Objectif
Nous voulions déterminer si les cultures quantitatives de sécrétions respiratoires sont efficaces pour réduire la mortalité chez les patients immunocompétents atteints de pneumonie sous ventilation assistée, comparativement aux cultures qualitatives. Nous avons également évalué les changements au niveau de l'utilisation des antibiotiques et des durées de séjour en unité de soins intensifs (USI) et sous ventilation mécanique.Contexte
La pneumonie sous ventilation assistée (PVA) est une infection contractée par des patients ventilés mécaniquement depuis plus de 48 heures, qui peut accroitre significativement la mortalité des patients en USI. La meilleure méthode pour diagnostiquer la PVA et identifier l'organisme pathogène (bactérie) reste à déterminer. Des échantillons de sécrétions respiratoires, obtenus tant par des techniques invasives que non invasives, peuvent être analysés quantitativement (une valeur seuil de croissance bactérienne permettant de distinguer entre infection et colonisation des voies respiratoires inférieures) ou qualitativement (présence ou absence de germes pathogènes dans la culture). On utilise des cultures quantitatives de sécrétions respiratoires prélevées sur des patients atteints de PVA afin de distinguer les micro-organismes infectieux (ceux ayant une concentration plus élevée) des organismes colonisateurs (ceux à faible concentration) et optimiser ainsi l'antibiothérapie.
Caractéristiques des études
Après avoir examiné 5 064 articles, nous avons trouvé trois essais contrôlés randomisés (ECR) (1 240 participants) comparant des méthodes invasives utilisant des cultures quantitatives, par rapport à la méthode non invasive utilisant des cultures qualitatives. Deux ECR supplémentaires (127 participants) comparaient des méthodes invasives et non invasives utilisant toutes deux des cultures quantitatives. Nous avons combiné les cinq ECR (1 367 participants) afin de comparer les interventions invasives et non invasives de diagnostic de la PVA.
Principaux résultats
Sur la durée des essais, la mortalité toutes causes cumulée était de 25,4 % (159/626) dans le groupe qualitatif et de 23,1 % (142/614) dans le groupe quantitatif. Aucune différence statistiquement significative n'a été observée entre l'utilisation de cultures quantitatives et qualitatives (risque relatif (RR) de 0,91 ; intervalle de confiance (IC) à 95 % de 0,75 à 1,11). Lorsque nous avons analysé les cinq études, un total de 1 367 patients ont été inclus. Sur la durée des essais, la mortalité toutes causes cumulée était de 26,6 % (184/692) dans le groupe non invasif et de 24,7 % (167/675) dans le groupe invasif. L'analyse des interventions invasives versus non invasives ne montrait aucune preuve de réduction de la mortalité (RR 0,93 ; IC à 95 % de 0,78 à 1,11). Les données d'essais combinées n'ont pas montré d'influence significative sur le changement d'antibiotique, mais il y avait une hétérogénéité significative entre les études et l'analyse du biais de publication pour l'analyse du changement d'antibiotique suggère qu'un biais de publication important est probable (régression d'Egger (interception : 1,909 ; erreur standard : 0,436 ; valeur P (deux faces) : 0,048). L'analyse n'a pas montré de différences significatives dans le nombre de jours sous ventilation mécanique et la durée de séjour en USI, ni entre les groupes de cultures quantitatives versus qualitatives, ni entre les groupes de méthode invasive versus non invasive.
Qualité des preuves
Le corpus de preuves permet des conclusions modérément robustes concernant l'objectif de notre revue. Nous utilisons le terme « modérément » parce que l'échantillon était de taille modérée, même s'il s'agissait de l'échantillon le plus important évalué à ce jour : cinq ECR avec un total de 1 367 participants. Les résultats étaient cohérents sur les critères de la mortalité et du nombre de jours sous ventilation et en USI. Cependant, les résultats étaient moins cohérents en matière de changement d'antibiotique.
Conclusion
Les preuves issues des essais inclus dans cette revue indiquent qu'il n'y a aucun avantage clinique à utiliser des cultures quantitatives plutôt que qualitatives, ni à utiliser des approches diagnostiques invasives plutôt que non invasives. Les preuves sont à jour jusqu'à octobre 2014.
Il n'existe aucune preuve que l'utilisation de cultures quantitatives de sécrétions respiratoires ait pour résultat une moindre mortalité, une réduction du séjour en USI ou sous ventilation mécanique, ou un taux plus élevé de changement d'antibiotiques par rapport aux cultures qualitatives chez les patients atteints de PVA. Des résultats similaires ont été observés lorsque des stratégies invasives étaient comparées à des stratégies non invasives.
La pneumonie sous ventilation assistée (PVA) est une maladie infectieuse fréquente dans les unités de soins intensifs (USI). La meilleure approche diagnostique pour résoudre cette affection reste incertaine.
Évaluer si les cultures quantitatives de sécrétions respiratoires et les stratégies invasives sont efficaces pour réduire la mortalité chez les patients immunocompétents atteints de PVA, comparativement aux cultures qualitatives et aux stratégies non invasives. Nous avons également examiné les changements au niveau de l'utilisation des antibiotiques et des durées de séjour en USI et sous ventilation mécanique.
Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL (2014, numéro 9), MEDLINE (de 1966 à la deuxième semaine d'octobre 2014), EMBASE (de 1974 à octobre 2014) et LILACS (de 1982 à octobre 2014).
Des essais contrôlés randomisés (ECR) comparant des échantillons respiratoires traités quantitativement ou qualitativement, obtenus par des méthodes invasives ou non-invasives chez des patients immunocompétents atteints de PVA, et où les essais ont analysé l'impact de ces méthodes sur l'utilisation d'antibiotiques et sur les taux de mortalité.
Deux auteurs ont passé en revue de manière indépendante les essais identifiés dans les résultats de recherche et évalué la pertinence, la méthodologie et la qualité des études. Nous avons analysé les données au moyen du logiciel Review Manager. Nous avons regroupé les études incluses afin d'obtenir le risque relatif (RR) pour la mortalité et le changement d'antibiotique avec des intervalles de confiance (IC) à 95 %.
Sur les 5 064 références identifiées dans les bases de données électroniques (605 lors de la recherche mise à jour en octobre 2014), cinq ECR (1 367 patients) répondaient aux critères d'inclusion. Trois études comparaient des méthodes invasives utilisant des cultures quantitatives par rapport à des méthodes non invasives utilisant des cultures qualitatives ; nous les avons utilisées pour répondre à l'objectif principal de cette revue. Les deux autres études comparaient des méthodes invasives et non invasives utilisant toutes deux des cultures quantitatives. Nous avons combiné les cinq études afin de comparer les interventions invasives et non invasives de diagnostic de la PVA. Les études ayant comparé les cultures quantitatives et qualitatives (1 240 patients) n'ont mis en évidence aucune différence statistiquement significative dans les taux de mortalité (RR 0,91 ; IC à 95 % 0,75 à 1,11). L'analyse de l'ensemble des cinq ECR a montré qu'il n'y avait pas de preuves d'une réduction de la mortalité dans le groupe invasif versus le groupe non invasif (RR 0,93 ; IC à 95 % 0,78 à 1,11). Il n'y avait pas de différence significative entre les interventions concernant le nombre de jours sous ventilation mécanique, la durée du séjour en USI ou le changement d'antibiotique.
Traduction réalisée par Cochrane France