Contexte
La bronchectasie (dilatation des bronches) est une maladie pulmonaire. Les personnes atteintes de bronchectasie éprouvent souvent des symptômes à long terme tels qu’une toux productive ou grasse, des poussées (exacerbations) et une mauvaise qualité de vie. Les personnes souffrant de bronchectasie ont une inflammation des voies respiratoires, et nombre d’entre-elles ont des symptômes semblables à ceux de l’asthme (tels que toux et respiration sifflante). Pour cette raison, les corticoïdes inhalés, couramment utilisés contre l’asthme, pourraient également améliorer les symptômes, réduire les poussées et/ou réduire la dégradation de la fonction pulmonaire des personnes atteintes de bronchectasie. Cependant, l’utilisation régulière des corticoïdes inhalés peut également provoquer des effets secondaires indésirables.
Question de la revue
Quels sont les avantages de l’utilisation régulière des corticoïdes inhalés dans la prise en charge des adultes et des enfants atteints de bronchectasie ?
Caractéristiques de l’étude
Nous avons inclus des études qui comparaient les corticoïdes inhalés à l’absence de corticoïdes inhalés, ou à un placebo (c’est-à-dire un médicament ayant le même aspect que les corticoïdes inhalés, mais ne contenant aucun principe actif). Nous n’avons inclus que des études où les personnes qui recevaient des corticoïdes inhalés et celles qui n’en recevaient pas étaient choisies au hasard. Les participants inclus dans les sept études étaient 380 adultes qui avaient reçu un diagnostic de bronchectasie en raison de symptômes ou d’un examen détaillé du poumon (la tomodensitométrie [TDM]). Nous n’avons pas inclus d’études impliquant des participants atteints de mucoviscidose qui peut également causer une bronchectasie. Bien que nous ayons prévu d’inclure des études impliquant des enfants souffrant de bronchectasie, nous n’avons pas trouvé de telles études.
Quelles preuves avons-nous trouvées ?
D’après les preuves disponibles jusqu’en juin 2017, nous avons trouvé sept études admissibles impliquant des participants adultes et examinant le rôle des corticoïdes inhalés dans la bronchectasie. Les adultes avaient une bronchectasie stable - ils n’avaient pas de poussées au début de l’étude.
Nous avons été en mesure d’inclure les résultats de deux études administrant des corticoïdes inhalés pendant moins de six mois à des adultes atteints de bronchectasie stable. Les corticoïdes inhalés n’avaient pas d’effets sur la fonction pulmonaire, le nombre d’exacerbations pendant l’étude ou la qualité de vie. Dans une autre étude administrant également des corticoïdes inhalés pendant moins de six mois, nous avons trouvé une légère réduction des expectorations (flegme) et une amélioration de l’essoufflement. Cependant, comme ces résultats proviennent d’une étude qui n’a pas utilisé de placebo, nous ne pouvons pas en être sûrs.
La seule étude sur l’utilisation à long terme des corticoïdes inhalés (c’est-à-dire pendant plus de 6 mois) n’a montré d’avantage significatif des corticoïdes inhalés pour aucun des critères d’évaluation.
Aucune étude n’a été réalisée lorsque les participants avaient une poussée de bronchectasie. Il n’y avait également aucune étude qui impliquait des enfants atteints de bronchectasie. Il est important de noter que nous ne savons pas si les corticoïdes inhalés sont associés à un plus grand nombre d’effets secondaires indésirables, parce que les études ne fournissaient pas beaucoup d’informations à ce sujet.
Conclusion
La revue a constaté qu’il n’y a pas assez de preuves en faveur d’une utilisation régulière des corticoïdes inhalés chez les adultes atteints de bronchectasie stable. Nous ne pouvons tirer aucune conclusion sur l’utilisation de corticoïdes inhalés pour les poussées de bronchectasie, ou sur leur utilisation chez les enfants, parce que nous n’avons trouvé aucune étude.
Qualité des preuves
En général, nous avons estimé que la qualité des preuves était faible. Nous étions préoccupés, car la plus grande étude, qui a montré certains avantages n’a pas utilisé de placebo. Cela signifie que les participants et le personnel engagés dans l’étude savaient qui recevait des corticoïdes inhalés et qui n’en recevait pas, ce qui pourrait affecter les résultats. En outre, notre degré de confiance était réduit parce que nous n’avons trouvé qu’un petit nombre d’études à inclure dans notre revue et certaines des études pourraient avoir inclus des personnes atteintes d’autres types de maladies pulmonaires, en plus de la bronchectasie.
Cette revue mise à jour indique que les preuves sont insuffisantes pour appuyer l’utilisation régulière des corticoïdes inhalés chez les adultes atteints de bronchectasie stabilisée. De plus, nous ne pouvons pas tirer de conclusion sur l’utilisation des corticoïdes inhalés chez les adultes pendant une exacerbation aiguë ou chez les enfants (pour tous les états), puisqu’il n’y avait aucune étude considérant ces critères.
