Question de la revue
Nous avons examiné les preuves concernant les effets de médicaments pour prévenir l'obstruction de petites veines du foie (veinopathie oblitérante) chez les receveurs de greffes de cellules souches hématopoïétiques (GCSH).
Contexte
Les receveurs de greffes de cellules souches hématopoïétiques peuvent développer une veinopathie oblitérante, complication grave et potentiellement mortelle. Différents médicaments ayant différents mécanismes d'action ont été essayés pour prévenir cette complication : héparine, héparine de bas poids moléculaire (HBPM), danaparoïde, acide ursodésoxycholique, prostaglandine E1 (PGE1), glutamine, antithrombine III, défibrotide et plasma frais congelé (PFC). De nombreux centres de transplantation administrent systématiquement ces mesures préventives, en particulier aux receveurs à haut risque.
Caractéristiques des études
Nous avons inclus 14 essais contrôlés randomisés (ECR). Quatre essais (612 participants) comparaient l'acide ursodésoxycholique avec ou sans traitement supplémentaire à un placebo, à l'absence de traitement ou au même traitement supplémentaire. Deux essais (259 participants) comparaient l'héparine à l'absence de traitement. Deux essais (106 participants) comparaient l'héparine de bas poids moléculaire à un placebo ou à l'absence de traitement. Un essai (360 participants) comparait le défibrotide à l'absence de traitement. Un essai (34 participants) comparait la glutamine avec un placebo. Deux essais (383 participants) comparaient le plasma frais congelé, avec ou sans traitement supplémentaire, à l'absence de traitement ou au même traitement supplémentaire. Un essai (30 participants) comparait l'antithrombine III associée à l'héparine avec l'héparine seule. Un essai comparait l'héparine (47 participants) avec l'HBPM (46 participants) et la prostaglandine E1 (47 participants). Aucun essai n'examinait les effets du danaparoïde. Les ECR incluaient des receveurs de GSCH des deux sexes, d'âges très divers et atteints de différentes maladies. Les preuves sont à jour à la date de janvier 2015.
Principaux résultats
L'acide ursodésoxycholique pourrait réduire l'occurrence des veinopathies oblitérantes, des décès toutes causes confondues et des décès dus à la vienopathie oblitérante, mais il n'y avait aucune preuve d'une différence en termes de survie globale. Il n'y avait aucune preuve d'une différence en termes de survenue de la veinopathie oblitérante entre les groupes de traitement et de contrôle pour l'héparine, l'HBPM, le défibrotide, la glutamine, le PFC, l'antithrombine III, entre l'héparine et l'HBPM, entre l'héparine et la PGE1 et entre l'HBPM et la PGE1. Il n'y avait aucune preuve de différence en termes de survie entre les groupes de traitement et de contrôle pour l'héparine et le défibrotide. Il n'y avait pas de données sur la survie dans les essais de l'HBPM, de la glutamine, du PFC, de l'antithrombine III, entre l'héparine et l'HBPM, entre l'héparine et la PGE1, et entre l'HBPM et la PGE1. Il n'y avait pas de données sur la qualité de vie dans ces essais. Les effets indésirables étaient rapportés pour onze essais. Il n'y avait aucune preuve d'une différence à cet égard entre les groupes de traitement, à l'exception d'un essai montrant que le défibrotide avait entraîné plus d'événements indésirables que l'absence de traitement.
Qualité des preuves
La qualité des preuves pour tous les critères d'évaluation était faible à très faible, en raison d'un risque de biais élevé dans le plan d'étude, de résultats incohérents entre les études et de l'imprécision des résultats.
Conclusion
Des preuves de faible ou très faible qualité indiquent que l'acide ursodésoxycholique est susceptible de réduire l'incidence des veinopathies oblitérantes hépatiques, la mortalité globale et la mortalité causée par la veinopathie oblitérante chez les receveurs de greffes de cellules souches hématopoïétiques. Le traitement le plus efficace n'est cependant pas bien défini. Il n'existe pas suffisamment de preuves pour recommander l'utilisation de l'héparine, de l'héparine de bas poids moléculaire, du défibrotide, de la glutamine, du PFC, de l'antithrombine III ou de la prostaglandine E1. D'autres recherches de bonne qualité sont nécessaires.
Il existe des preuves de faible ou très faible qualité indiquant que l'acide ursodésoxycholique est susceptible de réduire l'incidence des veinopathies oblitérantes hépatiques, la mortalité toutes causes confondues et la mortalité liée à la veinopathie oblitérante chez les receveurs de greffe de cellules souches hématopoïétiques. Toutefois, le schéma thérapeutique optimal n'est pas bien défini. Il n'existe pas suffisamment de preuves pour recommander l'utilisation de l'héparine, de l'HBPM, du défibrotide, de la glutamine, du PFC, de l'antithrombine III ou de la PGE1. D'autres ECR de bonne qualité sont nécessaires.
La veinopathie oblitérante hépatique (ou portale) est une complication sévère des greffes de cellules souches hématopoïétiques (GCSH). Différents médicaments ayant des mécanismes d'action différents ont été testés chez les receveurs de greffe pour la prévenir, mais il n'est pas certain qu'il existe des preuves de grande qualité pour recommander un traitement prophylactique.
Notre objectif était de déterminer les effets des différents traitements prophylactiques sur l'incidence de la veinopathie occlusive hépatique, la survie globale, la mortalité et la qualité de vie (QdV), ainsi que l'innocuité de ces traitements chez les receveurs de GCSH.
Nous avons effectué des recherches en janvier 2015 dans le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), MEDLINE, EMBASE, des actes de conférences de trois sociétés internationales d'onco-hématologie et deux registres d'essais, vérifié les références, recherché des citations et pris contact avec les auteurs des études afin d'identifier des études supplémentaires.
Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) comparant les traitements prophylactiques à un placebo ou à l'absence de traitement, ou comparant différents traitements de la veinopathie oblitérante hépatique chez des receveurs de GCSH.
Nous avons utilisé les procédures méthodologiques standard prévues par Cochrane.
Nous avons inclus 14 ECR. Quatre essais (612 participants) comparaient l'acide ursodésoxycholique avec ou sans traitement supplémentaire à un placebo ou à l'absence de traitement ou au même traitement supplémentaire. Deux essais (259 participants) comparaient l'héparine à l'absence de traitement. Deux essais (106 participants) comparaient l'héparine de bas poids moléculaire (HBPM) à un placebo ou à l'absence de traitement. Un essai (360 participants) comparait le défibrotide à l'absence de traitement. Un essai (34 participants) comparait la glutamine avec un placebo. Deux essais (383 participants) comparaient le plasma frais congelé (PFC) avec ou sans traitement supplémentaire à l'absence de traitement ou au même traitement supplémentaire. Un essai (30 participants) comparait l'antithrombine III associée à l'héparine avec l'héparine seule. Un essai comparait l'héparine (47 participants) avec l'HBPM (46 participants) et la prostaglandine E1 (PGE1) (47 participants). Aucun essai n'examinait les effets du danaparoïde. Les ECR incluaient des sujets des deux sexes, d'âges très divers et souffrant de différentes maladies, receveurs d'autogreffes ou d'allogreffes de CSH. Les essais étaient financés par les pouvoirs publics (deux études), des fonds pour la recherche (une étude), des laboratoires pharmaceutiques fabriquant du défibrotide et de l'acide ursodésoxycholique (deux études), ou des sources non précisées (neuf études). Tous les ECR présentaient un risque élevé de biais en raison de l'absence de mise en aveugle des participants et du personnel de l'étude, ou d'autres risques de biais (principalement de différences entre les caractéristiques initiales des groupes comparés).
Les résultats ont montré que l'acide ursodésoxycholique est susceptible de réduire l'incidence des veinopathies oblitérantes hépatiques (risque relatif (RR) 0,60, intervalle de confiance (IC) à 95 % de 0,40 à 0,88 ; nombre de sujets à traiter pour obtenir un résultat bénéfique supplémentaire (NST) 15, IC à 95 % de 7 à 50, preuves de faible qualité), mais il n'y avait aucune preuve d'une différence en termes de survie globale (hazard ratio (HR) 0,83, IC à 95 % de 0,59 à 1,18, preuves de faible qualité). Ce médicament peut réduire la mortalité toutes causes confondues (RR 0,70, IC à 95 % de 0,50 à 0,99 ; NST 17, IC à 95 % de 8 à 431, preuves de faible qualité) et la mortalité due à la veinopathie oblitérante hépatique (RR 0,27, IC à 95 % de 0,09 à 0,87 ; NST 34, IC à 95 % de 16 à 220, preuves de très faible qualité). Il n'y avait pas de preuve d'une différence dans l'incidence des veinopathies oblitérantes hépatiques entre les groupes de traitement et de contrôle pour l'héparine (RR 0,47, IC à 95 % de 0,18 à 1,26, preuves de très faible qualité), l'HBPM (RR 0,27, IC à 95 % de 0,06 à 1,18, preuves de très faible qualité), le défibrotide (RR 0,62, IC à 95 % de 0,38 à 1,02, preuves de faible qualité), la glutamine (aucune veinopathie oblitérante hépatique dans aucun des deux groupes, preuves de très faible qualité), le PFC (RR 0,66, IC à 95 % de 0,20 à 2,17, preuves de très faible qualité), l'antithrombine III (RR 0,13, IC à 95 % de 0,01 à 2,15, preuves de très faible qualité), entre l'héparine et l'HBPM (RR 1,96, IC à 95 % de 0,80 à 4,77, preuves de très faible qualité), entre l'héparine et la PGE1 (RR 1,20, IC à 95 % de 0,58 à 2,50, preuves de très faible qualité), et entre l'HBPM et la PGE1 (RR 0,61, IC à 95 % de 0,24 à 1,55, preuves de très faible qualité). Il n'y avait aucune preuve de différence en termes de survie entre les groupes de traitement et de contrôle pour l'héparine (92,6 % contre 88,7 %) et le défibrotide (HR 1,04, IC à 95 % de 0,54 à 2,02, preuves de faible qualité). Il n'y avait pas de données sur la survie pour les essais portant sur l'HBPM, la glutamine, le PFC, l'antithrombine III, entre l'héparine et l'HBPM, entre l'héparine et la PGE1, et entre l'HBPM et la PGE1. Aucun des essais ne rapportait de données sur la qualité de vie (QdV). Onze essais rapportaient les événements indésirables. Il n'y avait aucune preuve de différence dans la fréquence des événements indésirables entre les groupes de traitement et de contrôle, à l'exception d'un essai montrant que le défibrotide a entraîné plus d'événements indésirables (coagulopathie, troubles gastro-intestinaux, hémorragie et microangiopathie) que l'absence de traitement (RR 18,79, IC à 95 % de 1,10 à 320,45). La qualité des preuves était faible ou très faible en raison de biais dans la conception de l'étude et des résultats contradictoires ou imprécis.
Traduction réalisée par Cochrane France