Problématique
Les infections vésicales et rénales (infection des voies urinaires - IU) sont fréquentes chez les enfants, en particulier chez les filles. Elles sont à l'origine d'une maladie qui peut être désagréable, pouvant comprendre vomissements, fièvre et fatigue. Chez certains enfants, elles peuvent entraîner des lésions rénales ou des infections à répétitions. Dans le cas d'infections répétées, le risque de lésions rénales s'accroît. Certains médecins prescrivent des antibiotiques à long terme pour essayer d'éviter que les infections ne se reproduisent, mais cela peut causer chez l'enfant d'autres inconvénients, par exemple des vomissements
Comment avons-nous procédé ?
Nous avons consulté des bases de données électroniques et des références bibliographiques pour identifier et résumer les résultats de tous les essais contrôlés randomisés qui comparaient des antibiotiques à faible dose administrés pendant au moins 2 mois, avec l’absence de traitement ou un placebo chez des enfants à risque d'infection urinaire. Nous avons également identifié des études comparant différents types et doses d'antibiotiques.
Qu’avons-nous trouvé ?
Nous avons inclus 16 études (2036 enfants randomisés, 1977 analysés). Cette revue a révélé que les antibiotiques à long terme pourraient réduire le risque d'infections symptomatiques répétées, mais que les avantages sont probablement minimes et doivent être mis en balance avec la probabilité que les infections futures soient causées par des bactéries qui sont résistantes à l'antibiotique donné.
Conclusions
Les antibiotiques à faible dose et à long terme destinés à prévenir la récidive de l'infection urinaire devraient être réservés aux enfants à risque élevé de récidive, comme les nourrissons, et enfants dont les pédiatres voudraient réduire fortement le risque de nouvelles infections, comme les enfants présentant des anomalies rénales.
Les antibiotiques à long terme pourraient réduire le risque de récidive d'infections des voies urinaires symptomatiques chez les enfants qui ont déjà eu une ou plusieurs infections urinaires, mais les avantages pourraient être minimes et doivent être pris en compte avec le risque accru de résistance microbienne.
L'infection des voies urinaires (IU) est fréquente chez les enfants. Les symptômes comprennent la fièvre, la léthargie, l'anorexie et les vomissements. L'infection urinaire est causée par Escherichia coli dans plus de 80 % des cas et le traitement est une antibiothérapie. En raison du caractère aigu de l'infection urinaire et du risque de lésions rénales permanentes causées par la pyélonéphrite, de nombreux enfants reçoivent des antibiotiques à long terme (plusieurs mois à deux ans) visant à prévenir la récidive. Il s'agit de la troisième mise à jour d'une revue publiée pour la première fois en 2001 et mise à jour en 2006 et 2011.
Évaluer si la prophylaxie antibiotique à long terme était plus efficace que le placebo ou l'absence de traitement pour prévenir la récurrence des infections des voies urinaires chez les enfants et, le cas échéant, quel antibiotique utilisé en clinique était le plus efficace. Nous avons également évalué les risques d'un traitement antibiotique à long terme.
Nous avons fait une recherche dans le registre d'études du groupe Cochrane sur les reins et les greffes jusqu'au 30 juillet 2018 à l'aide de termes de recherche pertinents pour cet revue et en lien avec le spécialiste Cochrane de l'information dans ces domaines. Les études figurant dans le registre sont identifiées grâce à des recherches dans CENTRAL, MEDLINE, EMBASE, les actes de conférences, le portail de recherche du système d’enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) et ClinicalTrials.gov.
Comparaisons randomisées d'antibiotiques avec d'autres antibiotiques, un placebo ou aucun traitement pour prévenir les infections des voies urinaires récurrentes chez les enfants.
Deux auteurs ont évalué et extrait indépendamment les informations pour les mises à jour initiale et précédentes. Un modèle à effets aléatoires a été utilisé pour estimer le risque relatif (RR) et la différence de risque (DR) pour l'IU récurrente avec des intervalles de confiance (IC) à 95 %.
Dans cette mise à jour, seize études (2036 enfants randomisés, 1977 analysés) ont été incluses. Sept études (612 enfants) ont comparé deux types d'antibiotiques ou plus, six (1088 enfants) ont comparé des antibiotiques avec un placebo ou aucun traitement, une étude à quatre bras a comparé la circoncision avec et sans traitement antibiotique, une étude a comparé les doses d'antibiotiques administrées et une étude à trois bras a comparé deux antibiotiques différents ainsi qu'aucun traitement. Sur les seize études incluses, une seule a été jugée à faible risque de biais pour tous les domaines, et la majorité a été jugée à risque de biais incertain en raison d'une méthodologie très mal rapportée. Le nombre d'études jugées à faible risque de biais était le suivant : biais de sélection (7) ; biais de performance (4) ; biais de détection (1) ; biais d'attrition (6) ; biais de déclaration (7) ; et autres biais (2). Le nombre d'études jugées à risque élevé de biais était le suivant : biais de sélection (0) ; biais de performance (5) ; biais de détection (1) ; biais d'attrition (4) ; biais de déclaration (6) ; et autres biais (1).
Comparativement au placebo ou à l'absence de traitement, les antibiotiques entraînent une légère diminution du nombre d'infections urinaires symptomatiques répétées chez les enfants ; toutefois, l'estimation obtenue en combinant toutes les études est incertaine et l'intervalle de confiance révèle une faible précision indiquant que l’utilisation d’antibiotiques pourrait n’influer que peu voire pas du tout sur le risque de récidive (RR 0,75, IC à 95% : 0,28 à 1,98). Lorsque nous avons combiné uniquement les données des études avec l'assignation secrète d'un traitement, nous avons constaté une réduction semblable du risque de récidive de l'IU symptomatique chez les enfants prenant des antibiotiques (RR 0,68) et nous avons jugé que cette estimation est plus sûre en raison de la conception plus robuste des études, l'intervalle de confiance plus petit et ne comprenant pas le point de non-effet (IC à 95 % 0,48 à 0,95). La réduction estimée du risque de récidive de l'IU symptomatique chez les enfants prenant des antibiotiques était semblable chez les enfants présentant un reflux vésico-urétéral (RVU) (RR 0,65, IC à 95 %, 0,39 à 1,07) et chez ceux qui n'en présentent pas (RR 0,56, IC à 95 %, 0,15 à 2,12), mais il reste une incertitude importante liée aux imprécisions dues au nombre réduit de manifestations dans le groupe d'enfants présentant un RVU. La fréquence des évènements indésirables est inconsistante selon les études, une étude ayant rapporté plus d'évènements indésirables dans le groupe placebo et une deuxième étude en ayant rapporté plus dans le groupe traité par antibiotiques. Trois études ont fourni des données sur la résistance aux antibiotiques, l'analyse estimant que le risque d'infection urinaire causée par une bactérie résistante à l'antibiotique prophylactique était presque 2,5 fois plus élevé chez les enfants sous antibiotiques que chez les enfants sous placebo ou sans traitement (RR 2,40, IC à 95 % : 0,62 à 9,26). Cependant, l'intervalle de confiance est large, imprécis et il pourrait n’y avoir que peu voire pas de différence entre les deux groupes.
Huit études portant sur 659 enfants ont comparé un antibiotique à un autre, mais peu d'études ont comparé la même association pour le même critère de jugement, de sorte que peu de données ont pu être combinées. Deux études ont fait état de données et d'analyses sur la résistance microbienne et ont montré que le traitement par la nitrofurantoïne pourrait réduire le risque d'infection urinaire causée par une bactérie résistante comparativement aux enfants ayant reçu du triméthoprime-sulfaméthoxazole comme traitement prophylactique (RR 0,54, IC à 95 % 0,31 à 0,92).
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