Problématique de la revue
Est-ce que le fait de donner aux prématurés du lait de vache contenant des protéines prédigérées (hydrolysées) plutôt que des protéines entières améliore la digestion et réduit le risque de problèmes intestinaux graves ?
Contexte
Les prématurés trouvent souvent que le lait de vache en poudre est plus difficile à digérer que le lait humain, et le lait de vache en poudre peut augmenter le risque de graves problèmes intestinaux chez les prématurés (nés avant leur date de naissance). Si les prématurés sont nourris au lait de vache (lorsque le lait humain n'est pas disponible), l'utilisation d'une préparation dans laquelle la protéine est déjà partiellement digérée (appelée " hydrolysée ") plutôt qu'une préparation standard (avec des protéines intactes) pourrait réduire le risque de ces problèmes. Cependant, les formules hydrolysées sont plus chères que les formules standard et peuvent avoir des effets secondaires spécifiques non observés avec les formules standard. Compte tenu de ces préoccupations, nous avons examiné toutes les données probantes disponibles provenant d'essais cliniques qui comparaient ces types de préparations pour nourrissons prématurés.
Caractéristiques des études
En consultant les bases de données médicales jusqu'au 28 janvier 2019, nous avons trouvé 11 essais pertinents ; la plupart étaient petits (665 nourrissons au total) et présentaient des faiblesses méthodologiques.
Principaux résultats
Les données actuellement disponibles suggèrent que l'alimentation des prématurés à l'aide de préparations hydrolysées (plutôt que de préparations standard) au moment de leur admission initiale à l'hôpital n'a aucun avantage ou inconvénient important. Toutefois, cette constatation n'est pas encore concluante, et des essais de plus grande envergure et de meilleure qualité sont nécessaires pour fournir des données probantes afin d'aider les cliniciens et les familles à faire des choix éclairés sur cette question.
Qualité des données probantes
Les données de ces essais ne fournissent aucune preuve solide ou cohérente que l'administration de préparations hydrolysées aux prématurés plutôt que de préparations standard améliore ou aggrave la digestion ou modifie le risque de troubles intestinaux graves.
Les essais identifiés ne fournissent que des preuves de faible certitude au sujet des effets de l'utilisation d'hydrolysats de protéines dans l'alimentation des prématurés par rapport aux préparations pour nourrissons standard. Les données existantes ne permettent pas de conclure que l'utilisation d'hydrolysats de protéines dans l'alimentation des prématurés affecte le risque d'intolérance alimentaire ou d'entérocolite nécrosante. D'autres essais pragmatiques de grande envergure sont nécessaires pour fournir des estimations plus fiables et plus précises de l'efficacité et du rapport coût-efficacité.
Lorsque le lait humain n'est pas disponible pour l'alimentation des prématurés, l'hydrolysat de protéines, plutôt que les préparations standard à base de lait de vache (avec protéines intactes), est souvent utilisé car il est perçu comme étant mieux toléré et moins susceptible d'entraîner des complications. Toutefois, les formules à base d'hydrolysats de protéines sont plus coûteuses que les formules standard, et l'on craint que leur utilisation dans la pratique ne soit pas étayée par des données probantes de grande qualité.
Évaluer les effets de l'alimentation des prématurés à l'aide de préparations hydrolysées (par rapport aux préparations à base de lait de vache ordinaires) sur le risque d'intolérance alimentaire, d'entérocolite nécrosante et d'autres maladies et décès.
Nous avons utilisé la stratégie de recherche standard de Cochrane pour les études néonatale, y compris les recherches électroniques dans le Registre central des essais contrôlés Cochrane (CENTRAL ; 2019, numéro 1), dans la Bibliothèque Cochrane ; Ovid MEDLINE (1966 au 28 janvier 2019) ; Ovid Embase (1980 au 28 janvier 2019) ; et le Cumulative Index to Nursing and Allied Health Literature (CINAHL) (28 janvier 2019) ainsi que dans les comptes rendus des conférences et des études précédentes.
Essais comparatifs randomisés et quasi-randomisés comparant l'hydrolysat de protéines des prématurés à la préparation standard (non hydrolysée) de lait de vache.
Deux auteurs de la revue ont évalué l'admissibilité à l'essai et le risque de biais et ont extrait les données de façon indépendante. Nous avons analysé les effets du traitement tels que décrits dans les essais individuels et rapporté les ratios de risque et les différences de risque pour les données dichotomiques, et les différences moyennes pour les données continues, avec des intervalles de confiance (IC) respectifs de 95 %. Nous avons utilisé un modèle à effets fixes dans les méta-analyses et exploré les causes potentielles de l'hétérogénéité dans les analyses de sensibilité. Nous avons évalué la qualité des éléments probants au niveau des résultats au moyen de l'approche GRADE.
Nous avons identifié 11 essais à inclure dans la revue. Tous les essais étaient de petite envergure (665 participants au total) et présentaient diverses limites méthodologiques, y compris l'incertitude quant aux méthodes visant à assurer l’aveugle et le masque de l’allocation. La plupart des participants étaient des prématurés cliniquement stables dont l'âge gestationnel était inférieur à 34 semaines environ ou dont le poids à la naissance était inférieur à 1750 g environ. Moins de participants étaient extrêmement prématurés, avaient un poids extrêmement faible à la naissance ou avaient une croissance restreinte. La plupart des essais n'ont révélé aucun effet sur l'intolérance alimentaire, évaluée de diverses façons comme le volume résiduel gastrique moyen avant l'alimentation, l'incidence de distension abdominale ou d'autres signes gastro-intestinaux préoccupants, ou le temps pris pour obtenir des aliments complets entériques (la méta-analyse était limitée car les études utilisaient différentes mesures). La méta-analyse n'a montré aucun effet sur le risque d'entérocolite nécrosante (rapport de risque typique de 1,10, IC à 95 % : 0,36 à 3,34 ; différence de risque de 0,00, IC à 95 % : -0,03 à 0,04 ; 5 essais, 385 nourrissons) (données peu certaines ; déclassé pour imprécision et faiblesse du design de l’étude).
Post-édition effectuée par Jessica King et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d’origine? Merci d’adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr