La syphilis est une infection sexuellement transmissible causée par la bactérie Treponema pallidum. Problème majeur de santé publique dans les pays en voie de développement, elle évolue en quatre stades et peut être mortelle si elle n'est pas traitée. Une femme enceinte infectée peut transmettre la syphilis à son bébé, ce qui peut causer à celui-ci une grave maladie néonatale voire sa mort in utero ou à la naissance. L'infection peut se transmettre par contact inter-personnel direct au niveau d'ulcérations sur les lèvres, la bouche, les organes génitaux et d'autres zones, ainsi que lors des rapports sexuels vaginaux, anaux ou oraux. Les plaies ulcérées augmentent également le risque d'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH). Un dépistage systématique de la syphilis dans le cadre du suivi prénatal existant a été recommandé comme moyen efficace de réduire les répercussions de la maladie. Toutefois, en dépit de dizaines d'années d'efforts et d'avancées substantielles dans les programmes et les technologies de dépistage, le succès des mesures de prévention et de traitement de la syphilis reste mitigé. Ceci est principalement dû au retard dans l'identification et le traitement des femmes infectées. Les difficultés techniques et logistiques du dépistage, le manque de soins prénataux et la qualité médiocre des services font partie des facteurs qui favorisent cette situation. Il est donc crucial d'examiner les essais contrôlés randomisés disponibles afin de déterminer quelles stratégies de dépistage sont les plus efficaces dans les pays en voie de développement.
Deux essais inclus ont évalué le dépistage de la syphilis sur le lieu des soins par rapport aux méthodes de dépistage conventionnelles. Le premier essai, mené en Mongolie, comparait des tests rapide et conventionnel de dépistage du tréponème. Le dépistage sur le lieu des soins permet d'obtenir, le même jour, à la fois le résultat du test et le traitement. L'essai a rapporté une amélioration notable de la couverture par le dépistage, de la détection des cas et du traitement, aussi bien à la première visite qu'au troisième trimestre, par rapport au dépistage conventionnel. Le deuxième essai a été mené dans des établissements de soins primaires en zone rurale en Afrique du Sud. Le dépistage sur site à l'aide du test rapide de la réagine plasmatique (RPR) a été comparé à un test de dépistage conventionnel. Parmi les femmes qui se sont avérées positives pour la syphilis, aucune réduction nette du nombre de décès périnataux n'a été observée chez celles testées avec le RPR par rapport à au test conventionnel ; les difficultés techniques et logistiques n'ont pas été rapportées.
Les deux essais étaient principalement à risque de biais élevé ou incertain. Dans un essai, celui de Mongolie, le dépistage sur site était plus efficace pour la détection des cas de syphilis. D'autres essais sont nécessaires, en particulier dans les régions où le fardeau de la maladie est en augmentation et où le risque de co-infection par le VIH est élevé en raison de la forte prévalence de ce dernier.
Cette revue a inclus des preuves issues de deux essais randomisés en grappes à risque de biais élevé ou incertain pour la plupart des domaines. Les données n'ont pas été combinées dans une méta-analyse car les essais utilisaient des mesures d'efficacité qui n'étaient pas comparables.
Le dépistage de la syphilis sur le lieu des soins a donné des résultats prometteurs, en termes de taux de détection et de traitement de la syphilis et d'utilisation dans des contextes différents. En Mongolie, il a été jugé efficace pour augmenter la proportion de femmes enceintes testées pour la syphilis et leur traitement, réduisant ainsi la syphilis congénitale tout en améliorant l'accès au traitement des femmes et de leurs partenaires. En revanche, dans l'Afrique du Sud rurale, il n'y a pas de preuves que le dépistage de la syphilis sur le lieu des soins ait amélioré le taux de traitement adéquat des femmes ayant un résultat positif ou réduit la mortalité périnatale ; il s'avère cependant qu'il a raccourci le délai avant la demande de traitement.
Des essais supplémentaires sont donc nécessaires pour déterminer l'efficacité des stratégies de dépistage disponibles afin d'améliorer les répercussions de la syphilis chez les femmes enceintes et les nouveau-nés, en particulier dans les régions à haut risque.
Chaque année, des infections évitables par la syphilis touchent environ deux millions de femmes enceintes, principalement dans les pays en voie de développement. Malgré l'extension des programmes de dépistage prénatal de la syphilis au cours des dernières décennies, cette maladie reste un problème majeur de santé publique dans les pays en voie de développement. Son dépistage sur le lieu des soins peut être une stratégie utile pour prévenir la mortalité périnatale qui lui est associée et ses autres conséquences négatives dans des conditions de ressources limitées. Toutefois, les preuves concernant l'efficacité de cette approche proviennent principalement d'études observationnelles ou ont été rapportée sous la forme d'un effet d'intervention mixte.
Évaluer l'efficacité du dépistage prénatal de la syphilis dans l'amélioration de l'intégration des tests de dépistage et du traitement et la réduction de la mortalité périnatale.
Nous avons effectué des recherches dans le registre d'essais cliniques du groupe Cochrane sur la grossesse et l'accouchement (30 septembre 2014) et les références bibliographiques des études trouvées.
Essais contrôlés randomisés (individuels et en grappes) comparant différents tests de dépistage réalisés au cours d'examens prénataux de routine avec l'absence de test de dépistage. Les essais croisés et les plans d'étude quasi expérimentaux n'étaient pas éligibles pour l'inclusion.
