Messages clés
- Les antibiotiques intraveineux (administrés dans une veine) sont couramment utilisés pour traiter les poussées des symptômes de la mucoviscidose, mais l'hypothèse selon laquelle les exacerbations sont dues à davantage de bactéries dans les poumons a été remise en question.
- Nous avons évalué de nombreux antibiotiques différents en tant que médicaments pris seuls ou en combinant différents médicaments, ainsi que la manière dont ils ont été administrés (par voie intraveineuse, inhalée (inspirés à l'aide d'un aérosol) ou orale (par la bouche)). Nous n'avons trouvé aucune différence dans les résultats cliniques tels que le fonctionnement des poumons ou le délai avant l’exacerbation suivante entre tous les types de traitement, sauf pour les personnes qui ont répondu précocement au traitement, d’où une durée de traitement plus courte semble être appropriée.
Qu'est-ce que la mucoviscidose et que sont les exacerbations ?
La mucoviscidose est une maladie héréditaire dans laquelle le mucus produit par le corps est collant, ce qui affecte le fonctionnement de plusieurs organes du corps. Les poumons et les voies respiratoires sont probablement les organes les plus touchés chez les personnes atteintes de mucoviscidose. Le mucus collant rend difficile la toux et donc l’expectoration des bactéries (germes) qui peuvent provoquer des infections. On pense que cela peut entraîner des poussées de difficultés respiratoires, appelées exacerbations pulmonaires. Ces exacerbations peuvent être traitées avec des antibiotiques (médicaments qui tuent les bactéries), mais au fil du temps, les germes peuvent ne pas être complètement éliminés et les infections peuvent durer longtemps (chronique).
Que voulions-nous savoir ?
Nous voulions connaître les données probantes concernant la pratique actuelle consistant à utiliser des antibiotiques par voie intraveineuse (administrés directement dans une veine) pour traiter les personnes atteintes de mucoviscidose ayant une exacerbation. Nous voulions déterminer s'il était préférable d'administrer deux antibiotiques plutôt qu’un seul, et si une combinaison d'antibiotiques particulière était meilleure qu'une autre. Nous voulions également savoir si les antibiotiques en intraveineux étaient plus efficaces que les antibiotiques inhalés (inspirés à l'aide d'un aérosol) ou oraux (par la bouche) pour traiter les exacerbations pulmonaires chez les personnes atteintes de mucoviscidose.
Comment avons-nous procédé ?
Nous avons recherché des études portant sur des personnes atteintes de mucoviscidose qui étaient hospitalisées en raison d'une exacerbation et qui comparaient une cure de n'importe quelle dose d'antibiotiques par voie intraveineuse (soit un seul antibiotique, soit des combinaisons de plusieurs) à un placebo (traitement factice sans médicament actif), soit à d'autres antibiotiques par voie intraveineuse, inhalés ou oraux. Nous n'avons pas cherché d'études comparant différentes doses du même antibiotique.
Nous avons comparé et résumé les résultats des études et évalué leur niveau de données probantes en fonction de facteurs tels que la méthodologie et la taille des études.
Qu’avons-nous trouvé ?
Nous avons trouvé 45 études impliquant 2 810 personnes. La plupart des études étaient de petite taille, assez anciennes, et duraient entre trois et 15 jours. Souvent, elles n'ont pas fourni les informations que nous recherchions. Il y avait différents plans d'étude : certaines études comparaient soit des antibiotiques intraveineux seuls, soit une combinaison de différents antibiotiques intraveineux avec un placebo. Certaines études comparaient des antibiotiques intraveineux seuls à une combinaison d'antibiotiques intraveineux ou bien comparaient différentes combinaisons intraveineuses (différents médicaments ou différentes durées de traitement) ; d'autres études comparaient des antibiotiques intraveineux à des antibiotiques oraux ou inhalés.
Principaux résultats
Dans nos comparaisons, nous n'avons pas trouvé qu’un traitement plus qu’un autre (antibiotiques ou combinaisons d'antibiotiques) avait une supériorité sur l’amélioration de la fonction pulmonaire. Nous avons trouvé peu d'informations sur le délai avant la prochaine exacerbation et il n'y avait pas clairement de traitement qui soit meilleur. Une étude portant sur des personnes ayant répondu précocement au traitement a montré qu'une durée d'antibiotiques plus courte fonctionnait aussi bien qu'une durée plus longue. La seule étude sélectionnée concernant la qualité de vie n'a pas montré de différence entre les antibiotiques inhalés plus intraveineux comparé à une combinaison de deux antibiotiques différents en intraveineux. Les données probantes sur les effets indésirables n’étaient pas claires ; la plupart ont rapporté des effets indésirables liés à des problèmes digestifs ou hépatiques. Nous n'avons pas trouvé de données probantes de l'effet des différents traitements sur le poids corporel. Nous n’avons pas trouvé suffisamment de données probantes suggérant qu’une longue durée d’antibiothérapie serait plus efficace qu’une courte durée.
Quelles sont les limites des données probantes ?
Notre confiance dans les résultats des études incluses variait de élevée à très faible et de nombreuses études n'ont pas été entièrement rapportées. Certaines études ont inclus les participants plus d'une fois, ce qui a rendu difficile la comparaison des traitements. Par ailleurs, à plusieurs reprises il a été difficile de décider à partir des informations décrites si les études avaient été bien réalisées - notamment en ce qui concerne la façon dont les participants avaient été choisis et si les patients ou leurs médecins étaient en aveugle.
Ces données probantes sont-elles à jour ?
Il s’agit ici d’une mise à jour d'une revue déjà publiée. La dernière recherche de données probantes date du 19 juin 2024.
Les données probantes du bénéfice de l'administration d'antibiotiques IV pour les exacerbations pulmonaires dans la mucoviscidose sont souvent médiocres, en particulier en termes de taille des études et du risque de biais, en particulier dans les études plus anciennes. Nous ne savons pas s'il existe une différence entre des combinaisons d'antibiotiques spécifiques, et il n'existe pas non plus de données probantes suggérant une différence entre les antibiotiques IV, inhalés ou oraux. Il existe peu de données probantes indiquant que réduire la durée des antibiotiques chez les adultes répondant précocement au traitement, ferait une quelconque différence avec une durée plus longue de traitement. Il reste plusieurs questions sans réponse concernant quels seraient les schémas optimaux d’antibiothérapie IV.
La mucoviscidose est une maladie multi-systémique caractérisée par la production de sécrétions épaisses provoquant des infections pulmonaires récurrentes, souvent par des bactéries inhabituelles. Les antibiotiques intraveineux (IV) sont couramment utilisés dans le traitement de l'aggravation aiguë des symptômes (exacerbations pulmonaires) ; cependant, l'hypothèse selon laquelle les exacerbations seraient dues à l'augmentation de la charge bactérienne a récemment été remise en question. Il s’agit ici d’une mise à jour d'une revue déjà publiée.
Déterminer si les antibiotiques par voie intraveineuse utilisés dans le traitement des exacerbations pulmonaires chez les personnes atteintes de mucoviscidose permettent d’améliorer les résultats cliniques à court et à long terme.
Nous avons fait des recherches dans le registre des essais cliniques du groupe Cochrane sur la mucoviscidose, compilé à partir de recherches dans des bases de données électroniques ainsi que des recherches manuelles dans des revues papier et compte rendus de conférences. Nous avons également effectué des recherches dans les bibliographies des articles et autres revues pertinentes et dans des bases de données d'essais en cours.
Date de la dernière recherche dans le registre des essais Cochrane : 19 juin 2024.
Des essais contrôlés randomisés et la première phase d’étude de traitement croisées, comparant des antibiotiques par voie intraveineuse (seuls ou en association avec d'autres antibiotiques) par rapport à un placebo ou à des antibiotiques inhalés ou oraux chez des personnes atteintes de mucoviscidose présentant une exacerbation pulmonaire. Les études comparant différents schémas d'antibiotiques IV étaient également éligibles.
Les auteurs ont évalué l'admissibilité des études ainsi que les risques de biais, puis ont extrait des données. En utilisant GRADE, nous avons évalué le niveau de confiance dans les données probantes pour les critères de jugement valeur en % de la fonction pulmonaire prédictive (volume expiratoire maximal par seconde (VEMS 1 ) et capacité vitale forcée (CVF)), le délai avant l’exacerbation suivante et la qualité de vie.
Nous avons inclus 45 études portant sur 2 810 participants. Les études incluses étaient pour la plupart de petite taille et mal rapportées, et beaucoup étaient assez anciennes. Le niveau de confiance dans les données probantes était généralement faible.
Antibiothérapie intraveineuse combinée par rapport à placebo
Les données rapportées pour la variation absolue du % du VEMS 1 et de la CVF de prédiction suggèrent une amélioration possible due aux antibiotiques IV, mais ces données probantes sont très incertaines (1 étude, 12 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Cette étude n'a pas mesuré le délai avant l’exacerbation suivante ni la qualité de vie.
Antibiothérapie intraveineuse par rapport aux antibiotiques nébulisés
Cinq études (122 participants) ont rapporté le VEMS 1 , mais une seule comportait des données analysables (16 participants). Nous n'avons trouvé aucune différence entre les groupes (données probantes d’un niveau de confiance modéré). Trois études (91 participants) avaient des données sur la CVF, avec des données analysables provenant d'une seule étude (54 participants). Nous sommes très incertains quant à l'effet des antibiotiques nébulisés (données probantes d’un niveau de confiance très faible). Dans une étude, les 16 participants sous antibiotiques nébulisés plus IV avaient un nombre moyen de jours avant l’exacerbation suivante inférieur à ceux sous antibiotiques IV combinés (données probantes d’un niveau de confiance faible), mais nous n'avons trouvé aucune différence de qualité de vie entre les groupes (données probantes d’un niveau de confiance faible).
Antibiothérapie intraveineuse par rapport aux antibiotiques oraux
Trois études (172 participants) ont rapporté qu’il n’y avait aucune différence dans les différentes mesures de la fonction pulmonaire. Nous n'avons trouvé aucune différence parmi les données analysables entre les schémas d'antibiothérapie par voie intraveineuse ou orale, que ce soit en terme de % du VEMS 1 de prédiction ou du % de la CVF de prédiction (1 étude, 24 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible) ou concernant le délai avant l’exacerbation suivante (1 étude, 108 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Aucune de ces études n'a mesuré la qualité de vie.
Les schémas d'antibiotiques par voie intraveineuse comparés
Une étude (analysée sous forme de deux ensembles de données) a comparé la durée des schémas d'antibiotiques IV entre deux groupes (répartis en fonction de la réponse initiale aux antibiotiques). La première partie était une étude de non-infériorité portant sur 214 sujets répondant de façon précoce au traitement, afin d'établir si un traitement antibiotique IV de 10 jours était tout aussi efficace que 14 jours. Deuxièmement, les chercheurs ont cherché à savoir si 14 ou bien 21 jours d'antibiotiques IV étaient plus efficaces pour les 705 participants ne répondant pas précocement au traitement. Nous n'avons trouvé aucune différence concernant le % de VEMS 1 de prédiction quelle que soit la durée du traitement (919 participants ; données probantes d’un niveau de confiance élevé) ou pour le délai avant l’exacerbation suivante (informations tirées ultérieurement des données du registre). Les enquêteurs n'ont pas questionné la CVF ou la qualité de vie.
Autres comparaisons
Nous avons également constaté peu ou pas de différence dans la fonction pulmonaire en comparant des schémas antibiotiques IV uniques à un placebo (2 études, 70 participants), ou dans la fonction pulmonaire et le délai jusqu'à la prochaine exacerbation en comparant différents schémas antibiotiques uniques (2 études, 95 participants). Il pourrait y avoir une plus grande amélioration de la fonction pulmonaire chez les participants recevant des antibiotiques IV combinés par rapport aux antibiotiques IV uniques (6 études, 265 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible), mais probablement pas de différence concernant le délai avant l’exacerbation suivante (1 étude, 34 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Quatre études comparaient un seul antibiotique IV associé à un placebo par rapport à une combinaison d'antibiotiques IV, avec de hauts niveaux d'hétérogénéité dans les résultats. Nous sommes très incertains concernant la différence entre les groupes en ce qui concerne la fonction pulmonaire (4 études, 214 participants) et il pourrait n’y avoir peu ou pas de différence à propos du fait d’être réadmis à l'hôpital pour une exacerbation (2 études, 104 participants). Neuf études (417 participants) ont comparé les schémas combinés d'antibiotiques IV avec une grande variété de médicaments. Nous n'avons identifié aucune différence dans aucune mesure de la fonction pulmonaire ou du délai avant l’exacerbation suivante entre les différents régimes (données probantes d’un niveau de confiance très faible).
Les résultats des événements indésirables étaient mitigés pour toutes les comparaisons ; les effets indésirables courants comprenaient une élévation des valeurs des tests de la fonction hépatique, des événements gastro-intestinaux et des anomalies hématologiques. Les données étaient limitées pour d'autres critères de jugement secondaires, tels que le poids, et il n'y avait pas de données probantes sur l'effet escompté du traitement.
Traduction et Post-édition réalisées par Cochrane France avec le soutien de Céline Charles (bénévole chez Cochrane France) et grâce au financement du Ministère de la Santé. Une erreur de traduction ou dans le texte original ? Merci d’adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr