deux essais incluaient des adultes atteints d'insuffisance respiratoire aiguë après une chirurgie abdominale supérieure. Les preuves datent de mai 2015.
Résultats principaux
Cette revue examine la mortalité, le taux d'intubation trachéale, la durée du séjour en USI, la durée du séjour en hôpital, les complications après la VNIPP, et les changements dans les niveaux de gaz dans le sang (gazométrie artérielle).
Par rapport à l'oxygénothérapie, la VNIPP réduisait le taux d'intubation trachéale. Sur 1000 adultes ayant développé une insuffisance respiratoire aiguë après une chirurgie abdominale supérieure, 181 adultes traités par oxygénothérapie devraient être intubés contre 54 adultes traités avec la VNIPP.
Par rapport à l'oxygénothérapie, la VNIPP tendait à réduire la mortalité. Toutefois, étant donné qu'il y avait peu de participants dans les deux essais, d'autres études sont nécessaires.
L'utilisation de la VNIPP a également réduit la durée du séjour en USI de près de deux jours par rapport à l'oxygénothérapie. Cependant, la durée moyenne du séjour à l'hôpital était similaire dans les deux groupes.
Par rapport à l'oxygénothérapie, la VNIPP améliorait les taux de gaz dans le sang une heure après l'intervention.
Il n'y avait pas suffisamment de preuves pour être certains que la PAPC ou la VNIPP avait un effet sur la désunion anastomotique (par exemple lorsque deux morceaux de l'intestin sont joints), les complications liées à la pneumonie, le sepsis (empoisonnement du sang) ou les infections. Cependant, les adultes traités avec la VNIPP avaient des taux de ces complications plus faibles que les adultes traités à l'oxygène.
Qualité des preuves
Les preuves étaient de basse qualité pour la mortalité hospitalière, de basse qualité pour le taux d'intubation trachéale, et de très basse qualité pour la durée du séjour en USI.
Conclusions des auteurs
Les résultats de cette revue indiquent que la VNIPP est une intervention efficace et sûre pour le traitement des adultes atteints d'insuffisance respiratoire aiguë après une chirurgie abdominale supérieure. Cependant, au vu de la qualité basse ou très basse des preuves, d'autres études, de bonne qualité, sont nécessaires pour confirmer ces résultats.
Les résultats de cette revue montrent que la PAPC ou VNIPP à deux niveaux est un traitement efficace et sûr pour les adultes souffrant d'insuffisance respiratoire aiguë après une chirurgie abdominale supérieure. Cependant, sur la base de la méthodologie Grading of Recommendations Assessment, Development and Evaluation (GRADE), la qualité des preuves était basse ou très basse. D'autres études, de bonne qualité, sont nécessaires pour confirmer ces résultats.
Chaque année, plus de quatre millions de chirurgies abdominales sont réalisées aux États-Unis et plus de 250 000 en Angleterre. L'insuffisance respiratoire aiguë, une complication fréquente qui peut affecter 30 % à 50 % des personnes après une chirurgie abdominale supérieure, peut conduire à une morbidité et une mortalité importantes. La ventilation non invasive a été associée à une diminution des taux d'intubation trachéale chez les adultes souffrant d'insuffisance respiratoire aiguë, réduisant ainsi l'incidence de complications et la mortalité. Cette revue a comparé l'efficacité et l'innocuité de la ventilation en pression positive non invasive (VNIPP) contre l'oxygénothérapie standard dans le traitement de l'insuffisance respiratoire aiguë après une chirurgie abdominale supérieure.
Évaluer l'efficacité et l'innocuité de la ventilation en pression positive non invasive (VNIPP), c'est à dire la pression aérienne positive continue (PAPC) ou VNIPP à deux niveaux, dans la réduction de la mortalité et le taux d'intubation trachéale chez les adultes souffrant d'insuffisance respiratoire aiguë après une chirurgie abdominale supérieure, par rapport à un traitement standard (oxygénothérapie). Évaluer les changements dans le taux de gaz dans le sang artériel, la durée du séjour à l'hôpital et en unité de soins intensifs (USI), d'insufflation gastrique, et de désunion anastomotique.
