La propionyl-L-carnitine dans la claudication intermittente

Contexte

La maladie artérielle périphérique, le plus souvent due à l'athérosclérose systémique, touche 4 à 12 % de la population âgée de 55 à 70 ans et jusqu'à 20 % des personnes de plus de 70 ans. Les maladies artérielles périphériques ont tendance à être plus fréquentes chez les hommes en général, mais les femmes ont plus de formes asymptomatiques. Environ 10 à 35 % des personnes atteintes d’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) signalent une claudication intermittente. La claudication intermittente se caractérise par une douleur dans les jambes ou les fesses qui survient à l'effort et s'atténue au repos. Par rapport à des témoins appariés selon l'âge, les personnes souffrant de claudication intermittente ont un risque de mortalité cardiovasculaire six fois plus élevé. Le traitement doit inclure toutes les mesures de prévention des maladies cardiovasculaires, à savoir l'arrêt du tabac, l'exercice physique et le traitement de l'hypertension, du diabète et du cholestérol. Les médicaments antiplaquettaires et les statines sont administrés pour réduire le risque d'événements cérébrovasculaires et coronariens.

Pour améliorer les symptômes de la claudication, l'exercice régulier (supervisé) et l'arrêt du tabac sont les piliers de la prise en charge de la claudication intermittente. Les traitements médicamenteux peuvent inclure, outre les antiplaquettaires et les hypolipidémiants, des agents vasoactifs pour améliorer le flux sanguin, réduire la douleur et améliorer la distance de marche. Une minorité de personnes souffrant de claudication intermittente subissent une intervention endovasculaire ou une chirurgie vasculaire. De nombreux agents pharmacologiques ont été préconisés pour traiter la claudication intermittente, mais aucun n'a été accepté dans le monde entier. Quelques-uns montrent une amélioration légère à modérée de la performance de marche et sont prudemment proposées dans les directives. La propionyl-L-carnitine est un médicament qui pourrait atténuer les symptômes de l’AOMI par une voie métabolique, améliorant ainsi les performances à l'effort.

Principaux résultats

Une recherche d'articles pertinents portant sur l’utilisation de la propionyl-L-carnitine dans le traitement de la claudication intermittente a permis d'identifier 12 essais pertinents correspondant à nos critères d'inclusion (en cours jusqu'en juillet 2021). Dans 11 études, les participants ont reçu soit 1 gramme à 2 grammes de propionyl-L-carnitine oral (9 études) ou de propionyl-L-carnitine intraveineux (3 études) par jour, soit un placebo. Une étude a comparé la propionyl-L-carnitine à la L-carnitine. Les études comparant la propionyl-L-carnitine à d'autres interventions telles que l'exercice, d'autres médicaments, une intervention endovasculaire ou une chirurgie vasculaire n'ont pas été identifiées.

La distance de marche maximale est la distance parcourue pendant un test standardisé à laquelle le participant s'arrête de marcher en raison de crampes musculaires. La distance de marche sans douleur est la distance parcourue pendant un test standardisé jusqu'au début de la douleur. Ces deux distances étaient les critères de jugement de la revue et ont montré une amélioration modérée. Pour la distance maximale de marche, les participants sous propionyl-L-carnitine ont marché 50,86 mètres ou 26 % plus loin que les participants sous placebo ; pour la distance de marche sans douleur, les participants sous propionyl-L-carnitine ont marché 32,98 mètres ou 31 % plus loin que les participants sous placebo. Les participants ayant pris de la propionyl-L-carnitine ont montré une amélioration de l'indice de pression systolique en cheville de 0,09 par rapport aux participants ayant pris un placebo. L'amélioration de la qualité de vie était également plus importante dans le groupe propionyl-L-carnitine ; toutefois, cette constatation ne repose que sur les résultats d'une seule étude. Les effets indésirables de la propionyl-L-carnitine étaient similaires à ceux du placebo et consistaient principalement en nausées, intolérance gastrique et symptômes grippaux. La propionyl-L-carnitine semble être un médicament bien toléré et sûr.

