Le traitement d'entretien après un traitement antérieur est-il plus efficace que l'observation ou le placebo dans le traitement de la leucémie lymphoïde chronique chez l'adulte ?

Quel est l’objectif de cette revue ?

Nous avons cherché à déterminer si les traitements d'entretien actuellement disponibles pour le contrôle de la maladie chez les adultes atteints de leucémie lymphoïde chronique (LLC) présentent un équilibre acceptable entre les bénéfices et les risques à la suite d'un traitement antérieur.

Principaux messages

Nous avons constaté que le traitement d'entretien chez les adultes atteints de LLC après un traitement antérieur n'a probablement que peu ou pas d'effet sur la survie à long terme. Nous avons également constaté que le traitement d'entretien augmente probablement la période de contrôle de la maladie, mais qu'il est associé à une augmentation des événements indésirables graves liés aux médicaments et de tous les événements indésirables.

Qu'étudie cette revue ?

La LLC est un cancer du sang qui affecte les lymphocytes, un groupe de globules blancs qui aident l'organisme à lutter contre les infections et les maladies. Au cours des 20 dernières années, le taux de contrôle et la survie des patients se sont améliorés de manière significative grâce à l'utilisation de la chimiothérapie associée à l'immunothérapie, suivie de l'introduction de nouvelles thérapies ciblées par voie orale en tant que traitement principal de la LLC. Malgré ces progrès, les patients atteints de LLC pourraient toujours développer une maladie résistante au traitement. Les traitements d'entretien visent à améliorer la réponse au traitement et à prolonger la survie, mais ils pourraient aussi augmenter le risque d'événements indésirables. Les médicaments disponibles pour l'intervention d'entretien comprennent les anticorps monoclonaux anti-CD20, les médicaments immunomodulateurs et les anticorps monoclonaux anti-CD52. Ces médicaments comportent des risques d'effets secondaires graves dus à une administration prolongée. On ne sait toujours pas si les bénéfices des traitements d'entretien l'emportent sur les risques, car ils pourraient ne pas parvenir à un équilibre satisfaisant entre le contrôle de la maladie et la prolongation de la survie sans augmenter le nombre de décès ou d'événements indésirables liés au traitement. Les patients atteints de LLC qui obtiennent une rémission après la première phase de traitement doivent donc bien peser les bénéfices et les risques d'une observation médicale ou d'un traitement d'entretien.

Que voulions-nous découvrir ?

Nous voulions savoir si le traitement d'entretien après un traitement antérieur est efficace pour contrôler la maladie chez les adultes atteints de LLC et s'il entraîne des effets indésirables.

Comment avons-nous procédé ?

Nous avons recherché des études comparant le traitement d'entretien à un placebo (traitement factice) ou à l'observation, ou des comparaisons directes de traitements d'entretien. Nous avons comparé et résumé les résultats et évalué notre confiance dans les données probantes sur la base de facteurs tels que les méthodes et la taille des études.

Qu’avons-nous trouvé ?

Nous avons identifié 11 études (2393 participants) à inclure dans la revue. Toutes les études étaient des essais contrôlés randomisés (ECR), qui sont les essais cliniques les plus fiables car ils répartissent de manière aléatoire les personnes entre un traitement (groupe d'intervention) et l'absence de traitement (groupe témoin). Nous avons synthétisé les données probantes de 10 études (2341 participants) afin d'évaluer les bénéfices et les risques du traitement d'entretien de la LLC par rapport à des groupes témoins recevant une observation ou un placebo (traitement factice).

Par rapport à l'observation, les anticorps monoclonaux anti-CD20 ont probablement peu ou pas d'effet sur la survie globale (données probantes issues de 3 études portant sur 1152 participants), mais augmentent probablement la durée pendant laquelle la maladie est contrôlée (survie sans progression) (données probantes issues de 5 études portant sur 1255 participants).

Comparé au placebo/à l'observation, les médicaments immunomodulateurs ont probablement peu ou pas d'effet sur la survie globale (données probantes issues de 3 études avec 461 participants), mais entraînent probablement une forte augmentation de la survie sans progression (données probantes issues de 3 études avec 461 participants).

Par rapport à l'observation, les anticorps monoclonaux anti-CD20 pourraient entraîner une augmentation des effets secondaires graves (données probantes issues de 5 études portant sur 1284 participants), mais n'ont pas d'incidence sur le risque de décès lié au traitement (données probantes issues de 4 études portant sur 1189 participants). Les anticorps monoclonaux anti-CD20 pourraient réduire légèrement le nombre de personnes ayant arrêté le traitement (données probantes issues de 6 études avec 1321 participants), mais pourraient augmenter légèrement le nombre total d'effets secondaires (données probantes issues de 6 études avec 1321 participants).

Comparé au placebo/observation, les médicaments immunomodulateurs pourraient entraîner une augmentation des effets secondaires graves (données probantes issues de 2 études portant sur 400 participants), et pourraient augmenter légèrement le nombre de personnes décédées en raison du traitement d'entretien (données probantes issues de 3 études portant sur 458 participants). Les données probantes concernant l'effet des médicaments immunomodulateurs sur le nombre de personnes ayant arrêté le traitement sont très incertaines (données probantes issues de 2 études avec 400 participants), mais les médicaments immunomodulateurs augmentent probablement le nombre global d'effets secondaires (données probantes issues de 3 études avec 458 participants).

Les données probantes sont insuffisantes pour déterminer si le traitement d'entretien par anticorps monoclonaux anti-CD20 affecte la qualité de vie liée à la santé, et notre confiance dans les données probantes est faible (données probantes issues d'une étude avec 480 participants).

Aucune étude n'a évalué d'autres nouvelles interventions d'entretien, telles que les inhibiteurs du récepteur des cellules B, les inhibiteurs de la leucémie à cellules B-2/lymphome-2 ou l'obinutuzumab.

Quelles sont les limites des données probantes ?

Le niveau de confiance des données probantes est généralement modéré ou faible en raison de problèmes liés aux essais, tels que les risques de biais, les différences de caractéristiques à l'inclusion et les estimations imprécises des effets de l'intervention.

Dans quelle mesure cette revue est-elle à jour ?

Les données probantes sont à jour au mois de janvier 2022.

Conclusions des auteurs: 

Il existe actuellement des données probantes d’un niveau modéré à très faible concernant les bénéfices et les risques d'un traitement d'entretien chez les personnes atteintes de leucémie lymphocytaire chronique (LLC). Le traitement d’entretien avec des anticorps monoclonaux anti-CD20 a amélioré la survie globale sans progression (SSP), mais a également augmenté les événements indésirables (EI) de grade 3/4 et tous les EI. Le traitement d’entretien par médicaments immunomodulateurs a eu un effet important sur la SSP, mais a également augmenté les EI de grade 3/4. Cependant, aucune des interventions d’entretien susmentionnées ne montre de différences de SG entre le groupe d’entretien et le groupe témoin. Les effets du traitement d'entretien avec l'alemtuzumab sont incertains, et une mise en garde contre la toxicité infectieuse liée au médicament a été émise. Nous n'avons trouvé aucune étude évaluant d'autres nouvelles interventions d'entretien, telles que les inhibiteurs du récepteur des cellules B, les inhibiteurs de la leucémie à cellules B-2/lymphome-2 ou l'obinutuzumab.

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Contexte: 

La leucémie lymphocytaire chronique (LLC) est la maladie lymphoproliférative la plus fréquente chez l'adulte et reste actuellement incurable. Comme la période sans progression se raccourcit après chaque traitement successif, des stratégies telles que le traitement d'entretien sont nécessaires pour améliorer le degré et la durée de la réponse aux thérapies précédentes. Les anticorps monoclonaux, les agents immunomodulateurs et les thérapies ciblées font partie des options disponibles pour le traitement d'entretien. Les personnes atteintes de la LLC qui obtiennent une rémission après un traitement antérieur pourraient choisir de suivre une observation médicale ou un traitement d'entretien afin d'approfondir la réponse. Bien que l'utilisation d'agents thérapeutiques d'entretien soit largement répandue, les bénéfices et les risques de ces traitements sont encore incertains.

Objectifs: 

Évaluer les effets et la tolérance d'un traitement d'entretien, comprenant un anticorps monoclonal anti-CD20, un traitement médicamenteux immunomodulateur, un anticorps monoclonal anti-CD52, un inhibiteur de la tyrosine kinase de Bruton et un inhibiteur de la tyrosine kinase du lymphome à cellules B-2, pour les personnes atteintes de LLC.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué une recherche documentaire exhaustive des essais contrôlés randomisés (ECR) sans restriction de langue ou de statut de publication. Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL, MEDLINE, Embase et trois registres d'essais en janvier 2022, ainsi que des vérifications de références, des recherches de citations et des contacts avec les auteurs des études afin d'identifier des études supplémentaires.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus des ECR avec identification prospective des participants. Nous avons exclu les essais randomisés en grappes, les plans d'essais croisés et les études non randomisées. Nous avons inclus des études comparant les traitements d'entretien à des comparaisons placebo/observation ou à des comparaisons directes.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons utilisé les procédures méthodologiques standards de Cochrane. Nous avons évalué le risque de biais des études incluses à l'aide de l'outil RoB 1 de Cochrane pour les ECR. Nous avons évalué le niveau de confiance des données probantes pour les critères de jugement suivants en utilisant l'approche GRADE : survie globale (SG), qualité de vie liée à la santé (QVLS), événements indésirables (EI) de grade 3 et 4, survie sans progression (SSP), mortalité liée au traitement (MLT), arrêt du traitement, et tous les événements indésirables (EI).

Résultats principaux: 

Nous avons identifié 11 ECR (2393 participants) répondant aux critères d'inclusion, dont sept essais comparant des anticorps monoclonaux anti-CD20 (rituximab ou ofatumumab) à l'observation chez 1679 participants ; trois essais comparant un médicament immunomodulateur (lénalidomide) à un placebo/observation chez 693 participants ; et un essai comparant des anticorps monoclonaux anti-CD 52 (alemtuzumab) à l'observation chez 21 participants. Aucune comparaison de nouveaux petits inhibiteurs moléculaires n'a été trouvée.

L'âge médian des participants était compris entre 54,1 et 71,7 ans ; 59,5 % étaient des hommes. Le type de traitement d'induction antérieur, la gravité de la maladie et le stade d'inclusion variaient d'une étude à l'autre. Cinq essais ont inclus des patients symptomatiques à un stade précoce et trois essais ont inclus des patients à un stade avancé (stade III/IV de Rai ou stade B/C de Binet). Six essais ont rapporté la présence fréquente d'aberrations cytogéniques à l'inclusion (69,7 % à 80,1 %). La durée médiane du suivi était de 12,4 à 73 mois. Le risque de biais de sélection dans les études incluses n'était pas clair. Nous avons évalué le risque global de biais de performance et de biais de détection comme étant faible pour les critères de jugement objectifs et élevé pour les critères de jugement subjectifs. Le risque global de biais d'attrition, de biais de notification et d'autres biais était faible.

Anticorps monoclonaux anti-CD20 : le rituximab ou l’ofatumumab en entretien par rapport à l'observation.

Le traitement d’entretien avec des anticorps monoclonaux anti-CD20 entraîne probablement peu ou pas de différence en termes de SG (rapport des risques instantanés (hazard ratio, HR) 0,94, intervalle de confiance (IC) à 95 % 0,73 à 1,20 ; 1152 participants ; 3 études ; données probantes d’un niveau de confiance modéré) et augmente probablement la SSP de manière significative (HR 61, IC à 95 % 0,50 à 0,73 ; 1255 participants ; 5 études ; données probantes d’un niveau de confiance modéré) par rapport à l'observation seule.

Les anticorps monoclonaux anti-CD20 pourraient entraîner : une augmentation des EI de grade 3/4 (rapport de taux 1,34, IC à 95 % 1,06 à 1,71 ; 1284 participants ; 5 études ; niveau de confiance faible) ; peu ou pas de différence en termes de MLT (risque relatif 0,82, IC à 95 % 0,39 à 1,71 ; 1189 participants ; 4 études ; données probantes d’un niveau de confiance faible) ; une légère réduction ou aucune différence en termes d’arrêt du traitement (risque relatif 0.93, IC à 95 % 0,72 à 1,20 ; 1321 participants ; 6 études ; données probantes d’un niveau de confiance faible) ; et une augmentation de tous les EI (rapport des taux 1,23, IC à 95 % 1,03 à 1,47 ; 1321 participants ; 6 études ; données probantes d’un niveau de confiance faible) par rapport au groupe d'observation.

Un ECR a indiqué qu'il pourrait ne pas y avoir de différence en termes de QVLS entre le groupe recevant un anticorps monoclonal anti-CD20 (ofatumumab) et le groupe d'observation (différence de moyennes de -1,70, IC à 95 % -8,59 à 5,19 ; 480 participants ; 1 étude ; données probantes d’un niveau de confiance faible).

Médicament immunomodulateur (IMiD) : le lénalidomide d'entretien par rapport au placebo/observation

Le traitement d'entretien par IMiD entraîne probablement peu ou pas de différence en termes de SG (HR 0,91, IC à 95 % 0,61 à 1,35 ; 461 participants ; 3 études ; données probantes d’un niveau de confiance modéré) et probablement une forte augmentation de la SSP (HR 0,37, IC à 95 % 0,19 à 0,73 ; 461 participants ; 3 études ; données probantes d’un niveau de confiance modéré) par rapport au placebo/à l'observation.

En ce qui concerne les risques, le traitement d'entretien par IMiD pourrait entraîner une augmentation des EI de grade 3/4 (rapport des taux 1,82, IC à 95 % 1,38 à 2,38 ; 400 participants ; 2 études ; données probantes d’un niveau de confiance faible) et pourrait entraîner une légère augmentation de la MLT (risque relatif 1,22, IC à 95 % 0,35 à 4,29 ; 458 participants ; 3 études ; données probantes d’un niveau de confiance faible) par rapport au placebo/à l'observation. Les données probantes concernant l'effet sur l’arrêt du traitement par rapport au placebo sont très incertaines (risque relatif 0,71, IC à 95 % 0,47 à 1,05 ; 400 participants ; 2 études ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Le traitement d'entretien par IMiD augmente probablement légèrement tous les EI (rapport des taux 1,41, IC à 95 % 1,28 à 1,54 ; 458 participants ; 3 études ; données probantes d’un niveau de confiance modéré) par rapport au placebo/à l'observation.

Aucune étude n'a évalué la QVLS.

Anticorps monoclonaux anti-CD52 : traitement d’entretien avec l'alemtuzumab par rapport à l'observation

Le traitement d’entretien avec l'alemtuzumab pourrait avoir peu ou pas d'effet sur la SSP, mais les données probantes sont très incertaines (HR 0,55, IC à 95 % 0,32 à 0,95 ; 21 participants ; 1 étude ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Nous n'avons pas identifié d'étude rapportant les critères de jugement SG, QVLS, EI de grade 3/4, MLT, arrêt du traitement, ou tous les EI.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Inès Belalem et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.