La bronchectasie est de plus en plus fréquemment diagnostiquée et est reconnue comme un facteur important de maladie respiratoire chronique chez les adultes et les enfants des pays à revenu faible et à revenu élevé. Elle se caractérise par une dilatation irréversible des voies respiratoires et est généralement associée à une inflammation des voies respiratoires et une infection bactérienne chronique. La prise en charge thérapeutique vise principalement à réduire la morbidité en contrôlant les symptômes, à réduire la fréquence des crises, à améliorer la qualité de vie et à prévenir la progression de la bronchectasie. Ceci est une mise à jour d’une revue initialement publiée en 2000.
Évaluer l’efficacité et l’innocuité des corticoïdes inhalés chez les enfants et les adultes atteints de bronchectasie stabilisée, et plus précisément à évaluer si l’utilisation des corticoïdes inhalés : (1) réduit la gravité et la fréquence des exacerbations respiratoires aiguës ; ou (2) affecte la dégradation de la fonction pulmonaire à long terme.
Nous avons effectué des recherches dans les bases de données du registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), du registre des essais du groupe Cochrane sur les voies respiratoires, de MEDLINE et d’Embase. Nous avons effectué la recherche bibliographique la plus récente en juin 2017.
Tous les essais contrôlés randomisés comparant des corticoïdes inhalés à un placebo ou à une absence de traitement. Nous avons inclus les enfants et les adultes présentant une bronchectasie avérée cliniquement ou par radiographie, mais nous avons exclu les patients atteints de mucoviscidose.
Nous avons évalué les résultats des recherches par rapport à des critères d’inclusion prédéterminés. Pour cette mise à jour, deux auteurs indépendants de la revue ont évalué la qualité méthodologique et le risque de biais des essais en utilisant des critères établis et ont extrait les données en utilisant des formulaires standard. Nous avons analysé le traitement sur la base du « traitement reçu » et réalisé des analyses de sensibilité.
La revue a inclus sept études, portant sur 380 adultes. Sur les 380 participants randomisés, 348 ont terminé les études.
En raison de différences concernant les critères d’évaluation rapportés dans les sept études, nous n’avons pu effectuer qu’une méta-analyse limitée tant pour l’utilisation des corticoïdes inhalés à court terme (6 mois ou moins) que pour l’utilisation des corticoïdes inhalés à plus long terme (plus de 6 mois).
Pendant l’état stable dans le groupe à court terme (ayant reçu des corticoïdes inhalés pendant 6 mois ou moins), sur la base des deux études dont les données ont pu être incluses, il n’y avait pas de différence significative des valeurs de base du volume expiratoire maximal en une seconde (VEMS) à la fin de l’étude (différence moyenne (DM) -0,09 ; intervalle de confiance (IC) à 95 % -0,26 à 0,09) et de la capacité vitale forcée (CVF) (DM 0,01 L ; IC à 95 % -0,16 à 0,17) chez les adultes sous corticoïdes inhalés (par rapport à l’absence de traitement). De même, nous n’avons trouvé aucune différence significative concernant la fréquence moyenne des crises (DM 0,09 ; IC à 95 % de -0,61 à 0,79) ou les scores totaux de qualité de vie liée à la santé (QVLS) chez les adultes sous corticoïdes inhalés par rapport à ceux ne recevant pas de corticoïdes inhalés, bien que les données disponibles soient limitées. Sur la base d’une seule étude avec un groupe contrôle sans placebo, de laquelle nous n’avons pas pu extraire de données cliniques, il y avait une amélioration statistiquement significative, quoique marginale du volume des expectorations et des scores de dyspnée avec les corticoïdes inhalés.
La seule étude sur les résultats à long terme (plus de 6 mois), qui examinait la fonction pulmonaire et d’autres critères d’évaluations cliniques, n’a montré aucun effet significatif des corticoïdes inhalés sur aucun des critères d’évaluations. Nous n’avons pas pu tirer de conclusions sur les effets indésirables en raison du peu de données disponibles.
Bien que les auteurs des sept études affirmaient qu’elles étaient réalisées en double-aveugle, nous avons estimé qu’une étude (avec une courte durée de traitement aux corticoïdes inhalés) présentait un risque élevé de biais sur la base de la mise en aveugle, des abandons et de la communication des résultats. La qualité des preuves estimée selon le système GRADE était faible pour tous les critères d’évaluation (en raison d’un essai contrôlé sans placebo, du caractère indirect et d’imprécisions avec un petit nombre de participants et d’études).
Traduction réalisée par Sophie Fleurdépine et révisée par Cochrane France