Contexte
La chirurgie joue un rôle clé dans la gestion de nombreux types de tumeurs cérébrales. Il est très important d'enlever le plus de tumeur possible, car dans certains types de tumeurs cérébrales, cela peut aider les personnes à vivre plus longtemps et à se sentir mieux. Cependant, l'ablation d'une tumeur cérébrale peut être difficile parce que la tumeur ressemble à du tissu cérébral normal ou se trouve à proximité d’un tissu cérébral nécessaire à un fonctionnement normal. De nouvelles méthodes de visualisation des tumeurs pendant l'opération (appelées imagerie) ont été mises au point pour aider les chirurgiens à mieux distinguer les tumeurs des tissus cérébraux normaux.
Questions
La chirurgie guidée par imagerie est-elle plus efficace pour retirer les tumeurs cérébrales que la chirurgie sans guidage par imagerie ?
Une technologie ou un outil de guidage par imagerie est-il meilleur qu'un autre ?
Caractéristiques des études
Notre stratégie de recherche est à jour jusqu’en mai 2020. Nous avons trouvé quatre essais examinant trois outils différents pour aider à améliorer la quantité de tumeur qui est retirée. La tumeur évaluée était un gliome. Les interventions d'imagerie utilisées lors des opérations chirurgicales étaient notamment :
- l'imagerie par résonance magnétique pendant l'opération pour évaluer la quantité de tumeur restante ;
- un colorant fluorescent pour marquer la tumeur (acide 5-aminolévulinique) ;
- l'imagerie avant l'opération pour déterminer l'emplacement d'une tumeur, qui a ensuite été utilisée au moment de l'opération pour guider celle-ci (neuronavigation) ; ou
- l'imagerie par échographie pendant l'opération pour évaluer la quantité de tumeur restante.
Toutes les études avaient des méthodes compromises, ce qui pourrait signifier que leurs conclusions étaient biaisées. Certaines études ont été financées par les fabricants de la technologie de guidage par imagerie en cours d'évaluation. Nous avions l'intention d'utiliser une forme d'analyse appelée méta-analyse en réseau (qui peut incorporer des comparaisons d'interventions même si elles n'ont pas été directement comparées dans le cadre d'essais) pour comparer chacune de ces interventions et identifier quelle technologie unique pourrait être la meilleure.
Principaux résultats
Nous avons trouvé des données probantes d’un niveau de confiance faible à très faible indiquant que l'utilisation de la chirurgie guidée par imagerie pourrait entraîner l'ablation d'une plus grande partie de la tumeur chez certaines personnes. Les effets neurologiques à court et à long terme sont incertains. Nous ne disposions pas des données nécessaires pour déterminer si l'une des technologies évaluées affectait la survie globale, le temps jusqu’à progression de la maladie ou la qualité de vie. Les données probantes concernant la neuronavigation étaient d’un niveau de confiance très faible sur tous les critères de jugement dans un très petit essai, et nous n'avons pas identifié d’essai sur le guidage par échographie. Nous n'avons pas été en mesure de réaliser une méta-analyse en réseau pour comparer les interventions d'imagerie. En termes de coûts, par rapport à la chirurgie standard, nous ne connaissons pas les effets sur les coûts de l'utilisation de la chirurgie guidée par imagerie et l'acide 5-aminolévulinique était plus coûteux que la chirurgie conventionnelle.
Qualité des données probantes
Les données probantes sur l'utilisation de la technologie d'imagerie peropératoire dans l'ablation des tumeurs cérébrales sont rares et d’un niveau de confiance faible à très faible. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour évaluer trois questions principales :
- L'ablation d'une plus grande partie de la tumeur est-elle meilleure pour le patient à long terme ?
- Quels sont les risques d'aggravation des symptômes d'un patient en retirant une plus grande partie de la tumeur ?
- Comment la résection affecte-t-elle la qualité de vie d'un patient ?
Les technologies d'imagerie peropératoire, en particulier le 5-ALA et l'IRM peropératoire, pourraient être utiles pour maximiser l'étendue de la résection chez les participants atteints d'un gliome de haut grade. Toutefois, cette affirmation se fonde sur des données probantes d’un niveau de confiance très faible à faible. Par conséquent, les effets neurologiques à court et à long terme ne sont pas connus. Les effets de la chirurgie guidée par imagerie sur la survie globale, la survie sans progression et la qualité de vie ne sont pas clairs. Les méta-analyses en réseau et traditionnelles n'ont pas été possibles en raison du risque élevé de biais, de l'hétérogénéité et des petits essais inclus dans cette revue. Un bref commentaire économique a trouvé des données probantes économiques limitées quant à l'utilisation équivoque de l'IRM peropératoire par rapport à la chirurgie conventionnelle. En termes de coûts, une revue non systématique des études économiques a suggéré que, par rapport à la chirurgie standard, l'utilisation de la chirurgie guidée par imagerie avait un effet incertain sur les coûts et que le 5-ALA était plus coûteux. Des recherches supplémentaires, y compris l'achèvement des essais en cours sur la chirurgie guidée par ultrasons, sont nécessaires.