Deux auteurs de la revue ont évalué indépendamment les essais à inclure et les risques de biais, extrait les données et vérifié leur exactitude.
Nous avons inclus deux essais contrôlés randomisés en grappes (trois rapports) qui essais évaluaient les méthodes de dépistage de la syphilis sur le lieu des soins et conventionnelles et portaient sur un total de 8493 femmes enceintes. Les données issues de ces essais ne se prêtaient pas à la méta-analyse car l'efficacité a été évaluée d'une manière qui n'était pas comparable.
Un essai dans lequel 14 cliniques de suivi prénatal (et 7700 femmes enceintes) ont été randomisées a été effectué à Oulan-Bator en Mongolie. Cet essai évaluait le dépistage de la syphilis sur le lieu des soins à l'aide d'un test rapide de recherche du tréponème ; nous avons jugé ses méthodes de génération de séquences aléatoires et d'assignation secrète imprécises tout comme son risque de biais de notification sélective et d'autres biais, et son risque de biais pour données de résultat incomplètes comme peu élevé. La mise en aveugle n'était pas rapportée et a été jugée à haut risque. Le dépistage sur le lieu des soins permet d'avoir le même jour les résultats du test et le traitement. Il semble que les résultats de l'essai aient été ajustés afin de tenir compte des grappes. Nous avons saisi les données dans le logiciel RevMan en utilisant la méthode de variance inverse générique. L'incidence de la syphilis congénitale était plus faible dans les groupes de dépistage sur le lieu des soins (rapport des cotes ajusté (AOR) 0,09, intervalle de confiance (IC) à 95 % de 0,01 à 0,71) et la proportion de femmes testées était plus élevée dans les groupes bénéficiant du dépistage sur le lieu des soins aussi bien lors de la première visite prénatale qu'au troisième trimestre visite (RC 989,80, IC à 95 % de 16,27 à 60233,05 ; RC 617,88, IC à 95 % de 13,44 à 28399,01). La proportion de traitements adéquats et de traitements du partenaire était plus élevée avec le dépistage sur le lieu des soins (AOR 10,44, IC à 95 % de 1,00 à 108,99 ; AOR 18,17, IC à 95 % de 3,23 à 101,20) et un plus grand nombre de cas de syphilis ont été détectés au premier trimestre et au troisième avec le dépistage sur le lieu des soins (AOR 2,45, IC à 95 % de 1,44 à 4,18 ; AOR 6,27, IC à 95 % de 1,47 à 26,69). La mortalité périnatale, l'incidence du VIH, les obstacles à la participation au dépistage, les autres effets indésirables ou l'utilisation des ressources de santé n'ont pas été rapportés dans cet essai.
Dans le deuxième essai, des cliniques ont été réparties en sept paires appariées (soit 7618 femmes enceintes, bien que seuls les résultats des cas positifs (793 femmes) soient présentés), et une clinique de chaque paire a été randomisée pour effectuer des dépistages sur le lieu des soins, l'autre continuant les tests de laboratoire de routine. L'essai a été réalisé dans des centres de soins de santé primaires de cliniques au KwaZulu-Natal, en Afrique du Sud. La génération de séquences aléatoires a été considérée comme présentant un faible risque de biais, mais l'assignation secrète et les données de résultat incomplètes ont été jugées à haut risque. D'autres biais et le biais de notification sélective restent indéterminés. La mise en aveugle n'a pas été rapportée et a été jugée à haut risque de biais. Cet essai examinait le critère d'évaluation principal de notre revue (mortalité périnatale) et les critères d'évaluation secondaires (effets indésirables, traitement adéquat, prévalence de la syphilis) dans le sous-groupe de femmes positives pour la syphilis (793 femmes). Un seul critère d'évaluation, le traitement adéquat, a été ajusté pour tenir compte du plan d'étude en grappes. Cependant, les informations fournies ne sont pas suffisantes pour l'inclure dans une analyse utilisant la méthode de variance inverse générique. Lorsque cela était possible, les résultats ont donc été présentés sous forme de graphiques en forêt (mortalité périnatale, traitement adéquat) si les données étaient issues d'un essai contrôlé randomisé en groupes parallèles. Ces résultats doivent donc être interprétés avec prudence.
L'essai a rendu compte de la mortalité périnatale chez les femmes testées positives et a montré qu'il n'y avait aucune preuve claire d'un effet du dépistage sur le lieu des soins à l'aide d'un test rapide de réagine plasmatique sur la réduction de la mortalité périnatale (rapport des cotes (RC) 0,63 ; IC à 95 % de 0,27 à 1,48 ; 18/549 (3,3 %) contre 8/157 (5,1 %)). Après avoir été perdues de vue, 396 femmes positives sur 618 (64,1 %) ont reçu un traitement adéquat (deux doses ou plus de 2,4 méga-unités de benzathine pénicilline) dans l'intervention en grappes contre 120 sur 175 (68,6 %) dans le groupe témoin (RC 0,82 ; IC à 95 % de 0,57 à 1,17). Il n'a pas été possible d'inclure d'autres données sur les critères d'évaluation rapportés dans des graphiques en forêt (effets indésirables, prévalence de la syphilis). Ni l'incidence de la syphilis congénitale, ni la proportion de femmes testées pour la syphilis, l'incidence du VIH/SIDA, les obstacles à la participation au dépistage, le traitement des partenaires ou l'utilisation des ressources de santé n'ont été rapportés dans cet essai.
Traduction réalisée par Cochrane France