Objectif
Nous avons examiné les éléments de preuve sur l'effet des médicaments inhibiteurs de l'acétylcholinestérase chez les personnes atteintes de myasthénie grave.
Contexte
La myasthénie grave est une maladie auto-immune rare dans laquelle les anticorps produits par le système immunitaire attaquent la liaison entre les nerfs et les muscles (la jonction neuromusculaire). Les impulsions nerveuses sont bloquées, entraînant un affaiblissement des muscles qui deviennent facilement fatigables. Les symptômes varient en gravité. L'acétylcholine est un messager chimique qui transmet des signaux entre les nerfs et les muscles. Une enzyme appelée acétylcholinestérase décompose l'acétylcholine. Certains médicaments utilisés pour traiter la myasthénie grave agissent sur l'acétylcholinestérase pour arrêter la dégradation de l'acétylcholine. Ces inhibiteurs de l'acétylcholinestérase augmentent la quantité d'acétylcholine disponible et aident ainsi l'activation et la contraction musculaires.
Caractéristiques des études
Nous avons inclus uniquement des preuves issues d'essais contrôlés randomisés (ECR) dans cette revue. Dans les ECR, les participants sont aléatoirement répartis en groupes. Ainsi, il est plus probable que les changements observés puissent être attribués aux traitements à l'étude plutôt qu'à d'autres causes possibles.
Nous n'avons trouvé qu'un seul ECR sur le traitement de la myasthénie grave. Les participants ont reçu soit le médicament étudié, soit un placebo pendant la première période de l'essai. Ils ont ensuite reçu l'autre traitement pendant la deuxième période de l'essai. Par exemple, si une personne recevait le médicament étudié dans la première phase, elle a ensuite reçu un placebo dans la seconde phase. À l'inverse, une personne ayant reçu un placebo dans la première phase recevait ensuite le médicament étudié dans la seconde phase. Ce type d'étude est appelé un essai croisé.
L'essai comprenait 10 personnes atteintes de myasthénie grave. Chez trois personnes, seuls les yeux étaient atteints. Chez sept personnes, la maladie affectait le corps plus largement. L'essai comparait la néostigmine (un inhibiteur de l'acétylcholinestérase) administrée par le nez à un placebo. Chaque traitement était administré durant deux semaines.
Résultats principaux et qualité des preuves
Après les deux semaines de la phase de traitement par la néostigmine, les symptômes de myasthénie grave (mesurés par une amélioration d'au moins une fonction musculaire) étaient améliorés chez neuf des 10 participants. Aucun participant n'a ressenti d'amélioration après la phase de placebo. En raison du manque d'informations, nous n'avons pu évaluer la façon dont l'essai avait été conçu et réalisé. Les événements indésirables étaient mineurs.
Plusieurs études observationnelles (non randomisées), études de cas, séries de cas et l'expérience clinique quotidienne sont en faveur de l'utilisation d'inhibiteurs de l'acétylcholinestérase. Cela signifie que les essais contrôlés par placebo pour confirmer l'efficacité du médicament ne sont probablement pas éthiques et ont peu de chances d'être menés. Actuellement, la meilleure posologie et durée de traitement avec les inhibiteurs d'acétylcholinestérase sont déterminées par le rapport entre l'amélioration des symptômes et les effets indésirables. Celui-ci varie avec le temps et dépend des autres types de traitements qui sont administrés simultanément pour inhiber la réaction auto-immune sous-jacente.
Ceci est la seconde mise à jour de cette revue, publiée initialement en 2011. Les preuves sont à jour jusqu'à juillet 2014.
À l'exception d'un essai de petite taille et peu concluant sur la néostigmine intranasale, aucun autre essai contrôlé randomisé n'a été mené sur l'utilisation d'inhibiteurs de l'acétylcholinestérase dans la myasthénie grave. La réponse aux inhibiteurs d'acétylcholinestérase dans les études observationnelles est tellement claire qu'un essai contrôlé randomisé privant les participants de ce traitement dans un bras placebo serait difficile à justifier.
Dans la myasthénie grave, le blocage des récepteurs de l'acétylcholine par les anticorps à la jonction neuro-musculaire supprime le « facteur de sécurité » naturel de la transmission synaptique. Les inhibiteurs de l'acétylcholinestérase fournissent un traitement symptomatique temporaire de la faiblesse musculaire, mais leur efficacité à long terme, leur posologie et leurs effets secondaires sont sujets à controverse. Ceci est la deuxième mise à jour d'une revue publiée dans la Bibliothèque Cochrane numéro 2, 2011.
Évaluer l'efficacité des inhibiteurs de l'acétylcholinestérase dans toutes les formes de myasthénie grave.
Le 8 juillet 2014, nous avons recherché dans le registre spécialisé du groupe Cochrane sur les affections neuro-musculaires, CENTRAL, MEDLINE et EMBASE des essais contrôlés randomisés et quasi randomisés sur l'utilisation des inhibiteurs de l'acétylcholinestérase dans la myasthénie grave. Deux auteurs ont passé au crible les articles pour trouver les études pouvant être incluses. Nous avons également contacté les auteurs et des experts connus dans le domaine afin d'identifier d'autres données publiées ou non publiées, et avons recherché des essais en cours dans des registre d'essais cliniques.
Les types d'études étaient des essais randomisés ou quasi randomisés. Les participants étaient des patients atteints de myasthénie grave diagnostiquée selon une définition acceptée internationalement. L'intervention était un traitement avec tout type d'inhibiteur d'acétylcholinestérase.
Types de critères de jugement
Critère de jugement principal
Amélioration des symptômes entre un et 14 jours après le début du traitement.
Mesures des critères de jugement secondaires
(1) Amélioration des symptômes plus de 14 jours après le début du traitement.
(2) Changement de l'altération mesuré par une échelle reconnue et de préférence validée, telle que le score de myasthénie grave quantitatif, entre un et 14 jours et plus de 14 jours après le début du traitement.
(3) Statut après intervention selon la Myasthenia Gravis Association of America plus de 14 jours après le début du traitement.
(4) Evénements indésirables, notamment les effets secondaires muscariniques.
Un auteur (MMM) a extrait les données qui ont été vérifiées par un deuxième auteur. Nous avons contacté les auteurs d'étude pour obtenir des informations supplémentaires et avons recueilli des données sur les effets indésirables dans les essais.
Nous n'avons trouvé aucun essai randomisé ou quasi randomisé sur les inhibiteurs d'acétylcholinestérase dans la myasthénie grave généralisée, ni pour la première version de cette revue ni pour cette mise à jour. Un essai randomisé croisé utilisant la néostigmine intranasale chez un total de 10 participants n'a été disponible que sous la forme d'un résumé. Il impliquait trois participants atteints de myasthénie grave oculaire et sept atteints de myasthénie grave généralisée. Les symptômes de la myasthénie grave (mesurés comme une amélioration d'au moins une fonction musculaire) se sont améliorés chez neuf des 10 participants après la phase de traitement de deux semaines à la néostigmine. Aucun participant n'a ressenti d'amélioration après la phase de placebo. Le manque de détail dans le rapport implique que le risque de biais était peu clair. Les événements indésirables étaient mineurs.
Traduction réalisée par Cochrane France