Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont-ils efficaces pour traiter les infections des voies urinaires symptomatiques non compliquées chez les femmes ?

Principaux messages

- Comparativement aux antibiotiques (médicaments utilisés pour traiter un large éventail d'infections ou de maladies causées par des bactéries), les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) (médicaments qui réduisent l'inflammation, la douleur et la fièvre) entraînent probablement moins de résolution à court terme des symptômes d'infection des voies urinaires (1 à 4 jours) et pourraient entraîner moins de résolution à moyen terme des symptômes (5 à 10 jours).

- Les AINS pourraient entraîner une plus longue durée des symptômes et entraîner probablement un plus grand nombre de femmes nécessitant un traitement antibiotique au 30ème jour.

Qu'est-ce qu'une infection urinaire non compliquée ?

La majorité des infections des voies urinaires (IVU) chez les femmes (une maladie où les bactéries pénètrent dans l'urine et remontent jusqu'à la vessie) sont simples (survenant chez une personne en bonne santé sans anomalies des voies urinaires ou autres problèmes médicaux) et se résorbent spontanément (se guérissent sans traitement). Les symptômes souvent ressentis sont une sensation de brûlure en urinant, une fréquence urinaire accrue et des mictions impérieuses.

Comment traiter les infections urinaires ?

Lorsque les symptômes sont gênants, un traitement est souvent recherché et des antibiotiques (médicaments utilisés pour traiter un large éventail d'infections ou de maladies causées par des bactéries) sont couramment utilisés. Les patients et les médecins étant de plus en plus conscients des effets négatifs de l'utilisation répétée d'antibiotiques, des travaux se multiplient pour évaluer les traitements non antibiotiques permettant de contrôler les symptômes des infections urinaires. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont des médicaments qui réduisent l'inflammation, la douleur et la fièvre. Il a été suggéré que l'effet anti-inflammatoire des AINS pourrait atténuer les symptômes des infections urinaires.

Objets de nos recherches

Nous voulions savoir si les AINS étaient plus efficaces que les antibiotiques pour améliorer les symptômes de l’infection urinaire, réduire leur gravité et leur durée, et diminuer le recours aux antibiotiques. Nous voulions également savoir si les AINS étaient associés à des effets indésirables.

Comment avons-nous procédé ?

Nous avons recherché des études comparant les AINS à des antibiotiques ou à d'autres interventions chez des femmes souffrant d'infections urinaires non compliquées.

Nous avons comparé et résumé les résultats des études et évalué notre confiance dans les informations sur la base de facteurs tels que les méthodes et la taille des études.

Qu’avons-nous trouvé ?

Nous avons inclus six études randomisées portant sur 1646 femmes. L'âge moyen variait de 28 à 50 ans, et les infections urinaires antérieures ont été signalées chez 7,2 à 77 % des femmes. Cinq études ont été menées dans plusieurs centres, et les études ont été réalisées au Danemark, en Allemagne, en Corée, en Norvège, en Suède, en Suisse et au Royaume-Uni.

Par rapport aux antibiotiques, les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) entraînent probablement une moins bonne résolution des symptômes à court terme (1 à 4 jours) et peuvent également entraîner une résolution des symptômes à moyen terme moins importante (5 à 10 jours). Les AINS n’ont probablement que peu ou pas de différence sur le nombre d'événements indésirables au 30e jour. Les AINS peuvent prolonger la durée des symptômes et réduire la proportion de femmes présentant une résolution microbiologique (absence de bactérie dans l'urine) au 10e jour. Les AINS sont probablement à l’origine d’un plus grand nombre de femmes nécessitant un traitement antibiotique au 30e jour.

Par rapport au placebo, les AINS pourraient réduire la nécessité d'un traitement antibiotique, mais n’auraient que peu ou pas d’effet sur les événements indésirables au 30e jour. Par rapport à un produit à base de plantes, les AINS peuvent n’avoir que peu ou pas de différence en ce qui concerne les événements indésirables.

Quelles sont les limites des données probantes ?

Le petit nombre d'études (par comparaison) et la petite taille des études ont constitué des limites à cette revue. Toutes les études n’ont pas fourni de données sur les critères de jugement qui nous intéressaient. Nous sommes modérément convaincus dans le fait que, par rapport aux antibiotiques, les AINS entraînent une moins bonne résolution à cour terme des symptômes de l'infection urinaire et que davantage de femmes ont besoin d’un traitement antibiotique au 30e jour. Nous sommes moins sûrs de leur effet sur la durée des symptômes.

Les données probantes sont-elles à jour ?

Les données probantes sont à jour jusqu'au 18 novembre 2024.

Conclusions des auteurs: 

L'utilisation d'anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) pour la prise en charge des infections des voies urinaires (IVU) symptomatiques non compliquées entraîne probablement une moins bonne résolution des symptômes à court terme et un recours accru aux antibiotiques de secours au 30e jour comparativement au traitement antibiotique primaire. Les études futures devraient tenir compte des divers facteurs de confusion tels que le degré des symptômes, la microbiologie, le type et les profils de résistance des bactéries impliquées et le nombre d'épisodes d’IVU aux cours des mois précédant le début du traitement.

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Contexte: 

Près de la moitié des femmes auront au moins une infection des voies urinaires (IVU) symptomatique au cours de leur vie. Bien que généralement ces infections se résorbent spontanément, 74 % des femmes qui consultent un professionnel de santé se voient prescrire un antibiotique et, dans de rares cas, ces infections peuvent évoluer vers des formes plus graves. Par conséquent, le standard de soins pour le traitement des IVU non compliquées symptomatiques est l'antibiothérapie orale, qui vise à résoudre les symptômes et à prévenir le développement de complications telles que la pyélonéphrite. Étant donné qu'un certain nombre d'IVU se résolvent spontanément, les traitements non antibiotiques qui pourraient aider à réduire la gravité ou la durée des symptômes ou à diminuer la nécessité de recourir aux antibiotiques peuvent être bénéfiques.

Objectifs: 

Cette revue a pour objectif d’étudier les bénéfices et les risques associés à l'utilisation d'anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) dans le traitement des IVU symptomatiques non compliquées chez les femmes adultes non enceintes.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué une recherche dans le registre des essais du groupe Cochrane sur le rein et la greffe jusqu'au 18 novembre 2024 en contactant le coordinateur de recherche documentaire et en utilisant les termes de recherche pertinents pour cette revue. Les études dans ce registre sont identifiées via des recherches dans le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), MEDLINE et EMBASE, ainsi que dans les compte-rendus de conférences, le portail de recherche du Système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) et ClinicalTrials.gov.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus tous essais contrôlés randomisés (ECR) et quasi-ECR portant sur l'efficacité des AINS dans le traitement des IVU non compliquées chez des femmes adultes non enceintes. Les principaux critères de jugement d'intérêt étaient : 1) la résolution des symptômes à court terme (jours 1 à 4) ; 2) la résolution des symptômes à moyen terme (jours 5 à 10) ; et 3) l'incidence des événements indésirables (incluant la progression vers une septicémie ou une IVU compliquée, l'hospitalisation ou la nécessité d'antibiotiques par voie intraveineuse, les complications gastro-intestinales ou le décès) jusqu'à 30 jours après la randomisation.

Recueil et analyse des données: 

La recherche, la sélection des résumés et l'extraction des données ont été effectuées indépendamment par deux auteurs, et tous désaccords ont été résolus par une discussion avec un troisième auteur.

Les estimations globales de l’effet ont été obtenues à l'aide d'un modèle à effets aléatoires, et les résultats ont été exprimés sous forme de risques relatifs (RR) et d'intervalles de confiance (IC) à 95 % pour les critères de jugement dichotomiques et de différence de moyennes (DM) et d'IC à 95 % pour des critères de jugement continus. Le niveau de confiance des données probantes a été évalué en utilisant l'approche GRADE (Grading of Recommendations Assessment, Development and Evaluation).

Résultats principaux: 

Six études (1646 femmes randomisées) publiées entre 2010 et 2019 répondaient à nos critères d'inclusion. L'âge moyen était compris entre 28 et 50 ans ; des infections des voies urinaires (IVU) antérieures ont été signalées chez 7,2 % à 77 % des participants. Cinq études multicentriques ont été réalisées au Danemark, en Allemagne, en Corée, en Norvège, en Suède, en Suisse et au Royaume-Uni. Le risque global de biais était faible ou incertain.

Par rapport aux antibiotiques, les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) entraînent probablement une moins bonne résolution des symptômes à court terme (4 études, 1144 participants : RR 0,67, IC à 95 % 0,49 à 0,91 ; I 2 = 75 % ; données probantes d'un niveau de confiance modéré) et pourraient également entraîner une moindre résolution des symptômes à moyen terme (4 études, 1140 participants : RR 0,84, IC à 95 % 0,71 à 1,01 ; I 2 = 78 % ; données probantes d'un niveau de confiance faible). Les AINS ne font probablement que peu ou pas de différence sur le nombre d'événements indésirables au 30e jour (4 études, 1165 participants : RR 1,08, IC à 95 % 0,88 à 1,33 ; I 2 = 64 % ; données probantes d'un niveau de confiance modéré). Les AINS pourraient prolonger la durée des symptômes (2 études, 553 participants : DM 1,00 jour, IC à 95 % 0,61 à 1,39 ; I 2 = 0 % ; données probantes d'un niveau de confiance faible). Les AINS pourraient entraîner une proportion plus faible de femmes présentant une résolution microbiologique au 10e jour par rapport aux antibiotiques (2 études, 322 participantes : RR 0,76, IC à 95 % 0,68 à 0,85 ; I 2 = 0 % ; données probantes d'un niveau de confiance faible) et se traduisent probablement par un plus grand nombre de femmes recevant un traitement antibiotique de secours au 30ème jour (4 études, 1165 participantes : RR 3,14, IC à 95 % 2,23 à 4,42 ; I 2 = 49 % ; données probantes d'un niveau de confiance modéré).

Par rapport au placebo, les AINS pourraient réduire le recours à un traitement antibiotique de secours (1 étude, 183 participants : RR 0,56, IC à 95 % 0,36 à 0,87 ; données probantes d'un niveau de confiance faible) mais il est possible qu’il n’y ait que peu ou pas de différence en ce qui concerne les événements indésirables au 30e jour.

Par rapport au produit à base de plantes Uva-Ursi, les AINS peuvent n’avoir que peu ou pas d’effet sur les événements indésirables au 30e jour.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Nathalie Goulay et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.