Question de la revue
Nous avons examiné les données probantes de l’efficacité et de l’innocuité d’une nouvelle classe de médicaments appelés modulateurs sélectifs des récepteurs de la progestérone (MSRP) pour le traitement des femmes préménopausées présentant des fibromes utérins.
Contexte
Les fibromes (masses non cancéreuses dans la couche musculaire de l’utérus) sont une affection fréquente. Ils peuvent avoir un impact négatif sur la santé d’une femme en provoquant des règles abondantes, des symptômes liés à leur volume (tels qu’une pression exercée sur la vessie ou le rectum) et/ou des difficultés à concevoir.
Une nouvelle classe de médicaments appelés MSRP s’est montrée prometteuse pour le traitement des femmes présentant des fibromes utérins. Cette classe de médicaments comprend diverses molécules telles que la mifépristone, l’acétate d’ulipristal et l’asoprisnil. Les MSRP peuvent provoquer des remaniements bénins au niveau de l’endomètre, qui ne sont pas apparentés à un cancer ni précancéreux.
Date de la recherche
Nous avons effectué des recherches dans la littérature jusqu'à mai 2016.
Caractéristiques de l'étude
Les auteurs de la revue ont inclus 14 essais contrôlés randomisés (ECR) (1215 femmes), mais n’ont pas pu obtenir les données de trois études. De plus, les résultats de plusieurs essais enregistrés terminés n’avaient pas encore été rapportés. Cette revue a évalué les résultats de 11 ECR portant sur 1021 femmes présentant des fibromes utérins. Les investigateurs ont traité ces femmes avec de la mifépristone (cinq études), de l’acétate d’ulipristal (quatre études) ou de l’asoprisnil (deux études) et ont comparé les MSRP avec un placebo ou de l’acétate de leuprolide. Plus de la moitié de ces études présentaient un risque de biais faible dans tous les domaines. La limite la plus courante des autres études était la mauvaise notification des méthodes.
Principaux résultats
Les principaux critères de jugement étudiés étaient l’évolution des symptômes (sévérité des symptômes causés par les fibromes, qualité de vie, saignements menstruels, douleurs pelviennes). Par rapport à un placebo (comprimés « factices » identiques contenant un médicament non actif), les MSRP ont amélioré les symptômes causés par les fibromes (de 20 points en moyenne sur une échelle de 100 points) et la qualité de vie des femmes (de 22 points en moyenne sur une échelle de 100 points) et ont entraîné une légère diminution des métrorragies. Entre 24 % et 96 % des femmes traitées avec un MSRP n’ont pas eu de règles du tout (contre 3 % sous placebo). Les auteurs de la revue n’ont pu tirer aucune conclusion quant aux changements des douleurs pelviennes car celles-ci n’était pas systématiquement évaluées. Deux études comparaient un MSRP à un agoniste de l’hormone de libération des gonadotrophines (leuprolide) et ont révélé que les deux médicaments (MSRP et leuprolide) étaient efficaces pour améliorer les symptômes causés par les fibromes (amélioration de la qualité de vie, réduction des saignements menstruels, arrêt des règles, réduction des douleurs pelviennes). Cependant, nous ne sommes pas certains que les chercheurs aient noté une différence d’efficacité entre les MSRP et le leuprolide.
Les femmes traitées avec un MSRP étaient plus susceptibles de développer des remaniements de la muqueuse de l’utérus (endomètre) que les femmes ayant reçu un placebo ou du leuprolide. Ces changements sont bénins et réversible à l’arrêt du MSRP.
En résumé, les études incluses dans cette revue montrent que les MSRP améliorent les symptômes causés par les fibromes, la qualité de vie et les saignements menstruels. Cependant, nous avons besoin d’études bien conçues, de plus grande taille, comparant les MSRP à d’autres traitements actuellement disponibles pour les fibromes utérins.
Qualité des données probantes
Dans les comparaisons avec un placebo, des données de qualité moyenne ont montré des améliorations de la qualité de vie, la réduction des métrorragies et l’arrêt des règles avec le MSRP. Des données probantes de qualité médiocre ont suggéré un taux plus élevé de remaniements de l’endomètre sous MSRP qu’avec le placebo. Les comparaisons avec le leuprolide étaient basées sur des données de qualité moyenne relatives aux changements de la qualité de vie, à l’arrêt des règles, aux douleurs pelviennes et aux remaniements de l’endomètre. La principale limitation de la qualité globale des données probantes était un biais de publication potentiel.
L’utilisation de courte durée de MSRP a entraîné une amélioration de la qualité de vie, réduit les saignements menstruels et augmenté le taux d’aménorrhée par rapport au placebo. Par conséquent, ils peuvent constituer un traitement efficace pour les femmes présentant des fibromes utérins symptomatiques. Les données probantes issues d’un ECR n’ont montré aucune différence entre l’acétate de leuprolide et les MSRP en ce qui concerne l’amélioration de la qualité de vie et les symptômes hémorragiques. Les données étaient insuffisantes pour démontrer une différence éventuelle d’efficacité entre les MSRP et le leuprolide. Les investigateurs ont observé plus fréquemment des remaniements de l’endomètre associés aux MSRP chez les femmes traitées avec un MSRP que chez celles sous placebo ou traitées avec l’acétate de leuprolide. Comme nous l’avons signalé plus haut, les remaniements de l’endomètre associés aux MSRP sont bénins, non apparentés à un cancer et ne sont pas précancéreux. Le biais de notification peut avoir un impact sur la conclusion de cette méta-analyse. Des ECR bien conçus comparant les MSRP à d’autres traitements sont nécessaires.
Les fibromes utérins sont des tumeurs du muscle lisse qui se forment dans l’utérus. Ces tumeurs, bien que bénignes, sont couramment associées à des saignements utérins anormaux (métrorragies), à des effets de masse et à une dysfonction reproductive. L’importance de la progestérone dans la pathogenèse de fibromes suggère que les modulateurs sélectifs des récepteurs de la progestérone (MSRP) pourraient constituer un traitement efficace. Les données probantes cliniques et biochimiques suggèrent que les MSRP peuvent réduire la croissance des fibromes et améliorer les symptômes. Ils peuvent provoquer des changements histologiques uniques dans l’endomètre, changements qui ne sont pas apparentés à un cancer, ne sont pas précancéreux et se sont avérés bénins et réversibles. Cette revue résume les essais randomisés menés afin d’évaluer l’efficacité du traitement par les MSRP pour le traitement des personnes atteintes de fibromes utérins.
Évaluer l’efficacité et l’innocuité des MSRP pour le traitement des femmes préménopausées présentant des fibromes utérins.
Nous avons effectué des recherches dans le registre spécialisé du Groupe Cochrane sur la gynécologie et la fertilité, le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), MEDLINE, Embase, PsycINFO, l’Index cumulé de la littérature en soins infirmiers et apparentés (CINAHL) et les registres d’essais cliniques, depuis leur création jusqu’à mai 2016. Nous avons effectué une recherche manuelle dans les références bibliographiques des articles pertinents et contacté des experts dans le domaine pour obtenir des données supplémentaires.
Les études incluses étaient des essais contrôlés randomisés (ECR) portant sur des femmes préménopausées présentant des fibromes utérins, traitées pendant au moins trois mois avec un MSRP.
Deux auteurs de la revue ont examiné indépendamment toutes les études éligibles identifiées par la recherche. Nous avons extrait les données, évalué le risque de biais de manière indépendante à l’aide de formulaires standard et analysé les données à l’aide de différences moyennes (DM) ou de différences moyennes standardisées (DMS) pour les données continues et de rapports de cotes (odds ratio, OR) pour les données dichotomiques. Nous avons effectué des méta-analyses en utilisant le modèle à effets aléatoires. Notre critère de jugement principal était le changement des symptômes liés aux fibromes.
Nous avons inclus dans la revue 14 ECR portant sur un total de 1215 participantes. Nous n’avons pas pu extraire les données complètes de trois études. Nous avons inclus dans la méta-analyse 11 études portant sur 1021 participantes : 685 ont reçu un MSRP et 336 une intervention témoin (placebo ou leuprolide). Les investigateurs ont évalué trois MSRP : la mifépristone (cinq études), l’acétate d’ulipristal (quatre études) et l’asoprisnil (deux études). Le critère de jugement principal était le changement de symptômes liés aux fibromes (sévérité des symptômes, qualité de vie liée à la santé, saignements utérins anormaux, douleurs pelviennes). Les événements indésirables rapportés dans les études incluses étaient limités à des remaniements de l’endomètre associés au MSRP. Plus de la moitié (8/14) de ces études présentaient un risque de biais faible dans tous les domaines. La limitation la plus fréquente des autres études était une mauvaise notification des méthodes. La principale limitation de la qualité globale des données probantes était un biais de publication potentiel.