De nombreuses études ont identifié la pertinence pronostic de l'étendue de la résection dans la gestion des gliomes. Différentes technologies peropératoires sont apparues ces dernières années avec une efficacité comparative inconnue quant à l’optimisation de l'étendue de la résection. Une précédente revue Cochrane avait fourni des données probantes d’un niveau de confiance faible à très faible sur des analyses d'essais uniques et la synthèse des résultats n'avait pas été possible. Le rôle de la technologie peropératoire dans la maximisation de l'étendue de la résection reste incertain. En raison des multiples technologies complémentaires disponibles, cette question de recherche se prête à une approche méthodologique de méta-analyse en réseau.
Établir l'efficacité comparative et le profil de risque de technologies d'imagerie peropératoire spécifiques en utilisant une méta-analyse en réseau et identifier les analyses de coûts et les évaluations économiques dans le cadre d'un bref commentaire économique.
Nous avons cherché dans CENTRAL (2020, numéro 5), MEDLINE via Ovid jusqu'à la semaine 2 de mai 2020, et Embase via Ovid jusqu'à la semaine 20 de 2020. Nous avons effectué une recherche rétrospective à partir des références de toutes les études identifiées. Nous avons effectué une recherche manuelle dans deux revues, Neuro-oncology et le Journal of Neuro-oncology, de 1990 à 2019, y compris dans tous les résumés de conférences. Enfin, nous avons contacté des experts reconnus en neuro-oncologie pour identifier toute étude éligible supplémentaire et obtenir des informations sur les essais contrôlés randomisés (ECR) en cours.
ECR évaluant des personnes de tout âge présentant des tumeurs gliales présumées nouvelles ou en récidive (de toute localisation ou histologie) à partir d'un examen clinique et d'une imagerie (tomodensitométrie (TDM) ou imagerie par résonance magnétique (IRM), ou les deux). Les modalités d'imagerie supplémentaires (par exemple, la tomographie par émission de positrons, la spectroscopie par résonance magnétique) n'étaient pas obligatoires. Les interventions comprenaient la chirurgie guidée par fluorescence, l'échographie peropératoire, la neuronavigation (avec ou sans traitement d'image supplémentaire, par exemple la tractographie) et l'IRM peropératoire.
Deux auteurs de la revue ont évalué, de manière indépendante, la pertinence des résultats de la recherche, ont procédé à une évaluation critique selon des recommandations connues et ont extrait les données à l'aide d'un pro forma préétabli.
Nous avons identifié quatre ECR, utilisant différentes technologies d'imagerie peropératoire : l'IRM peropératoire (2 essais, avec 58 et 14 participants) ; la chirurgie guidée par fluorescence avec l'acide 5-aminolévulinique (5-ALA) (1 essai, 322 participants) ; et la neuronavigation (1 essai, 45 participants). Nous avons identifié un essai en cours évaluant l'IRM peropératoire avec un échantillon prévu de 304 participants dont les résultats devraient être publiés vers l'hiver 2020. Nous n'avons pas identifié d’essai publié sur l'échographie peropératoire.
Les méta-analyses en réseau ou les méta-analyses traditionnelles n'étaient pas appropriées en raison de l'absence d'essais homogènes entre les technologies d'imagerie. Parmi les essais inclus, il y avait une hétérogénéité notable dans la localisation des tumeurs et les technologies d'imagerie utilisées dans les bras témoins. Le risque de biais dans toutes les études incluses a suscité des inquiétudes importantes.
Un essai sur l’IRM peropératoire a révélé une augmentation de l'étendue de la résection (le risque relatif (RR) pour une résection incomplète était de 0,13, l'intervalle de confiance (IC) à 95 % de 0,02 à 0,96 ; 49 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible) et un essai sur le 5-ALA (le RR pour une résection incomplète était de 0,55, l'IC à 95 % de 0,42 à 0,71 ; 270 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible). L'autre essai évaluant l'IRM peropératoire a été arrêté prématurément après une analyse intermédiaire non planifiée incluant 14 participants ; par conséquent, l'essai a fourni des données probantes d’un niveau de confiance très faible. L'essai de neuronavigation a fourni des données insuffisantes pour évaluer les effets sur l'étendue de la résection.
Le détail des effets indésirables était incomplet et suggérait un biais de notification important (données probantes d’un niveau de confiance très faible). Dans l'ensemble, la proportion d'évènements rapportés était faible dans la plupart des essais, créant par conséquent des problèmes de puissance (statistique) pour détecter des différences entre les critères de jugement (qui pourraient ou non avoir été présentes). Le critère de jugement de la survie n'a pas été correctement rapporté, bien qu'un essai ait rapporté l’absence de données probantes concernant l’amélioration de la survie globale avec le 5-ALA (rapport des risques instantanés (hazard ratio, HR) 0,82, IC à 95 % 0,62 à 1,07 ; 270 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Les données relatives à la qualité de vie n'étaient disponibles que pour une seule étude et il y avait un biais d'attrition important (données probantes d’un niveau de confiance très faible).
Post-édition effectuée par Julia Caratini et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr