Quel est le but de cette revue Cochrane ?
Découvrir le meilleur traitement disponible pour les saignements dus aux varices œsophagiennes (veines dilatées dans l'œsophage) chez les personnes présentant des fibroses avancées du foie (cirrhose du foie ou fibroses tardives du foie avec complications). Les hémorragies dues aux ruptures de varices œsophagiennes chez les personnes atteintes de cirrhose constituent un événement qui engage le pronostic vital. Il est donc important de traiter les personnes qui en sont victimes, mais les bénéfices et les risques des différents traitements disponibles ne sont actuellement pas clairs. Les auteurs de la revue ont rassemblé et analysé tous les essais cliniques randomisés pertinents (études dans lesquelles les participants sont assignés de manière aléatoire à l'un des deux groupes de traitement ou plus) dans le but de déterminer quel est le meilleur traitement. Ils ont trouvé 52 essais cliniques randomisés. Lors de l'analyse des données, les auteurs de la revue ont utilisé les méthodes standards de Cochrane, qui permettent la comparaison de deux traitements seulement à la fois. Les auteurs ont également utilisé des techniques avancées qui permettent de comparer plusieurs traitements en même temps (généralement appelées « méta-analyse en réseau (ou indirecte) »).
Date de la recherche documentaire17 décembre 2019
Qu'étudie cette revue ?
Cette revue s'est intéressée aux adultes de tout sexe, âge et origine ethnique, atteints d'une maladie hépatique avancée due à diverses causes et présentant des varices œsophagiennes qui saignent. Les participants ont reçu différents traitements pour des varices œsophagiennes qui saignent. Les auteurs ont exclu les études portant sur les personnes qui présentaient des saignements d’origine gastrique, qui avaient échoué à un traitement par une autre méthode avant de participer à l'étude, celles chez qui les saignements avaient été contrôlés par une autre méthode avant de participer à l'étude, et celles qui avaient déjà subi une transplantation du foie. L'âge moyen des participants, lorsqu'il a été communiqué, allait de 39 à 62 ans. Les traitements utilisés dans les essais comprenaient la sclérothérapie endoscopique (injection d'un liquide fibrosant dans les veines dilatées (la fibrose bloque les veines, ce qui les rétrécit) en regardant à travers un tube inséré par la bouche), la ligature élastique des varices œsophagiennes (insertion d’élastiques autour des veines dilatées en regardant à travers un tube inséré par la bouche), analogues de la somatostatine (médicaments qui ressemblent à des hormones intestinales et rétrécissent les vaisseaux sanguins), analogues de la vasopressine (médicaments qui ressemblent à des hormones cérébrales et rétrécissent les vaisseaux sanguins) et tamponnement par ballonnet (insertion d'un tube par le nez ou la bouche et gonflement d'un ballonnet autour du tube dans l'espoir d'exercer une pression sur les veines qui saignent). Les auteurs de la revue souhaitaient recueillir et analyser des données sur le décès (pourcentage de participants décédés dans les six semaines suivant l'administration du traitement), la qualité de vie, les effets indésirables graves et non graves (c'est-à-dire les complications graves et non graves), la récidive des hémorragies et l'apparition d'autres complications de la maladie hépatique avancée.
Quels ont été les principaux résultats de la revue ?
Les 52 essais comprenaient un petit nombre de participants (4580 participants). Quarante-huit essais avec 4042 participants ont fourni des données pour les analyses. Le suivi des participants à l'essai allait de moins d'une semaine à six semaines. La source de financement de la recherche n'était pas claire dans 31 études ; des organisations commerciales ont financé 11 études. Les sources de financement des 10 essais restants n’ont posé aucun problème. Dans l'ensemble, la revue démontre que :
- Aucune des études n'a été menée sans défauts, et de ce fait, les résultats présentent un niveau de confiance modéré à très élevé.
- Environ une personne sur six souffrant de cirrhose et de varices œsophagiennes hémorragiques et ayant reçu le traitement standard de sclérothérapie est décédée dans les six semaines.
- Les analogues de la somatostatine seuls et les analogues de la vasopressine seuls entraînent probablement une augmentation de la mortalité, par rapport à la sclérothérapie.
- Les analogues de la vasopressine seuls et la ligature élastique seule entraînent probablement moins d'événements indésirables (complications) que la sclérothérapie.
- Le tamponnement par ballonnet associé à la sclérothérapie pourrait entraîner une augmentation importante des effets indésirables graves par rapport à la sclérothérapie.
- L'association sclérothérapie et analogues de la somatostatine pourrait entraîner une forte diminution de récidives hémorragiques symptomatiques par rapport à la sclérothérapie.
- Les données probantes indiquent une incertitude considérable quant à l'effet des interventions dans les autres comparaisons.
- Aucun des essais n'a rapporté la qualité de vie liée à la santé.
- De futurs essais cliniques randomisés bien conçus sont nécessaires pour déterminer le meilleur traitement pour les personnes atteintes de cirrhose et de varices œsophagiennes qui saignent.
Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance modéré, les analogues de la somatostatine seuls et les analogues de la vasopressine seuls (avec un traitement de soutien) entraînent probablement une augmentation de la mortalité, par rapport à la sclérothérapie endoscopique. Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance modéré, les analogues de la vasopressine seuls et la ligature élastique des varices œsophagiennes seule entraînent probablement moins d'événements indésirables que la sclérothérapie endoscopique. Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, le tamponnement par ballonnet associé à la sclérothérapie pourraient entraîner une augmentation importante des événements indésirables graves par rapport à la sclérothérapie. Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, la sclérothérapie associée à des analogues de la somatostatine pourrait entraîner une diminution importante de récidive hémorragique symptomatique par rapport à la sclérothérapie. Dans les comparaisons restantes, les données probantes indiquent une incertitude considérable quant aux effets des interventions, par rapport à la sclérothérapie.
Environ 40 à 95 % des personnes atteintes de cirrhose du foie ont des varices œsophagiennes. Environ 15 à 20 % des varices œsophagiennes saignent dans un délai d'un à trois ans après le diagnostic. Plusieurs traitements différents sont disponibles, dont, entre autres, la sclérothérapie endoscopique, la ligature élastique des varices œsophagiennes, les analogues de la somatostatine, les analogues de la vasopressine et le tamponnement par ballonnet. Cependant, il existe une incertitude quant aux bénéfices et aux risques individuels et relatifs de ces traitements.
Comparer les bénéfices et les risques de différents traitements initiaux pour les saignements de varices œsophagiennes chez les adultes atteints de cirrhose décompensée du foie, par le biais d'une méta-analyse en réseau ; et générer des classements des différents traitements pour les saignements aigus de varices œsophagiennes, en fonction de leurs bénéfices et risques.
Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL, MEDLINE, Embase, Science Citation Index Expanded, le système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) de l'OMS et les registres d'essais jusqu'au 17 décembre 2019, afin d'identifier les essais cliniques randomisés (ECR) chez les personnes atteintes de cirrhose et présentant des saignements aigus dus à une rupture des varices œsophagiennes.
Nous avons inclus uniquement les ECR (indépendamment de la langue, de la mise en aveugle ou du statut) chez des adultes atteints de cirrhose et présentant des varices œsophagiennes qui saignent de façon aiguë. Nous avons exclu les ECR dans lesquels les participants présentaient des saignements uniquement dus à des varices gastriques, ceux qui avaient échoué à un traitement antérieur (saignement réfractaire), ceux chez qui l'hémostase initiale avait été obtenue avant l'inclusion dans l'essai, et ceux qui avaient déjà subi une transplantation hépatique.
Nous avons effectué une méta-analyse en réseau avec le logiciel OpenBUGS, en utilisant des méthodes bayésiennes, et nous avons calculé les différences entre les traitements en utilisant des rapport des cotes (RC) et des risques relatifs avec des intervalles de crédibilité (ICr) à 95 % basés sur une analyse des cas disponibles, selon les directives de l'unité d'aide à la décision du National Institute of Health and Care Excellence. Nous avons également effectué les comparaisons directes à partir des ECR en utilisant les mêmes codes et les mêmes détails techniques.
Nous avons inclus un total de 52 ECR (4580 participants) dans la revue. Quarante-huit essais (4042 participants) ont été inclus dans une ou plusieurs comparaisons de la revue. Les essais qui ont fourni les informations comprenaient des personnes atteintes de cirrhose due à des étiologies variées et des personnes ayant ou non des antécédents de saignement. Nous avons inclus les critères de jugement évalués jusqu'à six semaines. Tous les essais présentaient un risque de biais élevé.
Au total, 19 interventions ont été comparées dans les essais (sclérothérapie, analogues de la somatostatine, analogues de la vasopressine, sclérothérapie associée aux analogues de la somatostatine, ligature élastique des varices œsophagiennes, tamponnement par ballonnet, analogues de la somatostatine associés à la ligature élastique des varices œsophagiennes, nitrates associés aux analogues de la vasopressine, absence d’intervention active, sclérothérapie associée à la ligature élastique des varices œsophagiennes, tamponnement par ballonnet associé à la sclérothérapie, tamponnement par ballonnet associé aux analogues de la somatostatine, tamponnement par ballonnet associé aux analogues de la vasopressine, ligature élastique des varices œsophagiennes associée aux analogues de la vasopressine, tamponnement par ballonnet associé aux nitrates et aux analogues de la vasopressine, tamponnement par ballonnet associé à la ligature élastique des varices œsophagiennes, les anastomoses portocaves, la sclérothérapie associée au shunt (ou l’anastomose) porto-systémique intrahépatique par voie transjugulaire (TIPS) et la sclérothérapie associée aux analogues de la vasopressine). Nous avons rapporté les estimations d'effet pour les critères de jugement principaux et secondaires lorsqu'il y avait des données probantes suggérant de différences entre les interventions par rapport au traitement de référence de la sclérothérapie, mais nous avons rapporté les autres résultats des critères de jugement principaux et secondaires par rapport au traitement de référence de la sclérothérapie sans les estimations d'effet lorsqu'il n'y avait pas de données probantes de différences afin de fournir un résumé concis des résultats.
Dans l'ensemble, 15,8 % des participants à l'essai ayant reçu le traitement de référence, la sclérothérapie (choisi car il s'agissait du traitement le plus fréquemment comparé dans les essais), sont décédés au cours des périodes de suivi, qui allaient de trois jours à six semaines. Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance modéré, les analogues de la somatostatine seuls avaient une mortalité plus élevée que la sclérothérapie (RC 1,57, ICr à 95 % 1,04 à 2,41 ; estimation du réseau ; comparaison directe : 4 essais ; 353 participants) et les analogues de la vasopressine seuls avaient une mortalité plus élevée que la sclérothérapie (RC 1,70, ICr à 95 % 1,13 à 2,62 ; estimation du réseau ; comparaison directe : 2 essais ; 438 participants).
Aucun des essais n'a rapporté la qualité de vie liée à la santé. Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, une proportion plus élevée de personnes recevant un tamponnement par ballonnet plus une sclérothérapie ont eu des événements indésirables plus graves que celles recevant uniquement une sclérothérapie (RC 4,23, ICr à 95 % 1,22 à 17,80 ; estimation directe ; 1 RCT ; 60 participants).
Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance modéré, les personnes recevant des analogues de la vasopressine seuls et celles recevant une ligature élastique des varices œsophagiennes ont eu moins d'événements indésirables que celles recevant uniquement une sclérothérapie (rapport des taux 0,59, ICr à 95 % 0,35 à 0,96 ; estimation du réseau ; comparaison directe : 1 ECR ; 219 participants ; et rapport des taux 0,40, ICr à 95 % 0,21 à 0,74 ; estimation de réseau ; comparaison directe : 1 ECR ; 77 participants ; respectivement). Sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, la proportion de personnes ayant développé une récidive hémorragique symptomatique était plus faible chez les personnes ayant reçu une sclérothérapie associée aux analogues de la somatostatine que chez celles ayant reçu uniquement une sclérothérapie (RC 0,21, ICr à 95 % 0,03 à 0,94 ; estimation directe ; 1 RCT ; 105 participants).
Les données probantes suggèrent une incertitude considérable quant à l'effet des interventions dans les comparaisons restantes où la sclérothérapie était l'intervention de contrôle.
Post-édition effectuée par Anis Hasnaoui et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr