Anticoagulants oraux directs pour la prévention de l'accident vasculaire cérébral chez les patients atteints de maladie rénale chronique et présentant une fibrillation auriculaire.

Quelle est la question ?

Les patients atteints de maladie rénale chronique (MRC) sont à risque accru de fibrillation auriculaire (FA), ce qui peut conduire à un accident vasculaire cérébral (AVC) ou une embolie systémique. Le traitement conventionnel préventif de la FA est une dose ajustée de warfarine, mais cette dernière pouvant augmenter le risque de saignement, elle nécessite une surveillance thérapeutique étroite. Récemment, les anticoagulants oraux directs (AOD) ont été développés comme une alternative à la warfarine. Nous avons examiné les preuves des AOD par rapport à la warfarine pour la prévention des AVC et des événements emboliques systémiques chez les patients atteints de MRC et présentant une FA.

Qu'avons-nous fait ?

Nous avons trouvé cinq études comparant les effets d'AOD (apixaban, dabigatran, edoxaban, et rivaroxaban) et de la warfarine à une dose ajustée. Les 12 545 participants dans ces cinq études présentaient une FA non valvulaire et une insuffisance rénale modérée. Ces études présentaient des données concernant le critère de jugement composite de l'ensemble des AVC et des événements emboliques systémiques (critère de jugement principal d'efficacité), et concernant les événements hémorragiques majeurs (critère de jugement principal d'innocuité). La durée médiane du suivi variait de 1,8 à 2,8 ans. Les preuves sont à jour en août 2017.

Qu'avons-nous trouvé ?

Comparativement à la warfarine, les AOD réduisent probablement l'incidence des AVC et des événements emboliques systémiques, le critère de jugement principal d'efficacité. En outre, par rapport à la warfarine, les AOD pourraient légèrement réduire l'incidence des événements hémorragiques majeurs, le critère de jugement principal d'innocuité.

Conclusions

Cette revue démontre que les AOD semblent aussi efficaces que la warfarine pour prévenir les AVC et les événements emboliques systémiques sans augmenter les évènements hémorragiques majeurs chez les patients atteints de MRC et présentant une FA. Selon le système GRADE, la qualité des preuves était modérée pour le critère de jugement principal d'efficacité en raison d'un manque de précision, et faible pour le critère de jugement principal d'innocuité en raison d'un manque de précision et de cohérence. Les résultats de cette étude s'appliquent principalement aux patients atteints de MRC au stade 3, compte tenu du fait que nous n'avons pas pu évaluer les patients atteints de MRC aux stades 4 ou 5.

Conclusions des auteurs: 

Nos résultats indiquent que les AOD semblent aussi efficaces que la warfarine pour prévenir les AVC et les événements emboliques systémiques sans augmenter le risque d'événements hémorragiques majeurs chez les patients atteints de FA et présentant une insuffisance rénale. Ces résultats devraient encourager les médecins à prescrire des AOD aux patients atteints de MRC et présentant une FA sans avoir la crainte d'hémorragies. La principale limite est que les résultats de cette étude concernent principalement la MRC au stade 3. L'application de ces résultats aux patients atteints de MRC au stade 4 nécessite des recherches supplémentaires. En outre, nous n'avons pas pu évaluer les patients atteints de MRC au stade 5. À l'avenir, les futures revues devraient évaluer les participants atteints de MRC à des stades plus avancés. De plus, nous n'avons pas pu effectuer d'analyses détaillées de sous-groupes ni d'analyses de sensibilité en raison d'un manque de données.

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Contexte: 

La maladie rénale chronique (MRC) est un facteur de risque indépendant de fibrillation auriculaire (FA), qui est plus fréquente chez les patients atteints de MRC que dans la population générale. La FA provoque des AVC ou des embolies systémiques, responsables d'une mortalité accrue. La prophylaxie conventionnelle anti-thrombotique par warfarine est souvent prescrite pour la prévention des AVC, mais le risque de saignement nécessite une surveillance thérapeutique étroite. Les anticoagulants oraux directs (AOD) qui ont récemment été développés pourraient être des alternatives intéressantes à la warfarine.

Objectifs: 

Évaluer l'efficacité et l'innocuité des AOD, notamment l'apixaban, le dabigatran, l'edoxaban, et le rivaroxaban par rapport à la warfarine chez les patients atteints de MRC et présentant une FA.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans le registre Cochrane spécialisé sur le rein et les greffes (jusqu'au 1er août 2017) par l'intermédiaire du spécialiste de l'information en utilisant les termes de recherche pertinents pour cette revue. Les études du registre spécialisé ont été identifiées par des recherches dans CENTRAL, MEDLINE et EMBASE, les actes de conférence, le portail de recherche du système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP), et ClinicalTrials.gov.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus tous les essais contrôlés randomisés (ECR) qui comparaient directement l'efficacité et l'innocuité des anticoagulants oraux directs (inhibiteurs directs de la thrombine ou inhibiteurs du facteur Xa) à une dose ajustée de warfarine pour prévenir les AVC et les événements emboliques systémiques chez des patients présentant une FA non valvulaire et atteints de MRC, définie comme une clairance de la créatinine (ClCr) ou un débit de filtration glomérulaire estimé (DFGe) compris entre 15 et 60 mL/min (MRC aux stades 3 et 4).

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont sélectionné les études de façon indépendante, évalué la qualité et extrait les données. Nous avons calculé le risque relatif (RR) et les intervalles de confiance à 95 % (IC à 95 %) pour l'association entre un traitement anticoagulant et l'ensemble des AVC et événements emboliques systémiques comme critère de jugement principal d'efficacité, et les événements hémorragiques majeurs comme critère de jugement principal d'innocuité. Le degré de confiance à l'égard des preuves a été évalué en utilisant le système GRADE.

Résultats principaux: 

Notre revue a inclus 12 545 participants atteints de MRC et présentant une FA provenant de cinq études. Tous les participants étaient randomisés pour recevoir un AOD (apixaban, dabigatran, edoxaban, rivaroxaban) ou une dose ajustée de warfarine. Quatre études utilisaient un système automatique centralisé pour l'assignation secrète, tandis qu'une étude ne rapportait pas de méthode d'assignation secrète. Quatre études étaient réalisées en aveugle, tandis qu'une était partiellement en ouvert. Toutefois, compte tenu du fait que l'évaluation des critères de jugement était réalisée en aveugle dans toutes les études, nous avons considéré que le risque de biais était faible. Nous n'avons pas été en mesure de créer des graphiques en entonnoir en raison du petit nombre d'études, limitant ainsi l'évaluation du biais de publication. La durée des études variait de 1,8 à 2,8 ans. La grande majorité des participants inclus dans cette étude étaient atteints de MRC au stade 3 (12 155), et un petit nombre de participants étaient atteints de MRC au stade 4 (390). Parmi les 12 545 participants des cinq études, un total de 321 évènements (2,56 %) du critère de jugement principal d'efficacité sont survenus par an. En outre, parmi les 12 521 participants des cinq études, un total de 617 évènements (4,93 %) du critère de jugement principal d'innocuité sont survenus par an. Les AOD réduisent probablement l'incidence des AVC et des événements emboliques systémiques (5 études, 12 545 participants : RR 0,81, IC à 95 % 0,65 à 1,00 ; preuves de certitude modérée) et semblent légèrement réduire l'incidence des événements hémorragiques majeurs (5 études, 12 521 participants : RR 0,79, IC à 95 % 0,59 à 1,04 ; preuves de faible certitude) comparativement à la warfarine.

Notes de traduction: 

Traduction réalisée par Sophie Fleurdépine et révisée par Cochrane France

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.