Les personnes atteintes de maladies ou de traumatismes du système nerveux central ont un risque beaucoup plus élevé de perte de contrôle de l'intestin et de constipation sévère que d'autres personnes. On parle alors de dysfonction intestinale neurogène (« intestin neurogène »). Il peut être très difficile de traiter la constipation sans causer de fuites de l'intestin ou, à l'inverse, de prévenir les fuites de l'intestin sans entraîner la constipation. Le temps passé au vidage de l'intestin est presque toujours beaucoup plus important chez ces personnes. De tels problèmes de l'intestin provoquent beaucoup d'anxiété et de détresse et peuvent réduire la qualité de vie des personnes qui en souffrent. Cette revue des recherches sur l'intestin neurogène pourrait avoir un intérêt pour toute personne atteinte de lésions du système nerveux central causées par maladie ou traumatisme, ou présentes à la naissance, ayant un impact à long terme sur le fonctionnement de l'intestin.
Tandis qu'il existe une grande quantité d'informations sur les causes de l'intestin neurogène, peu d'études portent sur les façons de gérer ce problème dans la pratique. Actuellement, les conseils habituels sont d'avoir un bon apport de liquides, un régime alimentaire équilibré, autant d'exercice physique que possible et une routine intestinale régulière et planifiée. Cette dernière peut inclure l'utilisation de médicaments laxatifs oraux ou suppositoires ou des lavements ; des massages abdominaux ; la stimulation rectale digitale et l'évacuation manuelle de selles. Les mesures utilisées dépendront des besoins de chaque individu et il est généralement nécessaire de procéder par essais et erreurs dans un certain degré pour arriver à une routine satisfaisante.
Seules les études de recherche dans lesquelles les participants étaient assignés aléatoirement (une procédure appelée randomisation) soit dans le groupe témoin (ne recevant aucune intervention ou les soins habituels), soit dans le groupe de traitement, ont été incluses dans cette revue car ces études fournissent les preuves les plus fiables. Quinze nouvelles études ont été ajoutées dans cette mise à jour. Cinq ont été retirées parce que les médicaments sur lesquels portaient ces études (le cisapride et le tegaserod) ont depuis été retirés du marché et ne sont plus disponibles. La plupart des 20 études randomisées dans cette revue avaient un nombre très réduit de participants et les rapports d'étude ne donnaient par toujours les informations nécessaires pour s'assurer que les découvertes de l'étude étaient fiables.
Certains laxatifs oraux ont amélioré la fonction intestinale, y compris le psyllium, un laxatif de lest augmentant le volume des selles (une étude), et un macrogol isosmotique (une étude), tous les deux étudiés chez des personnes atteintes de la maladie de Parkinson. Certains suppositoires et microlavements utilisés pour aider l'intestin à s'ouvrir produisaient des résultats plus rapidement que d'autres (trois études) et le moment d'utilisation du suppositoire pourrait avoir un impact sur la réponse de l'intestin (une étude). L'évacuation manuelle de selles peut être plus efficace que les médicaments par voie orale ou rectale (une étude). L'utilisation de l'irrigation transanale chez des personnes souffrant de lésions de la moelle épinière a amélioré le contrôle de l'intestin, la constipation et les mesures de la qualité de vie (une étude). Trois études indiquaient que le massage abdominal était utile pour réduire la constipation. Une étude a découvert que les patients pourraient bénéficier même d'un contact éducatif unique avec un infirmier.
Cette revue montre qu'il existe toujours extrêmement peu de recherches sur ce problème courant qui est très important du point de vue des patients. Les preuves issues de la recherche identifiées dans la revue sont généralement très médiocres, car la manière dont les études ont été réalisées et documentées signifie que les résultats ne sont pas fiables. Il n'est pas possible de formuler des recommandations pour les soins sur la base de ces études. Il faudra continuer à procéder par essais et erreurs pour la prise en charge de l'intestin neurogène jusqu'à ce que d'autres études de bonne qualité portant sur un plus grand nombre de participants et examinant les plus importants aspects de ce problème soient effectuées.
Il existe toujours extrêmement peu de recherches sur cette question de prise en charge intestinale, pourtant fréquente et très significative pour les patients. Les preuves disponibles sont presque uniformément de faible qualité méthodologique. La signification clinique de certains des résultats de recherche présentés ici est difficile à interpréter, notamment parce que chaque intervention a été examinée uniquement dans des essais individuels et comparée à un témoin plutôt qu'à d'autres interventions, et parce que les interventions sont très différentes les unes des autres.
Il y avait des preuves très limitées issues d'essais individuels en faveur d'un laxatif de lest (psyllium), d'un laxatif de macrogol isosmotique, du massage abdominal, de la stimulation électrique et de l'association de médicaments anticholinestérasique et anticholinergique (néostigmine-glycopyrrolate), par rapport à l'absence de traitement ou aux groupes témoins. Il y avait également des preuves en faveur de l'irrigation transanale (par rapport à la prise en charge classique), de la consommation d'eau gazeuse (plutôt que de l'eau du robinet) et du massage abdominal avec des conseils sur le mode de vie (par rapport à des conseils sur le mode de vie seuls). Cependant, ces résultats doivent être confirmés par des essais contrôlés bien planifiés et à plus grande échelle qui devraient inclure une évaluation de l'acceptabilité de l'intervention pour les patients et de l'effet sur leur qualité de vie.
Les personnes atteintes de pathologies ou de traumatismes du système nerveux central ont un risque beaucoup plus élevé d'incontinence fécale et de constipation que la population générale. La ligne de partage entre ces deux symptômes est souvent fine, toute initiative visant à améliorer l'un risquant de précipiter l'autre. Les problèmes intestinaux occasionnent beaucoup d'anxiété et peuvent réduire la qualité de vie chez ces personnes. La prise en charge de l'intestin est à l'heure actuelle en grande partie empirique, les recherches disponibles étant restreintes. Ceci est une mise à jour d'une revue Cochrane publiée pour la première fois en 2001 puis mise à jour en 2003 et 2006. Cette revue est pertinente pour les personnes atteintes de pathologies touchant directement et de manière chronique le système nerveux central (post-traumatiques, dégénératives, ischémiques ou néoplasiques), telles que la sclérose en plaques, les lésions médullaires, les maladies cérébrovasculaires, la maladie de Parkinson et la maladie d'Alzheimer.
Déterminer les effets des stratégies de prise en charge de l'incontinence fécale et de la constipation chez les personnes souffrant d'une pathologie ou d'un traumatisme neurologique touchant le système nerveux central.
Nous avons effectué des recherches dans le registre des essais du groupe Cochrane sur l'incontinence (le 8 juin 2012), qui inclut des recherches dans le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), MEDLINE et MEDLINE In-Process ainsi que des recherches manuelles dans les journaux et actes de conférence, et toutes les références bibliographiques des articles pertinents.
Les essais randomisés et quasi randomisés évaluant tout type d'intervention conservatrice ou chirurgicale pour la prise en charge de l'incontinence fécale et de la constipation chez les personnes atteintes d'une pathologie ou d'un traumatisme du système nerveux central ont été sélectionnés. Les thérapies spécifiques pour le traitement des maladies neurologiques ayant un effet indirect sur la dysfonction intestinale ont également été prises en compte.
Au moins deux auteurs de la revue ont indépendamment évalué les risques de biais des essais éligibles et extrait les données des essais inclus en utilisant un éventail de mesures de résultat prédéfinies.
Vingt essais portant sur 902 personnes ont été inclus.
Médicaments oraux
Des preuves provenant d'essais individuels de petite taille indiquaient que les personnes atteintes de la maladie de Parkinson présentaient une amélioration statistiquement significative dans le nombre de selles ou de routines de soins de l'intestin réussies par semaine en comparant l'utilisation de fibres (psyllium) (différence moyenne (DM) -2,2 selles, intervalle de confiance (IC) à 95 % -3,3 à -1,4) ou un laxatif oral (solution électrolytique de macrogol isosmotique) (DM 2,9 selles par semaine, IC à 95 % 1,48 à 4,32) par rapport à un placebo. Un essai chez des personnes souffrant de lésions médullaires a montré une amélioration statistiquement significative du temps total consacré aux soins de l'intestin en comparant l'association de néostigmine et de glycopyrrolate (anticholinestérasique plus anticholinergique) administrée par voie intramusculaire à un placebo (DM 23,3 minutes, IC à 95 % 4,68 à 41,92).
Cinq études rapportaient sur l'utilisation du cisapride et du tegaserod chez des personnes atteintes de lésion médullaire ou de maladie de Parkinson. Ces médicaments ont depuis été retirés du marché en raison d'effets indésirables ; n'étant plus disponibles, ils ont été retirés de cette revue.
Stimulants rectaux
Un essai de petite taille chez des personnes atteintes de lésion médullaire comparait deux suppositoires de bisacodyl, un à base de polyéthylène glycol (PEG) et l'autre à base d'huile végétale hydrogénée (HVH). Cet essai a trouvé que les suppositoires de bisacodyl à base de PEG réduisaient de façon significative, par rapport aux suppositoires de bisacodyl à base d'HVH, le temps de défécation moyen (PEG 20 minutes versus HVH 36 minutes, P < 0,03) et le temps total moyen consacré aux soins de l'intestin (PEG 43 minutes versus HVH 74,5 minutes, P < 0,01).
Interventions physiques
Des preuves issues d'un petit essai avec 31 participants indiquaient que le massage abdominal améliorait statistiquement le nombre de selles chez des personnes ayant subi un AVC par rapport à l'absence de massage (DM 1,7 selles par semaine, IC à 95 % 2,22 à 1,18). Un petit essai de faisabilité portant sur 30 personnes atteintes de sclérose en plaques a également trouvé des preuves en soutien de l'utilisation de massages abdominaux. Les scores de constipation étaient statistiquement meilleurs pendant le traitement avec le massage abdominal, même si cela n'a pas été corroboré par un changement dans les mesures de résultats (par exemple le score NBD de la dysfonction intestinale neurogène).
Un essai de petite taille chez des personnes souffrant de lésions médullaires a montré une amélioration statistiquement significative du temps total consacré aux soins de l'intestin en utilisant la stimulation électrique des muscles de l'abdomen par rapport à l'absence de stimulation électrique (DM 29,3 minutes, IC à 95 % 7,35 à 51,25).
Des preuves issues d'un essai présentant un faible risque de biais indiquaient que, pour des personnes souffrant de lésions médullaires, l'irrigation transanale, en comparaison avec les soins de l'intestin classiques, apportait une amélioration statistique des scores de constipation, de NBD et d'incontinence fécale ainsi que du temps total consacré aux soins de l'intestin (DM 27,4 minutes, IC à 95 % 7,96 à 46,84). Les patients étaient également plus satisfaits avec cette méthode.
Autres interventions
Dans un essai chez des patients victimes d'AVC, il semblait y avoir un bénéfice à court terme (moins de six mois) pour les patients en termes de nombre de selles par semaine avec une intervention éducative ponctuelle par des infirmiers (évaluation infirmière structurée débouchant sur l'éducation ciblée par rapport aux soins standard), mais il n'a pas persisté à 12 mois. Un essai chez des personnes souffrant de lésions médullaires a trouvé qu'un protocole par étapes ne réduisait pas le besoin de laxatifs oraux et d'évacuation manuelle de selles.
Enfin, un dernier essai rapporté sous forme de résumé montrait que la consommation d'eau gazeuse (plutôt que de l'eau du robinet) améliorait les scores de constipation chez des personnes ayant eu un AVC.