Traitement dans la prévention d’un premier épisode hémorragique du à la dilatation des veines de l'œsophage résultant d'une cicatrisation avancée du foie

Quel était le but de cette revue Cochrane ?

Notre objectif était de trouver le meilleur traitement disponible pour la prévention des premières hémorragies dues à des varices œsophagiennes (veines dilatées dans le tube digestif (œsophage)) chez les personnes présentant une cicatrisation avancée du foie (cirrhose du foie ou cicatrisation tardive du foie avec complications). Les personnes atteintes de cirrhose et de varices œsophagiennes présentent un risque important d'hémorragie et de décès. Le traitement est donc important, mais les bénéfices et les risques des différents traitements disponibles ne sont pas encore clairs. Les auteurs de la revue ont rassemblé et analysé 66 essais cliniques randomisés (études cliniques dans lesquelles des personnes sont placées au hasard dans l'un des groupes de traitement) dans le but de déterminer quel est le meilleur traitement. Lors de l'analyse des données, nous avons utilisé les méthodes standard de Cochrane, qui permettent de comparer seulement deux traitements à la fois. Nous avons également utilisé des techniques avancées qui permettent de comparer plusieurs traitements en même temps (on parle de « méta-analyse en réseau (ou indirecte) »).

Date de la recherche documentaire

Décembre 2019

Principaux messages

Nous avons constaté qu'un seul des essais a été mené sans défauts, ce qui explique l'incertitude élevée à très élevée des résultats. Environ un participant sur cinq à l'essai, atteint de cirrhose et de varices œsophagiennes, qui n'avait jamais eu de saignement auparavant et qui avait reçu le traitement standard de bêta-bloquants, est décédé dans les cinq ans suivant le traitement.

La source de financement de la recherche n'était pas claire dans 50 essais ; des organisations commerciales ont financé cinq essais. Il n'y a pas eu de préoccupations concernant la source de financement des 11 essais restants.

Qu'étudie cette revue ?

Cette revue a porté sur des adultes de tout sexe, âge et origine ethnique ayant une maladie hépatique avancée due à diverses causes et des varices œsophagiennes, mais n'ayant jamais eu de saignement des varices œsophagiennes. Les participants ont reçu différents traitements pour prévenir un premier épisode de saignement des varices œsophagiennes. Les auteurs ont exclu les études portant sur les personnes ayant déjà eu des saignements dus à des varices œsophagiennes et celles ayant subi une transplantation du foie ou ayant déjà reçu un traitement pour des varices œsophagiennes auparavant. L'âge moyen des participants, lorsqu'il a été communiqué, variait de 40 à 63 ans. Les traitements comprenaient des « bêta-bloquants non sélectifs » ou simplement des « bêta-bloquants » (médicaments qui ralentissent le cœur et diminuent la force de pompage du cœur, ce qui entraîne une diminution de la pression dans les vaisseaux sanguins ; ils augmentent également la pression dans les vaisseaux sanguins intestinaux, ce qui réduit la quantité de sang atteignant les veines œsophagiennes), la sclérothérapie endoscopique (injection d'agents coagulants dans les veines dilatées à l'aide d'un tube inséré dans la bouche), la ligature élastique des varices (insertion de bandes élastiques autour des veines dilatées à l'aide d'un tube inséré dans la bouche) et les dérivés nitrés (médicaments qui réduisent la pression dans les vaisseaux sanguins intestinaux en les dilatant). Les auteurs de la revue souhaitaient recueillir et analyser des données sur les décès (pourcentage de personnes décédées lors du suivi maximal), la qualité de vie, les effets secondaires graves et non graves, le pourcentage de personnes ayant présenté des hémorragies et le développement d'autres complications de la maladie hépatique avancée.

Quels ont été les principaux résultats de la revue ?

Les 66 études comprenaient un nombre relativement faible de participants (6653 personnes). Soixante études avec 6212 participants ont fourni des données pour les analyses. Le suivi de l'essai allait de six mois à cinq ans dans les études qui ont rapporté les critères de jugement qui nous intéressaient. La revue a révélé ce qui suit :
- Environ une personne sur cinq souffrant de cirrhose et de varices œsophagiennes (sans hémorragie antérieure) et ayant reçu les bêta-bloquants est décédée dans les cinq ans.
- Les bêta-bloquants, la ligature de varices, la sclérothérapie et les bêta-bloquants associés à des dérivés nitrés pourraient tous entraîner moins de décès que l'absence de traitement.
- La ligature élastique pourrait entraîner un plus grand nombre d'effets secondaires graves que les bêtabloquants.
- La sclérothérapie, les bêta-bloquants associés à des dérivés nitrés et les bêta-bloquants associés à la ligature de varices pourraient entraîner plus d'effets secondaires (lorsque les effets indésirables graves et non graves sont réunis) que les bêta-bloquants.
- Les bêta-bloquants et la ligature élastique pourraient entraîner moins de saignements que les bêta-bloquants seuls, d'après un seul petit essai.
- Les dérivés nitrés seuls pourraient entraîner un plus grand nombre de saignements que les bêta-bloquants seuls.
- Les données probantes indiquent une incertitude considérable quant à l'effet des interventions dans les autres comparaisons.
- les essais n’ont pas rapporté la qualité de vie liée à la santé.

Quelles sont nos conclusions ?

Les bêta-bloquants, la ligature élastique, la sclérothérapie et les bêta-bloquants associés à des dérivés nitrés pourraient diminuer le taux de mortalité par rapport à l'absence de traitement chez les personnes atteintes de cirrhose présentant des varices œsophagiennes à haut risque et n'ayant pas d'antécédents de saignement. La ligature élastique pourrait entraîner un nombre plus élevé d'effets secondaires graves que les bêtabloquants. Les données probantes indiquent une incertitude considérable quant à l'effet des bêta-bloquants par rapport à la ligature élastique sur les saignements variqueux. Les données probantes indiquent également une incertitude considérable quant à l'effet des interventions dans la plupart des comparaisons restantes. De futurs essais bien conçus sont nécessaires pour établir le meilleur traitement pour prévenir un premier saignement chez les personnes atteintes de cirrhose et de varices œsophagiennes.

Conclusions des auteurs: 

Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, les bêta-bloquants, la ligature élastique, la sclérothérapie et les bêta-bloquants associés à des dérivés nitrés pourraient diminuer la mortalité par rapport à l'absence d'intervention chez les personnes présentant des varices œsophagiennes à haut risque chez les personnes atteintes de cirrhose et sans antécédents d'hémorragie. Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, la ligature élastique pourrait entraîner un nombre plus élevé d'événements indésirables graves que les bêta-bloquants. Les données probantes indiquent une incertitude considérable quant à l'effet des bêta-bloquants par rapport à la ligature élastique sur les saignements variqueux. Les données probantes indiquent également une incertitude considérable quant à l'effet des interventions dans la plupart des comparaisons restantes.

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Contexte: 

Environ 40 à 95 % des personnes atteintes de cirrhose ont des varices œsophagiennes. Environ 15 à 20 % des varices œsophagiennes saignent en un à trois ans. Il existe plusieurs traitements pour prévenir les saignements, notamment : les bêta-bloquants, la sclérothérapie endoscopique et la ligature par élastiques de la varice. Cependant, il existe une incertitude quant à leurs bénéfices et risques individuels et relatifs.

Objectifs: 

Comparer les bénéfices et les risques des différents traitements pour la prévention du premier épisode d’hémorragie variqueuse due aux varices œsophagiennes chez les adultes atteints de cirrhose du foie par le biais d'une méta-analyse en réseau et établir un classement des différents traitements pour la prévention du premier épisode d’hémorragie variqueuse due aux varices œsophagiennes en fonction de leur tolérance et de leur efficacité.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL, Medline, Embase, Science Citation Index Expanded, le Système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) de l'OMS et les registres d'essais jusqu'en décembre 2019 pour identifier les essais cliniques randomisés chez les personnes atteintes de cirrhose et de varices œsophagiennes sans antécédents de saignement.

Critères de sélection: 

Nous n'avons inclus que des essais cliniques randomisés (indépendamment de la langue, de la mise en aveugle ou du statut) chez des adultes atteints de cirrhose et de varices œsophagiennes sans antécédent d'hémorragie. Nous avons exclu les essais cliniques randomisés dans lesquels les participants avaient déjà eu des hémorragies dues à des varices œsophagiennes et ceux qui avaient déjà subi une transplantation hépatique ou reçu un traitement prophylactique pour des varices œsophagiennes.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons réalisé une méta-analyse en réseau avec OpenBUGS en utilisant des méthodes bayésiennes et avons calculé les différences de traitement en utilisant des rapport des risques instantanés (hazard ratio, HR), des rapport des cotes (RC) et des rapports de taux avec des intervalles de crédibilité (ICr) à 95 % basés sur une analyse des cas disponibles, selon les recommandations du National Institute of Health and Care Excellence Decision Support Unit. Nous avons effectué les comparaisons directes à partir d'essais cliniques randomisés en utilisant les mêmes codes et les mêmes détails techniques.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 66 essais cliniques randomisés (6653 participants) dans la revue. Soixante essais (6212 participants) ont fourni des données pour une ou plusieurs comparaisons dans la revue. Les essais qui ont fourni ces informations concernaient des personnes atteintes de cirrhose due à des étiologies variées et des personnes présentant un risque élevé de saignement dû à des varices œsophagiennes. Le suivi dans les essais qui ont rapporté des critères de jugement varie de 6 mois à 60 mois. Tous les essais sauf un présentaient un risque de biais élevé. Les interventions comparées comprenaient les bêta-bloquants, l’absence d’intervention active, la ligature élastique d’une varice, la sclérothérapie, les bêta-bloquants associés à la ligature élastique, les bêta-bloquants associés à des dérivés nitrés, les dérivés nitrés, les bêta-bloquants associés à la sclérothérapie et la dérivation portocave.

Dans l'ensemble, 21,2 % des participants ayant reçu des bêta-bloquants non sélectifs (« bêta-bloquants ») - le traitement de référence (choisi car il s'agissait du traitement le plus couramment comparé dans les essais) - sont décédés en 8 mois à 60 mois au cours du suivi.

Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, les bêta-bloquants, la ligature élastique, la sclérothérapie et les bêta-bloquants combinés avec des dérivés nitrés sont tous associés à une mortalité plus faible par rapport à l'absence d'intervention active (bêta-bloquants : HR 0,49, ICr à 95 % 0,36 à 0,67 ; comparaison directe HR : 0.59, ICr à 95 % 0,42 à 0,83 ; 10 essais, 1200 participants ; ligature élastique : HR 0,51, ICr à 95 % 0,35 à 0,74 ; comparaison directe HR 0,49, ICr à 95 % 0,12 à 2,14 ; 3 essais, 355 participants ; sclérothérapie : HR 0,66, ICr à 95 % 0,51 à 0,85 ; comparaison directe HR 0,61, ICr à 95 % 0,41 à 0,90 ; 18 essais, 1666 participants ; bêta-bloquants associés à des dérivés nitrés : HR 0,41, ICr à 95 % 0,20 à 0,85 ; pas de comparaison directe). Les essais n’ont pas rapporté la qualité de vie liée à la santé. Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, la ligature élastique a eu un nombre plus élevé d'événements indésirables graves (nombre d'événements) que les bêta-bloquants (rapport des taux 10.49, ICr à 95 % 2.83 à 60.64 ; 1 essai, 168 participants).

Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, les bêta-bloquants associés à des dérivés nitrés ont entraîné un nombre plus élevé d'événements indésirables (nombre de participants) que les bêta-bloquants seuls (OR 3,41, ICr à 95 % 1,11 à 11,28 ; 1 essai, 57 participants). Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, les événements indésirables (nombre d'événements) étaient plus élevés dans le cas de la sclérothérapie que dans celui des bêtabloquants (rapport des taux 2,49, ICr à 95 % 1,53 à 4,22 ; rapport des taux de la comparaison directe 2,47, ICr à 95 % 1,27 à 5,06 ; 2 essais, 90 participants), et dans le cas des bêtabloquants associés à la ligature élastique que dans celui des bêtabloquants seuls (comparaison directe HR 1,72, ICr à 95 % 1,08 à 2,76 ; 1 essai, 140 participants).

Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, toute hémorragie variqueuse était plus faible sous bêta-bloquants associés à la ligature élastique que sous bêta-bloquants seuls (comparaison directe HR 0.21, ICr à 95 % 0.04 à 0.71 ; 1 essai, 173 participants). Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, toute hémorragie variqueuse était plus élevée sous dérivés nitrés que sous bêta-bloquants (comparaison directe HR 6.40, ICr à 95 % 1.58 à 47.42 ; 1 essai, 52 participants).

Les données probantes suggèrent une incertitude considérable quant à l'effet des interventions dans les comparaisons restantes.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Celine Delluc et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.