Comparaison entre MSRP et placebo
Le traitement par un MSRP a entraîné des améliorations de la sévérité des symptômes des fibromes (DM -20,04 points, intervalle de confiance (IC) à 95 % de -26,63 à -13,46 ; quatre ECR, 171 femmes, I2 = 0 %; données de qualité moyenne) et la qualité de vie liée à la santé (DM 22,52 points, IC à 95 % de 12,87 à 32,17 ; quatre ECR, 200 femmes, I2 = 63 % ; données de qualité moyenne) sur l’échelle de qualité de vie en relation avec les symptômes du fibrome (UFS-QoL, de 0 à 100). Les femmes traitées avec un MSRP ont montré une réduction de l’abondance des règles sur les échelles de ménorragie, bien que cet effet ait été de petite taille (DMS -1,11, IC à 95 % de -1,38 à -0,83 ; trois ECR, 310 femmes, I2 = 0 % ; données de qualité moyenne), ainsi que des taux plus élevés d’aménorrhée (29 sur 1000 dans le groupe placebo contre 237 à 961 sur 1000 dans le groupe MSRP ; OR 82,50, IC à 95 % de 37,01 à 183,90 ; 7 ECR, 590 femmes, I2 = 0 % ; données de qualité moyenne), par rapport à celles ayant reçu un placebo. Nous n’avons pas pu tirer de conclusions concernant les changements des douleurs pelviennes en raison de la variabilité dans les estimations. En ce qui concerne les effets indésirables, les remaniements de l’endomètre associés aux MSRP étaient plus fréquents après traitement par un MSRP qu’avec un placebo (OR 15,12, IC à 95 % de 6,45 à 35,47 ; 5 ECR, 405 femmes, I2 = 0 % ; données de mauvaise qualité).
Comparaison entre MSRP et acétate de leuprolide
Dans la comparaison des MSRP avec d’autres traitements, deux ECR ont évalué un MSRP par rapport à l’acétate de leuprolide. Un ECR rapportait les critères de jugement principaux. Aucune donnée n’a suggéré une différence entre les groupes leuprolide et MSRP pour l’amélioration de la qualité de vie, mesurée par le score de sévérité des symptômes UFS-QoL (DM -3,70 points, IC à 95 % -9,85 à 2,45 ; un ECR, 281 femmes ; données de qualité moyenne) et les scores de qualité de vie liée à la santé (DM 1,06 points, IC à 95 % de -5,73 à 7,85 ; un ECR, 281 femmes ; données de qualité moyenne). Il était difficile de savoir si les résultats montraient une différence entre les groupes leuprolide et MSRP pour la réduction des pertes de sang menstruelles sur la base de la grille d’évaluation graphique des pertes de sang (PBAC) car les intervalles de confiance étaient larges (DM 6 points, IC à 95 % de -40,95 à 50,95 ; un ECR, 281 femmes ; données de mauvaise qualité), ou pour les taux d'aménorrhée (804 sur 1000 dans le groupe sous placebo contre 732 à 933 sur 1000 dans le groupe MSRP ; OR 1,14, IC à 95 % de 0,60 à 2,16 ; 1 ECR, 280 femmes ; données de qualité moyenne). Aucune donnée n’a révélé de différences entre les groupes pour les scores de douleur pelvienne, notés sur la base du Questionnaire sur la douleur de McGill (échelle de 0 à 45) (DM -0,01 points, IC à 95 % de -2,14 à 2,12 ; 281 femmes ; données de qualité moyenne). En ce qui concerne les effets indésirables, les remaniements de l’endomètre associés aux MSRP étaient plus fréquents après un traitement par un MSRP qu’après un traitement avec du leuprolide (OR 10,45, IC à 95 % de 5,38 à 20,33 ; 301 femmes ; données de qualité moyenne).
Traduction réalisée par Suzanne Assénat et révisée par Cochrane France