Principaux messages
- Les médicaments contre l'asthme comme le mepolizumab, le reslizumab et le benralizumab ont réduit les crises d'asthme chez certaines personnes souffrant d'asthme sévère (celles dont le sang contient un nombre élevé de cellules inflammatoires appelées éosinophiles).
- De légères améliorations ont été constatées dans les scores du questionnaire sur la qualité de vie et les tests respiratoires, mais elles pourraient être trop faibles pour être détectées par les patients.
Problématique de la revue
Nous avons examiné dans cette revue si la prise des médicaments mepolizumab, reslizumab ou benralizumab en plus du traitement standard (tel que les corticostéroïdes inhalés et les inhalateurs combinés) est meilleure qu'un placebo (un médicament factice) chez les personnes souffrant d'asthme.
Contexte
L'asthme est une affection pulmonaire inflammatoire caractérisée par le rétrécissement des voies respiratoires, l'essoufflement, une oppression thoracique et une qualité de vie réduite. Elle touche environ 350 millions de personnes dans le monde. Le mépolizumab, le reslizumab et le benralizumab sont des traitements ciblant l'interleukine-5 (« anti-IL-5 ») qui pourraient contribuer à réduire les symptômes de l'asthme.
Caractéristiques des études
Dix-sept études ont comparé le mepolizumab, le reslizumab ou le benralizumab à un placebo chez environ 7600 personnes souffrant d'asthme, la plupart avec une maladie grave. Nous avons résumé les résultats concernant la survenue de crises d'asthme nécessitant un traitement supplémentaire, la qualité de vie, les tests respiratoires, les effets sur un biomarqueur sanguin (le nombre de cellules inflammatoires appelées éosinophiles) et les effets indésirables.
Principaux résultats
Nous avons constaté que les participants souffrant d'asthme sévère, qui avaient un nombre élevé d'éosinophiles dans le sang, ont bénéficié de la prise de mepolizumab, reslizumab ou benralizumab par une réduction des crises d'asthme. De légères améliorations ont été constatées au niveau de la qualité de vie et des tests respiratoires, mais elles pourraient être trop faibles pour être détectées par les patients. Nous sommes d'accord avec les directives internationales qui stipulent que ces médicaments peuvent être ajoutés au traitement standard des personnes souffrant d'asthme sévère. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour clarifier certains aspects, tels que la manière d'évaluer la réponse au traitement et la durée du traitement.
Qualité des données probantes
Les données probantes incluses dans cette revue sont fournies par des études très bien conçues. Nous sommes convaincus que les participants aux études ont été placés de manière aléatoire dans différents groupes de traitement, que ni eux ni l'équipe d'étude n'étaient au courant du traitement qu'ils recevaient, et que le petit nombre de personnes qui n'ont pas terminé l'étude n'a pas affecté les résultats.
Ce résumé simplifié est à jour au 7 février 2022.
Dans l'ensemble, cette analyse soutient l'utilisation des traitements par anti-IL-5 en tant qu'adjuvant aux soins standard chez les personnes souffrant d'asthme éosinophilique sévère et avec un mauvais contrôle des symptômes. Ces traitements permettent de réduire environ de moitié le taux d'exacerbation de l'asthme dans cette population. Il existe des données probantes limitées suggérant l'amélioration des scores de qualité de vie liée à la santé et de la fonction pulmonaire, qui pourraient ne pas atteindre des niveaux cliniquement détectables. Les études n'ont pas rapporté des préoccupations concernant la tolérance pour le mepolizumab ou le reslizumab, ni des excès d'événements indésirables graves avec le benralizumab, bien qu'il reste une question sur les événements indésirables suffisamment importants pour inciter à l'arrêt du traitement.
Des recherches supplémentaires sont nécessaires sur les biomarqueurs permettant d'évaluer la réponse au traitement, la durée optimale et les effets à long terme du traitement, le risque de rechute lors du sevrage, les patients atteints d'asthme non éosinophilique, les enfants (en particulier les moins de 12 ans), la comparaison des traitements par anti-IL-5 entre eux et, chez les patients répondant aux critères d'éligibilité pertinents, avec d'autres traitements biologiques (anticorps monoclonaux). En ce qui concerne le benralizumab, d’autres études devraient être réalisées afin de surveiller de près les taux d'événements indésirables ayant entraîné l'arrêt du traitement.
Il s'agit de la deuxième mise à jour de revues publiées précédemment dans la Cochrane Library (2015, première mise à jour en 2017). L'interleukine-5 (IL-5) est la principale cytokine impliquée dans la prolifération, la maturation, l'activation et la survie des éosinophiles, ce qui provoque une inflammation des voies respiratoires et constitue une caractéristique classique de l'asthme. Les études sur les anticorps monoclonaux ciblant l'IL-5 ou son récepteur suggèrent qu'ils réduisent les exacerbations de l'asthme, améliorent la qualité de vie liée à la santé (QVLS) et la fonction pulmonaire chez des patients sélectionnés de manière appropriée, ce qui justifie leur inclusion dans les dernières directives.
Comparer les effets des thérapies ciblant la signalisation de l'IL-5 (anti-IL-5 ou sous-unité alpha du récepteur à l'IL-5) avec le placebo sur les exacerbations, les mesures de la qualité de vie liée à la santé (QVLS) et la fonction pulmonaire chez les adultes et les enfants souffrant d'asthme chronique, et spécifiquement chez ceux souffrant d'asthme à éosinophiles réfractaire aux traitements existants.
Nous avons effectué des recherches dans les registres CENTRAL, MEDLINE, Embase et deux registres d'essais, dans les sites Web des fabricants et dans les références bibliographiques des études incluses. La recherche la plus récente a eu lieu le 7 février 2022.
Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés comparant le mepolizumab, le reslizumab et le benralizumab par rapport à un placebo chez les adultes et les enfants ayant de l'asthme.
Deux auteurs de la revue ont indépendamment extrait les données et analysé les critères de jugement en utilisant un modèle à effets aléatoires. Nous avons utilisé les méthodes standard attendues par Cochrane.
Dix-sept études portant sur environ 7600 participants répondaient aux critères d'inclusion. Six ont utilisé le mepolizumab, cinq le reslizumab et six le benralizumab. Une étude utilisant le benralizumab a été interrompue prématurément en raison d'une décision du promoteur et n'a fourni aucune donnée. Les études portaient principalement sur des personnes souffrant d'asthme éosinophilique sévère, défini de manière similaire mais variable. L'une d'entre elles concernait des enfants âgés de 6 à 17 ans ; neuf autres incluaient des enfants de plus de 12 ans mais n'ont pas rapporté les résultats par groupe d'âge séparément. Nous avons estimé que le risque global de biais était faible, toutes les études ayant fourni des données de méthodologie robuste. Nous avons considéré que le niveau de confiance des données probantes pour toutes les comparaisons était globalement élevée en utilisant le schéma GRADE, à l'exception du mépolizumab intraveineux (IV) et du reslizumab sous-cutané (SC), car ces voies d'administration ne sont pas actuellement autorisées.
Les traitements par anti-IL-5 évalués ont réduit les taux d'exacerbations de l'asthme « cliniquement significatives » (définies comme des exacerbations ayant nécessité un traitement à base de corticostéroïdes systémiques pendant trois jours ou plus) d'environ la moitié chez les participants ayant de l'asthme sévère éosinophile recevant des soins standards (au moins une dose modérée de corticoïdes inhalés (CI)) chez qui l'asthme était mal contrôlé (ayant eu soit deux exacerbations ou plus dans l'année précédente ou ayant un score de 1,5 ou plus sur le Questionnaire de contrôle de l'asthme, ACQ), sauf pour le reslizumab SC. Les rapports de taux d’incidence pour ces effets étaient de 0,45 (intervalle de confiance (IC) à 95 % de 0,36 à 0,55 ; données probantes d’un niveau de confiance élevé) pour le mépolizumab SC, de 0,53 (IC à 95 % de 0,44 à 0,64 ; données probantes d’un niveau de confiance modéré) pour le mépolizumab IV, de 0,43 (IC à 95 % de 0,33 à 0,55 ; données probantes d’un niveau de confiance élevé) pour le reslizumab IV et de 0,59 (IC à 95 % de 0,52 à 0,66 ; données probantes d’un niveau de confiance élevé) pour le benralizumab SC. Les participants atteints d'asthme non éosinophilique traités par le benralizumab ont également montré une réduction significative des taux d'exacerbation, un effet non observé avec le reslizumab IV, mais seulement dans une étude. Aucune donnée n'était disponible pour les participants atteints d'asthme non éosinophilique traités par le mépolizumab.
Des améliorations des scores validés de QVLS ont été observées avec tous les agents anti-IL-5 dans l'asthme éosinophilique sévère. La différence minimale cliniquement importante (DMCI) sur le Questionnaire respiratoire du St-George's Hospital (SGRQ ; changement de 4 points) a été atteinte pour le benralizumab seulement, mais l'amélioration de l'ACQ et du questionnaire de la qualité de vie dans l'asthme (AQLQ), qui se concentre sur les symptômes de l'asthme, n'a pas atteint la DMCI (changement de 0,5 point pour l'ACQ et l'AQLQ) pour toutes les interventions. Les données probantes d'une amélioration des scores de la QVLS chez les participants atteints d'asthme non éosinophilique traités par benralizumab et reslizumab étaient faibles, mais les tests de différence de sous-groupe étaient négatifs.
Tous les traitements par anti-IL-5 ont produit de légères améliorations du Volume expiratoire maximal par seconde (VEMS) pré-bronchodilatateur moyen entre 0,08 L et 0,15 L chez les participants atteints d’asthme éosinophilique, ce qui pourrait ne pas être suffisant pour être détecté par les patients.
Il n'y a pas eu un excès d’événements indésirables graves avec l'un des traitements par anti-IL-5 : en effet, on a observé une réduction de ces effets avec le benralizumab, probablement en raison de la diminution du nombre d'hospitalisations liées à l'asthme. Il n'y a pas eu de différence par rapport au placebo en ce qui concerne les événements indésirables ayant conduit à l'arrêt du mepolizumab ou du reslizumab, mais un nombre significativement plus élevé de personnes qui ont arrêté le benralizumab par rapport au placebo, bien que les chiffres absolus soient faibles (42/2026 (2,1%) benralizumab contre 11/1227 (0,9%) placebo).
Les implications pour l'efficacité ou les événements indésirables ne sont pas claires.
Post-édition effectuée par Mamadou Lamarana Diallo et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr