Contexte
Les tremblements après une anesthésie générale sont fréquents. En plus d'être désagréable pour le patient, ils peuvent aggraver la douleur et affecter les taux d'oxygène. Les agonistes Alpha-2 (α-2) adrénergiques sont un groupe de médicaments qui ont été testés dans le but de prévenir ou de traiter ces tremblements. Dans cette revue, nous avons cherché à voir si les agonistes alpha-2 pouvaient être administrés pour réduire les tremblements postopératoires sans causer d'effets secondaires sérieux.
Les caractéristiques de l'étude
Les preuves sont à jour au 13 juin 2014. Nous avons trouvé 20 essais randomisés contrôlés pertinents incluant 1401 participants subissant une intervention chirurgicale sous anesthésie générale. Ces études ont comparé un agoniste a-2 (la clonidine, ou la dexmédétomidine) avec un contrôle. Les doses, méthodes, et moments d'administration du médicament variaient selon les études.
Résultats principaux
Toutes les études ont rapporté des résultats pour des tremblements. Notre analyse a montré que les agonistes α-2 réduisait significativement le risque de tremblements postopératoires lorsqu'ils sont administrés avant ou pendant la chirurgie. Cependant, notre analyse a également montré qu'il y avait des différences significatives entre les études que nous n'avons pas pu expliquer. Les auteurs de certaines études avaient également présenté des résultats pour la température centrale, la durée du séjour en salle de réveil, et les effets secondaires cliniques des médicaments. Sept études ont rapporté que les participants ayant reçu de la dexmédétomidine étaient plus susceptibles d'avoir un niveau plus élevé de sédation après la chirurgie, et cinq études ont rapporté que les participants ayant reçu de la dexmédétomidine étaient plus susceptibles d'avoir une bradycardie (un ralentissement du rythme cardiaque). Nous n'avons pas regroupé ces résultats. Aucune des études n'a présenté les résultats rapportés par les patients.
La qualité des preuves
Nous avons estimé que la qualité des preuves était faible et que certains auteurs n'ont pas suffisamment fait d'efforts pour réduire le risque de biais dans les méthodes, ce qui pourrait avoir une incidence sur leurs résultats. Par exemple, tous les auteurs n'ont pas caché à l'anesthésiste ou au chirurgien quel médicament était administré à chaque participant. Ceci, ainsi que certaines différences inexpliquées entre les études et certaines inquiétudes quant à savoir si nous avons pu manquer certains résultats pertinents non publiés, nous a amenés à évaluer le niveau de preuves des tremblements comme très faible. Nous avons utilisé le logiciel GRADEpro pour évaluer le niveau des preuves.
Conclusion
Les agonistes Alpha-2 pourraient réduire le nombre de personnes qui tremblent après une procédure chirurgicale, mais ils sont susceptibles de provoquer, en effets secondaires, une somnolence plus importante chez les patients. Cependant, ces preuves sont issues d'études de qualité très faible.
Il existe des preuves que la clonidine et la dexmédétomidine peuvent réduire les tremblements postopératoires, mais les patients à qui on a administré de la dexmédétomidine pourraient être sous sédation plus forte. Cependant, notre évaluation du niveau de cette preuves est très faible.
Les tremblements après une anesthésie générale sont fréquents. En plus d'être désagréable, ils peuvent avoir des effets physiologiques indésirables. Les récepteurs Alpha-2 adrénergiques, qui sont capables de réduire l'activité sympathique et la régulation centrale du tonus vasoconstricteur, constituent un groupe de médicaments qui ont été utilisés pour tenter de prévenir les tremblements postopératoires.
Évaluer les éléments suivants : Les effets des agonistes a-2 pour prévenir les tremblements, et ses complications subséquentes après anesthésie générale chez des sujets subissant une chirurgie; les effets des agonistes a-2 sur le risque d'hypothermie péri-opératoire accidentel; et si des effets indésirables sont associés à ces interventions.
Nous avons effectué des recherches dans le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), MEDLINE et EMBASE le 13 juin 2014. Nos termes de recherche étaient en rapport avec la question de la revue et limités à des études ayant évalué les tremblements ou l'hypothermie. Nous avons également effectué des recherches dans des registres d'essais cliniques, ainsi que des suivis de référence.
