Les personnes atteintes de diabète de type 1 et d'insuffisance rénale ont un faible taux de survie. Leur évolution clinique aboutit à diverses complications vasculaires et, généralement, à une insuffisance rénale progressive. Une greffe de pancréas améliore la survie et la qualité de vie et corrige la glycémie sans nécessiter un traitement à l'insuline, et la transplantation du pancréas et d'un rein est donc le traitement de choix pour la plupart des patients atteints de diabète de type 1 insulino-dépendant et d'insuffisance rénale. Dans plus de 95 % des cas, le traitement immunosuppresseur des receveurs de transplantations inclut des corticoïdes. La corticothérapie entraîne toutefois des complications : hypertension, hyperglycémie ou hyperlipidémie, risque accru d'infection, obésité, cataracte, maladies musculaires, altérations du métabolisme osseux et problèmes de peau. Il n'en reste pas moins que sans une immunosuppression suffisante, les patients transplantés risquent le rejet de greffe et l'échec de la transplantation. Cette revue a étudié l'impact sur les résultats à court et long terme de deux stratégies : l'évitement des corticoïdes et le sevrage des corticoïdes. Ces stratégies pourraient être utilisées chez l'adulte dans les premiers jours suivant la transplantation, en combinaison avec l'usage d'agents immunosuppresseurs plus puissants. Vingt et une études ont été identifiées et évaluées dans cette étude, bien que seulement trois ECR comptant 144 participants aient répondu à nos critères d'inclusion. Les stratégies d'évitement des corticoïdes et de sevrage des corticoïdes pour les transplantations du pancréas ainsi que du pancréas et d'un rein n'ont apparemment pas été associées à plus de mortalité, de pertes de greffon ou de rejets aigus, mais d'autres études sont encore nécessaires.
Les trois ECR identifiés (144 patients) ne donnent pas de preuves suffisantes des avantages ou inconvénients du sevrage des corticoïdes dans les transplantations de pancréas. Des résultats incertains ont été relevés en ce qui concerne le risque de rejet à court terme, la mortalité ou la survie des greffons avec les stratégies d'économie des corticoïdes, pour un très petit nombre de patients et sur une courte période de suivi. Dans l'ensemble, les données sont peu abondantes et il n'a donc pas été possible d'en tirer des conclusions définitives. En outre, les conclusions des 13 études d'observation concordent, dans l'ensemble, avec les preuves fournies par les ECR.
Les transplantations de pancréas ou pancréas et rein améliorent la survie et la qualité de vie des personnes atteintes de diabète de type 1 et d'insuffisance rénale. L'immunosuppression après transplantation est associée à des complications. Les corticoïdes ont des effets indésirables : dégradation des facteurs de risque cardiovasculaires (hypertension, hyperglycémie ou hyperlipidémie), augmentation des risques d'infection, obésité, cataracte, myopathie, altérations du métabolisme osseux, problèmes dermatologiques et aspect cushingoïde. Il n'est pas évident que l'évitement des corticoïdes ait une influence sur ces effets.
Nous avons cherché à évaluer l'innocuité et l'efficacité du sevrage anticipé des corticoïdes (moins de 14 jours de traitement après la transplantation), du sevrage tardif (plus de 14 jours après la transplantation) ou de l'évitement des corticoïdes chez les receveurs de greffes de pancréas (y compris d'un organe vascularisé) seul (TPS), de pancréas et d'un rein (TPR) ou d'une greffe de pancréas faisant suite à une transplantation rénale (PTR).
Nous avons effectué des recherches dans le registre spécialisé du groupe Cochrane sur la néphrologie (jusqu'au 18 juin 2014) en prenant contact avec le coordinateur des recherches d'essais. Nous avons effectué des recherches manuelles dans les listes bibliographiques des manuels de néphrologie, les études pertinentes, les publications récentes et les lignes directrices de pratique clinique, ainsi que dans les résumés de réunions scientifiques de sociétés de transplantologie internationales, et envoyé des courriels et des lettres à des investigateurs connus afin d'obtenir des informations sur des études non publiées ou incomplètes.
Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) ou études de cohortes sur l'évitement des corticoïdes (y compris le sevrage anticipé) par rapport au maintien des corticoïdes ou au sevrage tardif chez des receveurs de transplantations de pancréas ou pancréas et rein. Nous avons défini l'évitement des corticoïdes comme l'évitement complet des corticoïdes dans le traitement immunosuppresseur, le sevrage précoce comme l'arrêt de la corticothérapie moins de 14 jours après la transplantation et le sevrage tardif comme l'arrêt des corticoïdes plus de 14 jours après la transplantation.
Deux auteurs ont évalué indépendamment les titres et les résumés des études identifiées et, si nécessaire, le texte intégral afin de déterminer lesquelles satisfaisaient nos critères d'inclusion. Les auteurs des études incluses ont été contactés afin d'obtenir les informations manquantes. Des analyses statistiques ont été effectuées en utilisant des modèles à effets aléatoires et les résultats ont été exprimés sous la forme de risque relatif (RR) ou de différence moyenne (DM) avec des intervalles de confiance (IC) à 95 %. Les études de cohorte n'ont pas fait l'objet de méta-analyses mais leurs conclusions ont été résumées de façon descriptive.
Trois ECR incluant 144 participants répondaient à nos critères d'inclusion. Deux d'entre eux comparaient l'évitement des corticoïdes avec le sevrage tardif et le troisième l'évitement tardif avec le maintien des corticoïdes. Toutes les études incluses portaient sur des cas de transplantation pancréas-rein et une seule incluait également des transplantations de pancréas seul. Toutes les études avaient un risque de biais global modéré et présentaient seulement des résultats à court terme (de six à douze mois). Deux études (89 participants) comparaient l'évitement des corticoïdes ou le sevrage précoce au sevrage tardif des corticoïdes. Il n'y a pas de preuve claire d'un impact sur la mortalité (2 études, 89 participants : RR 1,64, IC à 95 % de 0,21 à 12,75), le risque de perte du rein après censure des décès (2 études, 89 participants : RR 0,35, IC à 95 % de 0,04 à 3,09), le risque de perte du pancréas après censure des décès (2 études, 89 participants : RR 1,05, IC à 95 % de 0,36 à 3,04) ou le rejet aigu du rein (1 étude, 49 participants : RR 2,08, IC à 95 % de 0,20 à 21,50). Toutefois, les résultats étaient incertains et compatibles avec soit une absence de différence ou un bénéfice important, soit un effet négatif de l'évitement ou du sevrage précoce des corticoïdes. L'étude comparant le sevrage tardif au maintien des corticoïdes n'a fait état d'aucun décès et aucune perte ou rejet aigu du greffon rénal à six mois dans les deux groupes et a rapporté des effets incertains sur le rejet aigu du pancréas (RR 0,88, IC à 95 % de 0,06 à 13,35). Parmi les effets indésirables possibles, seule l'infection a été rapportée dans une seule étude. Il y a eu beaucoup plus d'infections urinaires rapportées dans le groupe de sevrage tardif que dans le groupe d'évitement des corticoïdes (1 étude, 25 patients : RR 0,41, IC à 95 % de 0,26 à 0,66).
Nous avons également identifié 13 études de cohorte et un ECR comparant le tacrolimus à la ciclosporine. Dans l'ensemble, ces études ont montré que les stratégies d'économie et de sevrage des corticoïdes avaient l'effet bénéfique d'abaisser la HbAc1 et de réduire le risque d'infections (virus BK et CMV), tout en améliorant le contrôle de la pression artérielle, sans augmenter le risque de rejet. Toutefois, deux études ont constaté une augmentation de l'incidence des rejets aigus du pancréas (HR 2,8 ; IC à 95 % de 0,89 à 8,81, P = 0,066 dans une étude et 43,3 % dans le groupe de sevrage contre 9,3 % dans le maintien de corticoïdes, P < 0,05 à 3 ans dans l'autre) et une étude a montré une augmentation de l'incidence des rejets aigus du rein (18,7 % dans le groupe de sevrage contre 2,8 % dans le groupe de maintien des corticoïdes, P < 0,05) à 3 ans.
Traduction réalisée par Cochrane France