Dans l'étude unique sur le propionyl-L-carnitine par rapport à la L-carnitine, les participants sous propionyl-L-carnitine ont montré une amélioration significativement plus importante de la performance de marche par rapport à ceux recevant la L-carnitine (maximale et sans douleur). Cette étude n'a pas rapporté sur les autres critères de jugement de cette revue.

Niveau de confiance des données probantes

Le niveau de confiance global des données probantes était modéré (pour la propionyl-L-carnitine par rapport au placebo) ou faible (pour la propionyl-L-carnitine par rapport à la L-carnitine) en raison des différences entre les études, telles que les participants provenant de différents pays et centres, les participants diabétiques et non diabétiques, l'utilisation de différents protocoles de tapis roulant, le petit nombre de participants et la courte durée du suivi, respectivement.

Conclusion

Lorsque la propionyl-L-carnitine a été comparée au placebo, l'amélioration de la distance de marche était légère à modérée et les profils de sécurité étaient similaires, avec un niveau de confiance global modéré des données probantes. Bien que dans la pratique clinique, la propionyl-L-carnitine puisse être considérée comme une médecine alternative utile ou un complément au traitement standard lorsque ces thérapies sont contre-indiquées ou inefficaces, nous n'avons pas trouvé de données probantes issues d'essais cliniques comparant la propionyl-L-carnitine au traitement standard pour soutenir directement cette utilisation.

Conclusions des auteurs: 

Lorsque la propionyl-L-carnitine a été comparée au placebo, l'amélioration de la distance de marche était légère à modérée et les profils de tolérance étaient similaires, avec un niveau de confiance global modéré des données probantes. Bien que dans la pratique clinique, la propionyl-L-carnitine puisse être considérée comme une alternative ou un adjuvant au traitement standard lorsque ces thérapies s'avèrent contre-indiquées ou inefficaces, nous n'avons pas trouvé de données probantes issues d’essais contrôlés randomisés comparant la propionyl-L-carnitine au traitement standard pour soutenir directement cette utilisation.

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Contexte: 

La maladie artérielle périphérique est une manifestation de l'athérosclérose systémique. La claudication intermittente est une forme symptomatique de l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) qui se caractérise par une douleur dans les membres inférieurs. Cette douleur se développe dans un membre pendant l'exercice et est soulagée par le repos. La propionyl-L-carnitine est un médicament qui pourrait atténuer les symptômes de l’AOMI par une voie métabolique, améliorant ainsi les performances à l'effort.

Objectifs: 

L'objectif de cette revue est de déterminer si la propionyl-L-carnitine est efficace par rapport au placebo, à d'autres médicaments ou à d'autres interventions utilisées dans le traitement de la claudication intermittente (p. ex. exercice, intervention endovasculaire, chirurgie) pour augmenter la distance sans douleur et la distance de marche maximale chez les personnes souffrant de claudication intermittente stable, stade II de Fontaine.

Stratégie de recherche documentaire: 

Le spécialiste de l'information du groupe Cochrane sur les maladies vasculaire a effectué des recherches dans le registre spécialisé du groupe Cochrane sur les maladies vasculaires, dans les bases de données CENTRAL, MEDLINE, Embase et CINAHL, ainsi que dans Système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) de l'OMS et dans le registre des essais ClinicalTrials.gov jusqu'au 7 juillet 2021. Nous avons vérifié les références et contacté les auteurs des études et les sociétés pharmaceutiques pour identifier d'autres études non publiées et en cours.

Critères de sélection: 

Essais contrôlés randomisés en double aveugle chez des personnes souffrant de claudication intermittente (stade II de Fontaine) recevant la propionyl-L-carnitine par rapport à un placebo ou une autre intervention. Les critères de jugement comprenaient la performance de marche sans douleur (distance initiale de claudication) et la performance de marche maximale (distance absolue de claudication), analysées par un test d'exercice sur tapis roulant standardisé, ainsi que l'index de pression systolique à la cheville (IPS), la qualité de vie, la progression de la maladie et les événements indésirables.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont indépendamment sélectionné les essais, extrait les données et évalué les essais en fonction du risque de biais. Nous avons contacté les auteurs des études pour obtenir des informations supplémentaires.