La dernière recherche a été effectuée le 12 mai 2015. Nous avons effectué des recherches dans les bases de données suivantes : le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL) (2015, numéro 5), MEDLINE (Ovid SP, de 1966 à mai 2015), EMBASE (Ovid SP, de 1974 à mai 2015) ; dans la base de données de la physiothérapie fondée sur les preuves (PEDro) (de 1999 à mai 2015) ; le Cumulative Index to Nursing and Allied Health Literature (CINAHL, EBSCOhost, de 1982 à mai 2015) et LILACS (BIREME, de 1986 à mai 2015). Nous avons examiné les références bibliographiques des études incluses et contacté des experts. Nous avons également effectué des recherches dans la littérature grise. Nous avons consulté les bases de données d'essais en cours, comme www.controlled-trials.com/ et www.trialscentral.org/. Nous n'avons appliqué aucune restriction de langue.
Nous avons sélectionné des essais contrôlés randomisés ou quasi-randomisés portant sur des adultes atteints d'insuffisance respiratoire aiguë après une chirurgie abdominale supérieure qui étaient traités avec de la PAPC ou VNIPP à deux niveaux avec ou sans traitement médicamenteux comme soins médicaux standard, par rapport aux adultes traités avec l'oxygénothérapie, avec ou sans soins médicaux standard.
Deux auteurs ont indépendamment sélectionné et extrait les données des études éligibles à l'aide d'un formulaire standardisé. Nous avons évalué la qualité des études en évaluant l'affectation cachée ; la génération de séquences aléatoires ; les données de critères de jugement incomplètes ; la mise en aveugle des participants, du personnel, et des évaluateurs des critères de jugement ; les rapports sélectifs ; et le respect du principe de l'intention de traiter (ITT).
Nous avons inclus deux essais portant sur 269 participants. Les participants étaient principalement des hommes (67 %) ; l'âge moyen était de 65 ans. Les essais ont été réalisés en Chine et l'Italie (l'un des deux était un essai multicentrique). Les deux essais incluaient des adultes atteints d'insuffisance respiratoire aiguë après une chirurgie abdominale supérieure. Nous avons jugé que les deux essais avaient un risque élevé de biais. Par rapport à l'oxygénothérapie, la PAPC ou VNIPP à deux niveaux pourrait réduire le taux d'intubation trachéale (risque relatif (RR) 0,25 ; intervalle de confiance à 95 % (IC) de 0,08 à 0,83 ; preuves de basse qualité), avec un nombre de sujets à traiter pour obtenir un résultat bénéfique supplémentaire de 11. Il y avait des preuves de très basse qualité indiquant que l'intervention pourrait également réduire la durée du séjour en USI (différence moyenne (DM) -1,84 jours ; IC à 95 % de -3,53 à -0,15). Nous n'avons trouvé aucune différence pour la mortalité (preuves de basse qualité) et la durée de séjour à l'hôpital. Il n'y a pas suffisamment de preuves pour être certains que la PAPC ou VNIPP ait eu un effet sur la désunion anastomotique, les complications liées à la pneumonie, le sepsis ou les infections. Les résultats d'un essai de 60 participants ont suggéré que la VNIPP à deux niveaux, par rapport à l'oxygénothérapie, peut améliorer les niveaux de gaz dans le sang et le pH sanguin une heure après l'intervention (pression partielle artérielle d'oxygène (PaO2) : DM de 22,5 mm Hg ; IC à 95 % de 17,19 à 27,81 ; pH : DM 0,06 ; IC à 95 % de 0,01 à 0,11 ; pression partielle du niveau de dioxyde de carbone (PCO2) dans le sang artériel (DM -9,8 mm Hg ; IC à 95 % de -14,07 à -5,53). Les essais inclus dans cette revue systématique n'ont pas présenté des données sur les critères de jugement suivants que nous voulions évaluer : l'insufflation gastrique, les fistules, le pneumothorax, les saignements, la dégradation de la peau, l'irritation oculaire, la congestion des sinus, l'assèchement bucco-nasal et l'asynchronie patient-ventilateur.
Post-édition : Alice Baert (M2 ILTS, Université Paris Diderot)