Pourquoi cette revue est-elle importante ?
Le trouble panique est fréquent dans la population générale et se caractérise par des crises de panique récurrentes et inattendues consistant en une vague de peur intense qui atteint un sommet en quelques minutes. L'agoraphobie se développe souvent après une ou plusieurs crises de panique et signifie la peur d'être dans une situation dans laquelle il peut être difficile de s'évader ou dans laquelle l'aide ne serait pas disponible si nécessaire. Le trouble panique est traité par des interventions psychologiques et des médicaments, souvent utilisés en association. Bien qu'elles ne soient généralement pas recommandées comme traitement de première intention, les benzodiazépines sont fréquemment utilisées dans le traitement du trouble panique. Les benzodiazépines ont un début d'action rapide, mais elles présentent aussi un risque élevé de dépendance et de symptômes de sevrage.
Qui peut être intéressé par cette revue ?
Les patients et les médecins généralistes.
À quelles questions cette revue cherche-t-elle à répondre ?
Quelle est l'efficacité du traitement par les benzodiazépines par rapport au placebo (un traitement fictif) dans le traitement du trouble panique avec ou sans agoraphobie ?
Dans quelle mesure les benzodiazépines sont-elles acceptables par rapport au placebo dans le traitement du trouble panique avec ou sans agoraphobie ?
Combien de personnes atteintes d'un trouble panique avec ou sans agoraphobie qui sont traitées avec des benzodiazépines ont des effets secondaires par rapport au placebo ?
Quelles études ont été incluses dans la revue ?
Nous avons consulté des bases de données électroniques et des registres d'études pour trouver toutes les études pertinentes. Nous n'avons inclus que des essais contrôlés randomisés (un type d'étude dans laquelle les participants sont assignés à un groupe de traitement utilisant une méthode aléatoire) qui comparaient le traitement par benzodiazépine à un placebo chez des adultes ayant reçu un diagnostic de trouble panique avec ou sans agoraphobie. Nous n'avons inclus que des études dans lesquelles les patients et les cliniciens ne savaient pas quel traitement ils recevaient. Nous avons inclus dans notre revue 24 études auxquelles ont participé 4 233 personnes au total.
Que nous apportent les preuves de cette revue ?
Nous avons trouvé des données probantes cohérentes indiquant un avantage possible des benzodiazépines dans l'amélioration des symptômes de panique et dans le nombre de participants qui abandonnent le traitement. De plus, les benzodiazépines peuvent améliorer davantage le fonctionnement social que le placebo. Cependant, il pourrait y avoir plus d'abandons en raison des effets secondaires et plus de participants qui ressentent au moins un effet secondaire lorsqu'ils sont traités avec des benzodiazépines. Nous avons relevé plusieurs limites importantes dans la conception des études incluses. Par exemple, il semble qu'au moins dans certaines études, les participants et les médecins aient été en mesure de deviner à quel groupe de traitement les participants ont été assignés ; il est donc possible que certains essais n'aient pas été réellement en aveugle. Ces limitations peuvent avoir conduit à une surestimation de l'effet du traitement. Une autre limite importante est que les études que nous avons incluses n'étaient que des études à court terme et ne reflétaient pas les risques de dépendance et de symptômes de sevrage. De plus, nous ne savons pas très bien si l'effet est maintenu après la fin du traitement.
Que devrait-il se passer à la suite de cette revue ?
Des études à long terme de bonne qualité devraient être menées pour déterminer si les avantages du traitement peuvent être maintenus et pour situer ces avantages dans le contexte des effets de sevrage et du risque de dépendance. Toutefois, il est peu probable que les conclusions générales concernant l'efficacité à court terme et le potentiel de dépendance des benzodiazépines changent. Des comparaisons avec d'autres traitements actifs, notamment la psychothérapie, par exemple dans le cadre de méta-analyses de traitements multiples, pourraient donc être plus appropriées pour éclairer la pratique clinique.
Des données de faible valeur probante montrent une supériorité possible des benzodiazépines par rapport au placebo dans le traitement à court terme des troubles paniques. La validité des études incluses est discutable en raison de la possibilité d’avoir connaissance des traitements assignés à chaque patient, des taux élevés d'abandon et de la probabilité d’un biais de publication. De plus, les études incluses n'étaient que des études à court terme et n'ont pas examiné l'efficacité à long terme ni les risques de dépendance et de symptômes de sevrage. En raison de ces limites, nos résultats concernant l'efficacité des benzodiazépines par rapport au placebo ne fournissent que peu d’indications pour la pratique clinique. De plus, le clinicien n'a pas à choisir entre les benzodiazépines et le placebo, mais entre les benzodiazépines et d'autres agents, notamment les ISRS, tant en termes d'efficacité que d'effets indésirables. Le choix du traitement doit donc être guidé par les préférences du patient et les avantages et inconvénients du traitement doivent être mis en comparaison dans une perspective à long terme.
Le trouble panique se caractérise par des crises de panique récurrentes et inattendues consistant en une vague de peur intense qui atteint son apogée en quelques minutes. Le trouble panique est un trouble courant, avec une prévalence à vie estimée de 1 % à 5 % dans la population générale et de 7 % à 10 % dans les établissements de soins primaires. Son étiologie n'est pas entièrement comprise et est probablement hétérogène.
Le trouble panique est traité par des interventions psychologiques et pharmacologiques, souvent utilisées en association. Bien que les benzodiazépines soient fréquemment utilisées dans le traitement du trouble panique, les lignes directrices recommandent les antidépresseurs, principalement les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS), comme traitement de première ligne du trouble panique, particulièrement en raison de leur faible risque de dépendance et de réaction de sevrage par rapport aux benzodiazépines. Malgré ces recommandations, les benzodiazépines sont largement utilisées dans le traitement du trouble panique, probablement en raison de leur action rapide.
Évaluer l'efficacité et l'acceptabilité des benzodiazépines par rapport au placebo dans le traitement du trouble panique avec ou sans agoraphobie chez l’adulte.
Nous avons fait des recherches dans le registre des essais contrôlés du groupe de travail Cochrane sur les troubles mentaux fréquents (études et références du CCMDCTR), le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), MEDLINE (1950-), Embase (1974-) et PsycINFO (1967-) jusqu'au 29 mai 2018. Nous avons effectué des recherches manuelles dans les bibliographies des articles pertinents et des revues systématiques antérieures. Nous avons contacté des experts dans le domaine pour obtenir des données supplémentaires.
Tous les essais contrôlés à double insu (à l'insu des patients et du personnel) dans lesquels des adultes atteints d'un trouble panique avec ou sans agoraphobie ont été randomisés pour recevoir soit des benzodiazépines ou un placebo.
Deux auteurs de la revue ont vérifié de manière indépendante l'éligibilité des études et extrait les données à l'aide d'un formulaire standardisé. Les données ont ensuite été entrées dans Review Manager 5 à l'aide d'une procédure de double vérification. Les informations extraites comprenaient les caractéristiques des études, les caractéristiques des participants, les détails des interventions, les contextes et les critères de jugement relatifs à l'efficacité, l'acceptabilité et la tolérabilité.
Nous avons inclus 24 études dans la revue avec un total de 4233 participants, dont 2124 ont été randomisés pour les benzodiazépines et 1475 pour le placebo. Les 634 participants restants ont été répartis au hasard dans d'autres groupes de traitements actifs dans le cadre d'essais à trois bras. Nous avons jugé que la qualité méthodologique globale des études incluses était faible. D’après nos évaluations, toutes les études présentaient un risque incertain de biais dans au moins trois domaines. De plus, nous avons jugé que 20 des 24 études incluses présentaient un risque élevé de biais dans au moins un domaine.
Deux critères de jugement principaux sur l'efficacité et l'acceptabilité ont montré un avantage possible des benzodiazépines par rapport au placebo. Le risque relatif (RR) estimé pour une réponse au traitement était de 1,65 (intervalle de confiance à 95 % (IC) de 1,39 à 1,96) en faveur des benzodiazépines, ce qui correspond à un nombre estimé de sujets à traiter pour un résultat bénéfique supplémentaire (NNTB) de 4 (IC à 95 % 3 à 7). Le taux d'abandon était plus faible chez les participants traités par des benzodiazépines (RR 0,50, IC à 95 %, 0,39 à 0,64) ; le NNTB estimé était de 6 (IC à 95 %, 5 à 9). Nous avons jugé que la qualité des données probantes était faible pour les deux critères de jugement principaux. L'avantage possible des benzodiazépines a également été observé pour la rémission (RR 1,61, IC à 95 % : 1,38 à 1,88) et pour le fonctionnement social en tant que critère de jugement (différence moyenne standardisée (DMS) -0,53, IC à 95 % : -0,65 à -0,42), les données étant de faible valeur probante pour ces deux observations. Nous avons évalué les données probantes des autres critères de jugement secondaires comme étant de très faible valeur probante. A l'exception des analyses des données des scores de changement pour la dépression (DMS -0,22, IC à 95 % -0,48 à 0,04) et le fonctionnement social (DMS -0,32, IC à 95 % -0,88 à 0,24), toutes les analyses des critères de jugement secondaires ont révélé un effet en faveur des benzodiazépines comparativement au placebo. Toutefois, le nombre d'abandons dus à des effets indésirables était plus élevé avec les benzodiazépines qu'avec le placebo (RR 1,58, IC à 95 %, 1,16 à 2,15 ; données de faible valeur probante). De plus, nos analyses des événements indésirables ont montré qu'une proportion plus élevée de participants ont éprouvé au moins un effet indésirable lorsqu'ils ont reçu des benzodiazépines (RR 1,18, IC à 95 %, 1,02 à 1,37 ; preuves de faible qualité).
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