Nous avons résolu les désaccords par consensus. Nous avons effectué des méta-analyses à effet fixe avec des différences moyennes (DM) et des intervalles de confiance (IC) à 95 %. Nous avons évalué le niveau de confiance des données probantes selon la méthode GRADE.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 12 études dans cette revue avec un nombre total de 1423 participants randomisés. La majorité des études incluses ont évalué la propionyl-L-carnitine par rapport au placebo (11 études, 1395 participants), et une étude a évalué la propionyl-L-carnitine par rapport à la L-carnitine (1 étude, 26 participants). Nous n'avons identifié aucun essai contrôlé randomisé évaluant la propionyl-L-carnitine par rapport à tout autre médicament, exercice, intervention endovasculaire ou chirurgie. Les participants ont reçu de 1 à 2 grammes de propionyl-L-carnitine par voie orale (9 études) ou intraveineuse (3 études) par jour ou un placebo.

Pour la propionyl-L-carnitine comparée au placebo, il y avait un niveau élevé d'hétérogénéité à la fois clinique et statistique en raison de la taille des études, des participants provenant de différents pays et centres, de la combinaison de participants avec et sans diabète, et de l'utilisation de différents protocoles de tapis roulant. Nous avons trouvé une forte proportion d'études soutenues par les compagnies pharmaceutiques. Le niveau de confiance global des données probantes était modéré.

Pour la propionyl-L-carnitine comparée au placebo, l'amélioration de la performance de marche maximale était plus importante pour la propionyl-L-carnitine que pour le placebo, avec une différence moyenne d'amélioration absolue de 50,86 mètres (IC à 95 %: 50,34 à 51,38 ; 9 études, 1121 participants), ou une amélioration relative de 26 % (IC à 95 % : 23 % à 28 %). L'amélioration de la distance de marche sans douleur était également plus importante pour la propionyl-L-carnitine que pour le placebo, avec une différence moyenne d'amélioration absolue de 32,98 mètres (IC à 95 % 32,60 à 33,37 ; 9 études, 1151 participants), soit une amélioration relative de 31 % (IC à 95 % : 28 % à 34 %). L'amélioration de l'IPS était plus importante pour la propionyl-L-carnitine que pour le placebo, avec une différence moyenne d'amélioration de 0,09 (IC à 95 % : 0,08 à 0,09 ; 4 études, 369 participants). L'amélioration de la qualité de vie était plus importante avec la propionyl-L-carnitine (DM 0,06, IC à 95 % : 0,05 à 0,07 ; 1 étude, 126 participants). La progression de la maladie et les effets indésirables, notamment les nausées, l'intolérance gastrique et les symptômes grippaux, n'ont pas été très différents entre le propionyl-L-carnitine et le placebo.

Pour la comparaison de la propionyl-L-carnitine avec la L-carnitine, le niveau de confiance des données probantes était faible car il s'agissait d'une seule étude croisée de très petite taille. L'amélioration moyenne de la distance de marche maximale était légèrement supérieure pour la propionyl-L-carnitine par rapport à la L-carnitine, avec une différence moyenne d'amélioration absolue de 20,00 mètres (IC à 95 %: 0,47 à 39,53 ; 1 étude, 14 participants) ou une amélioration relative de 16 % (IC à 95 %: 0,4 % à 31,6 %). Nous n'avons pas trouvé de données probantes suggérant une différence nette dans la distance de marche sans douleur (amélioration absolue de 4,00 mètres, IC à 95 %: -9,86 à 17,86 ; 1 étude, 14 participants) ; ou une amélioration relative de 3 % (IC à 95 % : -7,4 % à 13,4 %). Aucun des autres critères de jugement de cette revue n'a été rapporté dans cette étude.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Judith Catella et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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