Qu'est-ce que le glaucome à angle ouvert ?
Le glaucome est une affection oculaire courante causée par l'accumulation de liquide dans la partie antérieure de l'œil, ce qui augmente la pression à l'intérieur de l'œil. La pression accrue endommage le nerf reliant l'œil au cerveau (nerf optique), ce qui entraîne une perte de la vue. Le glaucome peut entraîner une perte permanente de la vue (cécité) s'il n'est pas diagnostiqué et traité à temps.
Le glaucome à angle ouvert est le type de glaucome le plus courant et tend à se développer lentement sur plusieurs années. Elle est due à l'obstruction progressive des canaux de drainage de l'œil au fil du temps.
Traitements du glaucome
Le traitement ne peut pas inverser la perte de la vue qui s'est produite avant le diagnostic du glaucome, mais il peut ralentir ou arrêter la perte de la vue. Tous les traitements du glaucome visent à réduire la pression dans l'œil. Ils incluent :
- des médicaments, administrés sous forme de gouttes pour les yeux ;
- un traitement au laser pour réduire la production de liquide et ouvrir les canaux de drainage obstrués ; ou
- une intervention chirurgicale pour drainer le liquide de l'œil.
L'un des traitements consiste à placer un minuscule tube (appelé shunt) sous la surface de l'œil afin de créer un canal de drainage pour l'excès de liquide. Les shunts peuvent souvent être placés lors d'une intervention chirurgicale pour traiter la cataracte : des taches troubles qui se développent sur le cristallin à l'intérieur de l'œil et rendent la vue brumeuse et floue.
Pourquoi nous avons réalisé cette revue Cochrane
La pose d'un shunt pourrait faire baisser la pression à l'intérieur de l'œil et réduire la nécessité de recourir à des gouttes ophtalmiques ou à d'autres types d'interventions chirurgicales qui peuvent présenter des risques plus importants. Nous voulions savoir si la pose d'un shunt lors d'une opération de la cataracte pouvait faire baisser la pression à l'intérieur de l'œil chez les personnes souffrant de glaucome à angle ouvert.
Nous étions aussi intéressés par l'effet du shunt concernant :
- la nécessité de prendre des médicaments pour réduire la pression dans l'œil ; et
- le bien-être des personnes.
Comment avons-nous procédé ?
Nous avons recherché des études ayant testé l'effet de la pose d'un shunt lors d'une chirurgie de la cataracte chez des personnes souffrant de glaucome à angle ouvert. Nous avons recherché des études contrôlées randomisées, dans lesquelles les personnes recevant un shunt et celles n'en recevant pas étaient décidées par hasard. Ce type d'essais fournit généralement les données probantes les plus fiables concernant les effets d’un traitement.
Date de recherche : nous avons inclus les données probantes publiées jusqu'en août 2020.
Ce que nous avons trouvé
Nous avons trouvé une étude qui s'est déroulée aux États-Unis et qui portait sur 505 personnes (âgées de 45 ans et plus) souffrant d'un glaucome à angle ouvert et d'une cataracte.
L'étude a divisé les patients en deux groupes. Dans un groupe, on a placé un shunt lors d'une intervention chirurgicale pour traiter la cataracte ; dans l'autre groupe, on a opéré uniquement pour traiter la cataracte. Les patients de l'étude ont été évalués pendant deux ans.
L'étude a été financée par une société qui fabrique des shunts utilisés dans le traitement du glaucome.
Quels sont les principaux résultats de notre revue ?
Deux ans après l'opération de la cataracte, chez les personnes auxquelles on a également posé un shunt :
- un plus grand nombre d'entre eux (85 % dans ce groupe contre 59 % dans l'autre) n'avaient pas besoin de médicaments en gouttes pour traiter le glaucome (données probantes provenant de 448 personnes) ;
- la réduction de la pression à l'intérieur de l'œil affecté était plus importante que chez les personnes n'ayant pas reçu de shunt (448 personnes) ;
- elles ont eu une réduction plus importante, en moyenne, de l'utilisation de médicaments à type de gouttes ophtalmiques, que les personnes n'ayant pas reçu de shunt (448 personnes) ; et
- moins de personnes ont dû subir une nouvelle intervention chirurgicale pour traiter un glaucome (505 personnes).
Toutefois, la pose du shunt a entraîné un nombre plus élevé d'effets indésirables (complications) rapportés dans les deux ans suivant l'opération, par rapport à la chirurgie de la cataracte seule (données probantes provenant de 505 personnes). En moyenne, sur 1000 personnes, 390 personnes ayant reçu le micro-stent auraient des complications, contre 360 personnes n'ayant pas reçu le micro-stent. Il existe des inquiétudes quant à la sécurité du shunt utilisé dans cette étude, car il pourrait causer des dommages durables à la couche transparente située à l'avant de l'œil (cornée).
L'étude n'a pas mesuré le bien-être des personnes (qualité de vie) ni la manière dont la vue a été affectée sur les deux années suivant l'opération.
Notre confiance dans ces résultats
Nous sommes confiants quant aux réductions de la pression à l'intérieur de l'œil et aux complications après l'opération. Nous ne nous attendons pas à ce que des données probantes supplémentaires modifient ces résultats.
Nous sommes modérément confiants quant à la réduction de la nécessité de recourir à des médicaments sous forme de gouttes pour abaisser la pression à l'intérieur de l'œil. Bien que les patients de l'étude n'aient pas su dans quel groupe de traitement ils se trouvaient, les personnes administrant les traitements le savaient, ce qui a pu influencer les résultats. Ces résultats pourraient changer si de nouvelles données probantes sont disponibles.
Nous sommes moins sûrs du nombre de personnes ayant dû subir une nouvelle intervention chirurgicale pour traiter le glaucome ; des données probantes supplémentaires sont susceptibles de modifier ces résultats.
Principaux messages
La pose d'un shunt dans l'œil au cours d'une opération de la cataracte permet d'abaisser la pression à l'intérieur de l'œil chez les personnes souffrant de glaucome à angle ouvert, et de réduire leur besoin en médicaments réduisant la pression intraoculaire, davantage que la chirurgie de la cataracte seule. Mais la pose du shunt a été liée à une augmentation des complications après l'opération.
Les données issues cet unique ECR montrent la supériorité de la chirurgie par shunt supraciliaire lorsqu'elle est associée à la phacoémulsification par rapport à la phacoémulsification seule pour obtenir un contrôle sans médicaments du glaucome à angle ouvert. Cependant, le dispositif utilisé dans cet essai pose des problèmes de sécurité à long terme, liés à la perte significative de cellules endothéliales cornéennes observée cinq ans après l'implantation du dispositif. Au moment de cette revue, ce dispositif a été retiré du marché.
Cette revue a révélé qu'il existe peu d'études de haute qualité comparant la chirurgie par shunt supraciliaire aux traitements médicaux, laser ou chirurgicaux standard du glaucome. Cette question devrait être abordée par d'autres ECR conçus de manière appropriée et comportant un suivi à long terme suffisant pour garantir l'obtention de données solides sur la sécurité. Les critères de jugement de qualité de vie liée à la santé devrait également être prise en compte dans la conception des essais.
Le glaucome est la principale cause de cécité irréversible dans le monde, souvent associée à une pression intraoculaire (PIO) élevée. Lorsque le traitement médical ou au laser a échoué ou n'est pas toléré, une intervention chirurgicale est souvent nécessaire. Des approches chirurgicales mini-invasives ont été développées ces dernières années pour réduire la PIO avec des risques chirurgicaux moindres. La chirurgie par shunt supraciliaire dans le traitement du glaucome à angle ouvert (GAO) est une de ces approches.
Évaluer l'efficacité et la sécurité de la chirurgie par shunt supraciliaire pour le traitement du GAO, et la comparer aux traitements médicaux, laser ou chirurgicaux standard.
Nous avons effectué des recherches dans le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL ; qui contient le registre des essais du groupe Cochrane sur l’ophtalmologie ; 2020, Issue 8) ; Ovid MEDLINE ; Ovid Embase ; le registre ISRCTN ; ClinicalTrials.gov et l'ICTRP de l'OMS. La date de la recherche était le 27 août 2020.
Nous avons recherché des essais contrôlés randomisés (ECR) portant sur la chirurgie par shunt supraciliaire, seule ou en association avec une chirurgie de la cataracte, comparée à d'autres traitements chirurgicaux (chirurgie de la cataracte seule, autres techniques mini-invasives de traitement du glaucome, trabéculectomie), à un traitement au laser ou à un traitement médical.
Deux auteurs ont indépendamment examiné les titres et les résumés de la recherche dans la base de données afin d'identifier les études répondant aux critères de sélection. L'extraction des données, l'analyse et l'évaluation du risque de biais des études sélectionnées ont été effectuées de manière indépendante et selon la méthodologie standard de Cochrane.
Une étude a répondu aux critères d'inclusion de cette revue, évaluant l'efficacité et la sécurité de la chirurgie par shunt supraciliaire Cypass dans le traitement du GAO, comparant la phacoémulsification combinée avec la chirurgie par shunt supraciliaire à la phacoémulsification seule sur 24 mois. Cette étude comprenait 505 yeux de 505 participants souffrant à la fois de GAO et de cataracte, dont 374 ont été randomisés dans le groupe phacoémulsification combinée avec la chirurgie par shunt.
Dans cette étude, le risque perçu de biais lié à la génération de séquences aléatoires, à la dissimulation de l'allocation et aux rapports sélectifs était faible. Cependant, nous avons considéré que l'étude présentait un risque élevé de biais de performance car les chirurgiens/investigateurs n'étaient pas mis en aveugle. Le biais d'attrition n'était pas clair, 448/505 participants ayant contribué à l'analyse per protocole.
L'insertion d'un shunt supraciliaire Cypass combinée avec une phacoémulsification augmente probablement la proportion de participants n’utilisant pas de médicaments (pas de gouttes ophtalmiques) à 24 mois par rapport à la phacoémulsification seule (85 % contre 59 %, risque relatif (RR) 1,27, intervalle de confiance (IC) à 95 % 1,09 à 1,49, données probantes d’un niveau de confiance modéré).
Il existe des données probantes d’un niveau de confiance élevé indiquant qu'une plus grande amélioration de la PIO moyenne se produit dans le groupe phacoémulsification combinée avec le shunt :changement moyen (écart-type) de la PIO par rapport à la ligne de base de -5,4 (3,9) mmHg dans le groupe phacoémulsification, comparé à -7,4 (4,4) mmHg dans le groupe phacoémulsification combinée avec le shunt à 24 mois (différence moyenne de -2,0 mmHg, IC à 95 % -2,85 à -1,15).
Il existe des données probantes d’un niveau de confiance modéré indiquant que l'insertion d'un shunt est probablement associée à une plus grande réduction de l'utilisation de gouttes pour abaisser la PIO (réduction moyenne de 0,7 médicaments dans le groupe phacoémulsification, par rapport à une réduction moyenne de 1,2 médicaments dans le groupe phacoémulsification combinée avec le shunt).
L'insertion d'un shunt pendant la phacoémulsification pourrait réduire la nécessité d'une intervention supplémentaire pour contrôler la PIO à un stade ultérieur du glaucome par rapport à la phacoémulsification seule (RR 0,26, IC à 95 % 0,07 à 1,04, données probantes d’un niveau de confiance faible).
Il n'existe pas de données probantes concernant le taux de progression du champ visuel ou la proportion de participants dont la perte de champ visuel a progressé dans cette étude.
Il existe des données probantes d’un niveau de confiance modéré montrant peu ou pas de différence dans la proportion de participants présentant des complications postopératoires sur 24 mois entre les participants du groupe shunt et ceux ayant bénéficié de la phacoémulsification seule (RR 1,1, IC à 95 % 0,8 à 1,4).
Les données post-approbation de cinq ans concernant la sécurité du shunt supraciliaire Cypass ont montré une perte accrue de cellules endothéliales, associée à la position du shunt dans la chambre antérieure.
Il n’y avait pas de données rapportés sur les critères de jugement de la qualité de vie liée à la santé (QDVLALS) dans l'étude incluse.
Post-édition effectuée par Carole Lescure et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr