La maladie de Crohn est un état inflammatoire chronique de l'intestin, qui peut toucher une personne à n'importe quel point de la bouche à l'anus. Certaines hormones spécifiques (les protéines qui transmettent des instructions dans l'organisme) connues pour jouer un rôle dans la réponse à la douleur pourraient être impliquées dans l'inflammation sous-jacente à la maladie de Crohn. Peut-être qu'en administrant aux patients une faible dose de l'une de ces protéines appelée la naltréxone, la maladie de Crohn pourrait être améliorée.
L'objectif de cette revue systématique était d'examiner l'efficacité et l'innocuité (c.-à-d. effets secondaires) d'un traitement à la naltréxone à faible dose pour induire une rémission chez les personnes souffrant de la maladie de Crohn active. Cette revue a identifié deux essais contrôlés randomisés de petite taille qui incluaient un total de 46 participants. Une étude comparait 12 semaines de traitement avec une faible dose de naltréxone (4,5 mg / jour) à un placebo (c.-à-d. un faux médicament, tel qu'une pilule de sucre) chez 34 patients adultes atteints de maladie de Crohn active. L'autre étude comparait huit semaines de traitement avec une faible dose de naltréxone (0,1 mg / kg jusqu'à un maximum de 4,5 mg / jour) à un placebo chez 12 enfants atteints de maladie de Crohn active. Les résultats des deux études étaient imprécis en ce qui concerne la proportion de patients ayant obtenu une rémission clinique. Les résultats de l'étude sur les patients adultes suggèrent que la naltréxone à faible dose peut apporter un bénéfice en termes de réponse clinique (c.-à-d. une amélioration des symptômes de la maladie) et de réponse endoscopique (c.-à-d. une réduction de l'inflammation de l'intestin apparente à l'examen de l'intestin avec un endoscope). Nous n'avons pas pu déterminer si la naltréxone à faible dose a entraîné des effets secondaires spécifiques, notamment des troubles du sommeil, des rêves inhabituels, des maux de tête, une diminution de l'appétit, des nausées ou une fatigue, en raison du faible nombre de personnes ayant ressenti de tels problèmes dans les études. Les résultats de cette revue doivent être interprétés avec prudence car ils sont basés sur un petit nombre de patients et la qualité globale des preuves a été considérée comme faible en raison du manque de précision des résultats. Par conséquent, aucune conclusion définitive ne peut être tirée concernant l'efficacité et le profil d'effets secondaires d'un traitement à la naltréxone à faible dose pour les patients atteints de maladie de Crohn active. D'autres essais contrôlés randomisés sont nécessaires pour évaluer l'efficacité et les effets secondaires du traitement à la naltréxone à faible dose dans la maladie de Crohn active chez les adultes et les enfants. Une étude est actuellement en cours et les résultats devraient être disponibles en 2014 ou 2015.
Actuellement, il n'existe pas suffisamment de preuves pour pouvoir tirer des conclusions définitives concernant l'efficacité et l'innocuité de la LDN pour traiter les patients atteints de maladie de Crohn active. Les données issues d'une étude de petite taille suggèrent que la LDN pourrait apporter un bénéfice en termes de réponse clinique et endoscopique chez les patients adultes atteints de maladie de Crohn active. Les données issues de deux petites études suggèrent que la LDN n'augmente pas le taux d'événements indésirables spécifiques par rapport au placebo. Cependant, ces résultats doivent être interprétés avec prudence car ils sont basés sur un nombre très réduit de patients et la qualité globale des preuves était faible en raison d'une imprécision importante. D'autres essais contrôlés randomisés sont nécessaires pour évaluer l'efficacité et l'innocuité du traitement par la LDN dans la maladie de Crohn active chez les adultes et les enfants. Une étude est actuellement en cours (NCT01810185).
La maladie de Crohn est une affection inflammatoire transmurale récurrente touchant le tube digestif. La signalisation des opiacés, dont l'influence sur la sécrétion et la motilité intestinales est connue de longue date, a été impliquée dans la cascade inflammatoire de la maladie de Crohn. La naltréxone, un antagoniste des opiacés, à faible dose a attiré l'intérêt en tant que traitement potentiel.
L'objectif principal était d'évaluer l'efficacité et l'innocuité de la naltréxone à faible dose pour l'induction d'une rémission dans la maladie de Crohn.
Une recherche systématique dans MEDLINE, EMBASE, CENTRAL et le registre spécialisé du groupe Cochrane sur les maladies inflammatoires de l'intestin et les troubles fonctionnels intestinaux a été réalisée de leur création respective jusqu'à février 2013 pour identifier des études pertinentes. Les actes des principales conférences de gastro-entérologie, Digestive Disease Week et United European Gastroenterology Week y compris, et les références bibliographiques des articles extraits ont également été examinés.
Les essais contrôlés randomisés sur la naltréxone à faible dose (low dose naltrexone ou LDN) dans le traitement de la maladie de Crohn active ont été inclus.
Les données ont été analysées en intention de traiter à l'aide de Review Manager (RevMan 5.2). Le critère de jugement principal était l'induction d'une rémission clinique définie par un indice d'activité de la maladie de Crohn (CDAI) de < 150 ou un indice d'activité de la maladie de Crohn pédiatrique (PCDAI) < 10. Les critères de jugement secondaires incluaient la réponse clinique (baisse de 70 ou de 100 points du CDAI par rapport au début), une rémission ou une réponse endoscopique, la qualité de vie, et les événements indésirables tels que définis par les études incluses. Les risques relatifs (RR) et intervalles de confiance (IC) à 95 % ont été calculés pour les résultats dichotomiques. La qualité méthodologique des études incluses a été évaluée en utilisant l'outil Cochrane de risque de biais. La qualité globale des preuves étayant le critère de jugement principal et les critères secondaires sélectionnés a été évaluée selon les critères GRADE.
Deux études ont été identifiées (46 participants). Une étude a évalué l'efficacité et l'innocuité de 12 semaines de traitement par la LDN (4,5 mg / jour) par rapport à un placebo chez des patients adultes (N = 34). L'autre étude a évalué huit semaines de traitement par la LDN (0,1 mg / kg, maximum de 4,5 mg / jour) par rapport à un placebo chez des patients pédiatriques (N = 12). L'objectif principal de cette étude pédiatrique était d'évaluer l'innocuité et la tolérabilité. Les deux études ont été considérées comme présentant un faible risque de biais. L'étude sur les patients adultes a rapporté que 30 % (5/18) des patients traités par la LDN ont obtenu une rémission clinique à 12 semaines contre 18 % (3/16) des patients sous placebo, une différence qui n'était pas statistiquement significative (RR 1,48, IC à 95 % 0,42 à 5,24). L'étude sur les enfants a rapporté que 25 % des patients traités par la LDN ont obtenu une rémission clinique (PCDAI < 10) contre aucun patient dans le groupe sous placebo, bien qu'il était difficile de savoir si ce résultat concernait l'essai randomisé contrôlé par placebo ou l'étude d'extension ouverte. Dans l'étude portant sur les adultes, les taux de réponse clinique de 70 points ont été significativement plus élevés chez les patients traités par la LDN que dans le groupe sous placebo. Quatre-vingt-trois pour cent (15/18) des patients sous LDN présentaient une réponse clinique de 70 points à 12 semaines contre 38 % (6/16) des patients sous placebo (RR 2,22, IC à 95 % 1,14 à 4,32). L'effet de la LDN sur la proportion de patients adultes présentant une réponse clinique de 100 points était incertain. Soixante-et-un pour cent (11/18) des patients sous LDN ont obtenu une réponse clinique de 100 points contre 31 % (5 / 16) des patients sous placebo (RR 1,96, IC à 95 % 0,87 à 4,42). La proportion de patients ayant obtenu une réponse endoscopique (baisse de l'indice CDEIS > 5 par rapport au début) était significativement plus élevée dans le groupe sous LDN par rapport au placebo. Soixante-douze pour cent (13/18) des patients sous LDN ont obtenu une réponse endoscopique contre 25 % (4/16) des patients sous placebo (RR 2,89 ; IC à 95 % 1,18 à 7,08). Cependant, il n'y avait aucune différence statistiquement significative dans la proportion de patients ayant obtenu une rémission endoscopique. Une rémission endoscopique (CDEIS < 3) a été obtenue chez 22 % (4/18) des patients dans le groupe sous LDN contre 0 % (0/16) dans le groupe sous placebo (RR 8,05 ; IC à 95 % 0,47 à 138,87). Les données combinées de ces deux études n'ont montré aucune différence statistiquement significative en termes d'arrêts prématurés en raison d'événements indésirables ou d'événements indésirables spécifiques, y compris troubles du sommeil, rêves inhabituels, céphalées, diminution de l'appétit, nausées et fatigue. Aucun événement indésirable grave n'était rapporté dans aucune des études. Les analyses GRADE ont déterminé la qualité globale des preuves pour les critères de jugement principaux et secondaires (c.-à.-d. rémission clinique, réponse clinique, réponse endoscopique et événements indésirables) comme faible en raison d'une imprécision importante (données peu nombreuses).