Dans certains pays à faible et moyen revenu, les services médicaux sont organisés autour d'un problème de santé spécifique. Il en découle une fragmentation des services puisque les gens doivent se rendre à des cliniques distinctes selon leurs problèmes ou besoins médicaux. La logique sous-jacente est que les cliniques spécialisées permettent de mieux soigner et d'obtenir de meilleurs résultats parce que les services spécialisés et les technologies dont le patient a besoin sont alors entre les mains d'un personnel qualifié. D'autre part, la séparation de services concernés par une maladie spécifique peut s'avérer inefficace à la fois pour le fournisseur de soins, en raison du dédoublement des services, et pour le patient qui, afin de se soigner, doit se rendre dans différents services. Par exemple, une mère doit se rendre à une clinique pour les services de planification familiale et à une autre pour faire vacciner ses enfants, ou une personne atteinte du VIH et de la tuberculose doit se rendre dans une clinique distincte pour chaque maladie.
Une solution consiste à intégrer les services médicaux sur le lieu de prestation ou de renforcer les couplages entre les services. Le but de l'intégration est d'améliorer la coordination et la prestation des services en fournissant ceux-ci ensemble, par exemple un centre commun pour les services à la mère et à l'enfant. On pense que l'intégration garantit que les services soient gérés et fournis ensemble, ce qui les rendrait plus efficaces et de meilleure qualité. On pense aussi que l'intégration des soins permet un plus large accès du public, et donc plus d'équité entre personnes de communautés et milieux socio-économiques différents, un service plus commode et plus satisfaisant et, au total, une meilleure santé. D'autres croient que, avec l'intégration des soins, le personnel médical pourrait se retrouver surchargé ou ne pas avoir les compétences spécialisées nécessaires à la prise en charge de maladies spécifiques, ce qui pourrait conduire à des services de mauvaise qualité et à une mauvaise santé.
Cette revue actualisée incluait neuf études qui évaluaient des soins intégrés ou le couplage de soins. Les études avaient fait deux types de comparaison.
1) Intégration des soins par l'ajout d'un service à un service existant (les patients souffrant de tuberculose (TB) ou d'une infection sexuellement transmissible (IST) se sont vus offrir le dépistage du VIH et du counseling ; les mères se rendant à un dispensaire de vaccination ont été encouragées à recevoir des services de planification familiale).
2) Services intégrés versus services uniques et spécialisés (planification familiale, soins de la mère et de l'enfant fournis sous la forme d'un programme vertical spécial ou intégrés dans la prestation de soins de routine).
Les études incluses fournissaient certaines preuves que l'ajout de services ou la création de liens à un service existant améliorent leur utilisation ainsi que la prestation des soins médicaux, mais peu ou pas de preuves qu'une plus forte intégration des services médicaux primaires améliore l'état de santé des gens dans les pays à faible ou moyen revenu. Les gens doivent être conscients que l'intégration n'améliore pas forcément la prestation de service ou l'état de santé. Si les responsables politiques envisagent d'intégrer des services médicaux, ils devraient effectuer un suivi et une évaluation à l'aide d'études bien conçues.
Il existe certaines preuves que l'ajout de services (ou couplages) peut améliorer l'utilisation des soins médicaux et les résultats obtenus. Cependant, il n'existe aucune preuve à ce jour qu'une forme d'intégration plus complète améliore la prestation des soins médicaux ou l'état de santé. Les données disponibles suggèrent qu'une intégration complète diminue probablement la connaissance et l'utilisation de services spécifiques et ne donne lieu à aucune amélioration de l'état de santé. De nouvelles études plus rigoureuses sont nécessaires sur différentes stratégies de promotion de l'intégration couvrant une plus large gamme de services et de contextes. Ces études devraient inclure une évaluation économique et les points de vue des clients puisque ceux-ci auront une influence sur l'adoption de stratégies d'intégration sur le lieu de prestation et sur l'efficacité de ces stratégies sur la santé au sein de la communauté.
Dans certains pays à faible et moyen revenu, des programmes verticaux distincts offrent des interventions vitales spécifiques mais risquent de fragmenter les services. Les stratégies d'intégration de services visent à réunir les entrées, l'organisation et la prestation de fonctions particulières afin d'accroître leur efficacité ainsi que l'accès du public. Nous avons examiné les données sur l'efficacité des stratégies d'intégration sur le lieu de prestation (parfois appelées 'couplages'), y compris la prestation intégrée de soins contre la tuberculose (TB) et le VIH/SIDA et de services de santé reproductive.
Évaluer les effets des stratégies d'intégration de services de santé primaires sur la prestation des soins médicaux et l'état de santé dans les pays à faible et moyen revenu.
Nous avons effectué une recherche dans le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL) 2010, numéro 3, faisant partie de The Cochrane Library. www.thecochranelibrary.com et incluant le registre spécialisé du groupe Cochrane sur l'efficacité des pratiques et l'organisation des soins (recherche effectuée le 15 septembre 2010) ; ainsi que dans MEDLINE, Ovid (de 1950 à la 5ème semaine d'août 2010) (recherche le 10 septembre 2010) ; EMBASE, Ovid (de 1980 à la 35ème semaine de 2010) (recherche le 10 septembre 2010) ; CINAHL, EBSCO (de 1980 à aujourd'hui) (recherche le 20 septembre 2010) ; Sociological Abstracts, CSA Illumina (de 1952 à aujourd'hui) (recherche le 10 septembre 2010) ; Social Services Abstracts, CSA Illumina (de 1979 à aujourd'hui) (recherche le 10 septembre 2010) ; POPLINE (de 1970 à aujourd'hui) (recherche le 10 septembre 2010) ; International Bibliography of the Social Sciences, Webspirs (de 1951 à aujourd'hui) (recherche le 1er juillet 2008) ; HealthStar (de 1975 à septembre 2005), Cab Health (de 1972 à 1999) et dans les références bibliographiques d'articles. Nous avons également cherché dans la base de données de la bibliothèque de l'Organisation mondiale de la Santé (WHOLIS), recherché manuellement dans les publications pertinentes de l'OMS et contacté des experts dans le domaine.
Des essais contrôlés randomisés, des essais contrôlés non-randomisés, des études contrôlées avant-après et des analyses de séries temporelles interrompues portant sur des stratégies d'intégration, y compris le renforcement de couplages, en soins médicaux primaires. Les services médicaux dans les pays à revenu élevé, les partenariats public-privé et les soins aux patients hospitalisés ont été exclus, de même que les programmes promouvant la prise en charge intégrée des maladies infantiles. Les principaux résultats rendaient compte de la prestation de soins, des points de vue des utilisateurs et de l'état de santé.
Deux auteurs ont extrait les données et évalué le risque de biais de manière indépendante. Les résultats statistiques des différentes études sont rapportés et résumés.
Cinq essais randomisés et quatre études contrôlées avant-après ont été inclus. Les interventions étaient complexes.
Cinq études avaient ajouté un élément supplémentaire, ou couplé un nouveau composant, à un service existant, comme l'ajout de la planification familiale ou de prestations de counseling et dépistage pour le SIDA aux services de routine. Les résultats de ces études indiquaient que l'ajout de services augmente probablement l'utilisation des services mais n'a sans doute pas d'effet sur la santé du public, par exemple sur les grossesses accidentelles.
Quatre études avaient comparé des services intégrés à des services uniques spécialisés. Sur la base des études incluses, la pleine intégration des infections transmissibles sexuellement (IST), de la planification familiale et des services médicaux à la mère et l'enfant dans les soins de routine, plutôt que de les dispenser dans le cadre de services 'verticaux' spécialisés, pourrait diminuer leur utilisation, la connaissance qu'en a l'usager et sa satisfaction des services et n'entraîner aucune différence au niveau de la santé, par exemple pour les taux de survie des enfants. L'intégration de la prévention et du contrôle du VIH au niveau de l'établissement de soins et de la communauté améliorait l'efficacité de certains services (traitement des IST chez les hommes), mais n'entraînait pas de différence dans les comportements à risques, l'incidence des IST ou l'incidence du VIH dans la population.