Nous avons considéré tous les essais randomisés et contrôlés, les études quasi-randomisées, et les études randomisées par groupes, concernant des adultes subissant une chirurgie sous anesthésie générale lors de laquelle un agoniste a-2 était comparé à un autre agoniste a-2 ou à un placebo pour la prévention des tremblements.
Deux auteurs de la revue ont indépendamment évalué la qualité des essais et extrait les données, en consultant un troisième auteur de revue en cas de désaccord. Nous avons utilisé des procédures méthodologiques standards de Cochrane, y compris une évaluation du risque de biais et l'utilisation du logiciel GRADEpro pour interpréter les résultats.
Nous avons inclus 20 études avec 1401 participants chirurgicaux comparant un agoniste α-2 par rapport à un groupe témoin. Treize études comparaient la clonidine avec un groupe témoin, tandis que sept comparaient la dexmédétomidine à un groupe témoin. Les doses, les méthodes et la durée d'administration variaient entre les études : dans trois études on a donné le médicament par voie orale ou par injection intraveineuse avant l'intervention chirurgicale et dans neuf études on l'a administré pendant l'intervention; dans une étude on a donné le médicament par perfusion débutée avant l'intervention chirurgicale et sept études ont débuté à des moments différents entre l'induction anesthésique et la fin de l'intervention chirurgicale. Alors que toutes les études étaient décrites comme étant randomisées, beaucoup d'entre elles n'ont pas fourni suffisamment de détails sur les méthodes utilisées. Nous avions prévu qu'il y aurait des tentatives pour réduire les biais de performance par la mise en aveugle des participants et du personnel, cependant, cela a été décrit dans seulement six des articles. De même, dans certaines études il manquait des détails sur les méthodes pour réduire le risque de biais de détection. Nous avons donc réduit la qualité des preuves dans notre tableau «Résumé des résultats» d'un niveau pour le risque de biais en utilisant l'approche Grades of Recommendation, Assessment, Development and Evaluation (GRADE).
Les 20 études incluses présentaient toutes des données sur des tremblements postopératoires, et dans une méta-analyse il a été démontré que les agonistes a-2 réduisaient significativement les risque de tremblements (risque relatif Mantel-Haenszel 0,28, intervalle de confiance à 95% 0,18 à 0,43, valeur P < 0,0001). Nous avons trouvé des preuves d'une hétérogénéité significative (I2= 80%) pour ce résultat qui n'a pas été expliquée par l'analyse de sensibilité ou en sous-groupe; c'est pourquoi nous avons rabaissé la qualité des preuves d'un niveau en raison de l'incohérence. Bien que nous n'avons pas estimé qu'il existait des inquiétudes vis à vis des imprécisions ou du caractère indirecte des données, nous avons rabaissé la qualité des preuves à cause du risque de biais de publication suite à une analyse visuelle d'un graphique en entonnoir. En utilisant GRADEpro, nous avons évalué la qualité globale des données sur les tremblements comme étant très faible. Une seule étude a rapporté l'incidence de l'hypothermie centrale, tandis que 12 études mesuraient la température centrale. Cependant, comme les résultats de la température centrale ont été rapportés dans différents styles, le regroupement des résultats était inapproprié. Nous n'avons trouvé aucune étude présentant des résultats déclarés par les participants, tels que l'expérience de tremblements ou la satisfaction des participants. Nous avons trouvé peu de données sur la durée du séjour dans l'unité de soins post anesthésiques (trois études, 200 participants) et les effets indésirables suivants : la sédation (neuf études, 875 participants), la bradycardie (huit études, 716 participants), et l'hypotension (sept études, 688 participants). Les analyses non regroupées ont suggéré que la sédation et la bradycardie étaient significativement plus fréquentes avec la dexmédétomidine que le placebo, les sept études avec de la dexmédétomidine et aucune des études avec de la clonidine n'ayant rapporté des niveaux de sédation statistiquement significativement plus élevés comme un effet indésirable.
Post-édition : Paul Rousselet (M2 ILTS, Université Paris Diderot)