Question de la revue
Nous avons examiné les preuves concernant l'effet du facteur de croissance endothélial antivasculaire (anti-VEGF, pour Anti-Vascular Endothelial Growth Factor) chez les personnes présentant un œdème maculaire secondaire à l'occlusion de la veine centrale de la rétine (OVCR).
Contexte
L'OVCR affecte environ une personne sur 1 000 à tout moment, et sa fréquence augmente avec l'âge, une pression artérielle élevée, le diabète, le glaucome et diverses maladies du sang. Elle provoque fréquemment une perte soudaine et indolore de la vue d'un œil, mais parfois la perte de la vision peut être minime. Si l'obstruction veineuse est responsable d’un apport insuffisant en oxygène dans le tissu rétinien sensible, l'OVCR est du sous-type « non-perfusé » ou « ischémique aigu ». Plus fréquemment, le débit sanguin et l'apport en oxygène sont rétablis à la suite de l’épisode d'obstruction veineuse et l'OVCR est du sous-type « perfusé » ou « non ischémique », et a un meilleur pronostic visuel. Diverses autres complications peuvent se développer au fil des heures, jours, semaines ou mois. Elles comprennent l'œdème maculaire, dans lequel du liquide s'accumule au sein de la rétine et provoque une baisse de la vision. Jusqu'à relativement récemment, il n'y avait pas de traitement fondé sur des preuves pour cette affection. Des agents anti-VEGF ont été utilisés avec succès pour traiter des patients atteints d'autres maladies vasculaires rétiniennes, dont plusieurs pathologies associées à un œdème maculaire.
Les caractéristiques de l’étude
Cette revue systématique a identifié six essais qui incluaient 937 participants présentant un œdème maculaire secondaire à une OVCR (au 29 octobre 2013). Les essais avaient comparé des injections simulées avec l'un des quatre types d'agents anti-VEGF : l'aflibercept (VEGF Trap-Eye, Eylea), le bevacizumab (Avastin), le pegaptanibest de sodium (Macugen) et le ranibizumab (Lucentis). Dans tous les essais, les participants ont été traités pendant au moins six mois. Trois essais étaient multicentriques et internationaux et trois ont été réalisés en Norvège, en Suède ou aux États-Unis.
Résultats principaux
Dans l'ensemble, le traitement aux agents anti-VEGF a augmenté les chances d'une amélioration significative de la vision (au moins 3 lignes sur le tableau optométrique) à six mois d’un facteur de plus de deux fois et demi, par rapport à l'absence de traitement. En outre, le risque de perte significative de la vision (au moins 3 lignes sur le tableau optométrique) a été réduit de 80 % chez les personnes recevant un traitement aux anti-VEGF par rapport à ceux ne recevant aucun traitement. Aucun problème significatif concernant l'innocuité du traitement n’a été identifié à six ou à 12 mois, mais les études disponibles ne permettent pas de conclure quant à leur efficacité et leur innocuité à long terme. Néanmoins, la disponibilité des anti-VEGF pour le traitement de l'œdème maculaire secondaire à l’OVCR représente une avancée importante dans les options de prise en charge clinique de cette pathologie qui menace la vision.
Qualité des preuves
Les six essais inclus dans cette revue étaient de qualité élevée et ont clairement démontré le bénéfice visuel des injections anti-VEGF.
Par rapport à l'absence de traitement, l'injection intravitréenne répétée d'agents anti-VEGF améliore le pronostic visuel à six mois des patients atteints d'OVCR avec un œdème maculaire. Tous les agents étaient relativement bien tolérés avec une faible incidence d'effets indésirables à court terme. Les futurs essais devront examiner l'efficacité et l'innocuité relatives des agents anti-VEGF et d'autres traitements, y compris l'injection intravitréenne de corticostéroïdes, pour les résultats à plus long terme.
L'occlusion de la veine centrale de la rétine (OVCR) est une pathologie vasculaire rétinienne relativement fréquente au cours de laquelle un œdème maculaire peut se développer, avec une baisse consécutive de l'acuité visuelle. Jusqu'à récemment, aucun traitement n’avait pu prouver un effet bénéfique, mais de plus en plus de preuves sont favorables à l'utilisation d’agents à base de facteur de croissance endothélial antivasculaire (anti-VEGF, pour Anti-Vascular Endothelial Growth Factor).
Examiner l'efficacité et l'innocuité des traitements par anti-VEGF pour le traitement de l'œdème maculaire secondaire à une OVCR.
Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL (qui contient le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL) et le registre des essais du groupe Cochrane sur l'ophtalmologie) (Bibliothèque Cochrane 2013, numéro 10), Ovid MEDLINE (de janvier 1950 à octobre 2013), EMBASE (de janvier 1980 à octobre 2013), LILACS (Latin American and Caribbean Health Sciences Literature Database) (de janvier 1982 à octobre 2013), CINAHL (Cumulative Index to Nursing and Allied Health Literature) (de janvier 1937 à octobre 2013), OpenGrey, OpenSIGLE (de janvier 1950 à octobre 2013), le méta-registre des essais contrôlés (mREC) (www.controlled-trials.com), ClinicalTrials.gov (www.clinicaltrials.gov), le système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) de l'OMS (www.who.int/ictrp/search/en) et CPCI-S (Web of Science Conference Proceedings Citation Index). Aucune restriction concernant la langue ou la date n'a été appliquée aux recherches électroniques d'essais. La dernière recherche des bases de données électroniques et des registres d'essais cliniques a été effectuée le 29 octobre 2013.
Nous avons pris en compte les essais contrôlés randomisés (ECR) ayant comparé des agents anti-VEGF intravitréens, quelque soit la dose ou la durée, à une injection simulée ou à l'absence de traitement. Nous avons privilégié les études ayant inclus des individus indépendamment de l’âge ou du sexe et ayant réalisé un suivi d'au moins six mois.
Deux auteurs de la revue ont évalué la qualité méthodologique des essais et extrait des données de manière indépendante. Le critère de jugement principal était la proportion de participants présentant un gain de la meilleure acuité visuelle corrigée (MAVC) par rapport aux valeurs initiales supérieure ou égale à 15 lettres (3 lignes) sur le tableau de l'étude Early Treatment of Diabetic Retinopathy Study (ETDRS). Les critères de jugement secondaires incluaient la proportion de participants présentant une perte de 15 lettres ou plus de la MAVC, la variation moyenne par rapport aux valeurs initiales de la MAVC, la variation moyenne dans l'épaisseur centrale de la rétine (CRT pour central retinal thickness), le nombre et le type de complications ou de résultats indésirables, et le nombre d'interventions supplémentaires administrées. Lorsqu'elles étaient disponibles, nous avons également présenté les données concernant la qualité de vie et les données économiques.
Nous avons trouvé six ECR répondant aux critères d'inclusion après une revue indépendante en double des résultats des recherches. Ces ECR ont inclus 937 participants et comparaient les résultats à six mois par rapport à une injection simulée pour quatre agents anti-VEGF : l'aflibercept (VEGF Trap-Eye, Eylea), le bevacizumab (Avastin), le pegaptanibest de sodium (Macugen) et le ranibizumab (Lucentis). Trois essais ont été réalisés en Norvège, en Suède et aux États-Unis, et trois essais étaient multicentriques, dont un avec des centres aux États-Unis, au Canada, en Inde, en Israël, en Argentine et en Colombie, un deuxième avec des centres aux États-Unis, en Australie, en France, en Allemagne, en Israël et en Espagne, et un troisième avec des centres en Autriche, en France, en Allemagne, en Hongrie, en Italie, en Lettonie, en Australie, au Japon, à Singapour et en Corée du Sud. Nous avons effectué une méta-analyse sur trois critères de jugement visuels clés, en utilisant les données de jusqu'à six essais. Des preuves de qualité élevée issues de six essais ont révélé que les participants recevant un traitement anti-VEGF par injection intravitréenne avaient 2,71 fois plus de chances de gagner au moins 15 lettres d’acuité visuelle à six mois par rapport aux participants traités avec des injections simulées (risque relatif (RR) 2,71 ; intervalle de confiance (IC) à 95 % de 2,10 à 3,49). Des preuves de qualité élevée issues de cinq essais suggéraient que le traitement anti-VEGF était associé à une diminution de 80 % du risque de perte d'au moins 15 lettres de l'acuité visuelle à six mois par rapport à une injection simulée (RR 0,20 ; IC à 95 % de 0,12 à 0,34). Des preuves de qualité modérée issues de trois essais (481 participants) ont révélé que la réduction moyenne, de l'inclusion à six mois, de l'épaisseur centrale de la rétine était supérieure de 267,4 µm (IC à 95 % de 211,4 µm à 323,4 µm) chez les participants traités aux anti-VEGF que chez les participants traités avec un traitement simulé. Les méta-analyses démontrent que le traitement aux anti-VEGF est associé à une amélioration cliniquement appréciable de l’acuité visuelle à six mois. Un essai démontrait un effet bénéfique prolongé à 12 mois par rapport à un traitement simulé. Aucun effet indésirable significatif, oculaire ou systémique, n’a été identifié pendant cette période.