Messages clés
- Le cytomégalovirus (CMV, virus de la famille herpès apparenté à la varicelle) est un virus courant, dont la majorité des personnes sont exposées à l'âge adulte. Le CMV est une cause majeure de maladie et de décès au cours de la première année suivant la transplantation. Les stratégies de prévention comprennent 1) l'administration quotidienne de faibles doses d'un antiviral à tous les transplantés d'organe (prophylaxie) ou 2) la prescription d'un antiviral lorsqu'un patient greffé développe une infection confirmée en laboratoire (traitement préemptif).
- Par rapport au placebo ou aux soins standards, le traitement préemptif réduit probablement le risque de maladie à CMV. Cependant, nous sommes moins confiants dans les résultats pour d'autres critères de jugement tels que le décès, l’affection d'autres organes par le CMV, les symptômes du CMV, le rejet aigu (le système immunitaire de l'organisme attaque l'organe transplanté), la perte de l'organe transplanté, d'autres infections, ou un taux faible de globules blancs.
- Par rapport à la prophylaxie antivirale, le traitement préemptif réduit probablement le risque de taux faible de globules blancs et ne fait probablement que peu ou pas de différence sur le risque de décès. Cependant, nous sommes moins confiants dans le fait que le traitement préemptif pourrait augmenter le risque d'infection par le CMV, ou n’avoir peu ou pas d’impact sur le rejet aigu, de perte de l'organe transplanté ou le risque d'infections autres qu’au CMV.
Qu'est-ce que le cytomégalovirus ?
Le cytomégalovirus (CMV, un virus de la famille herpès apparenté à la varicelle) est un virus courant, dont la majorité des personnes sont exposées à l'âge adulte. Une fois qu'une personne est infectée, le virus reste vivant mais généralement inactif (dormant) dans son corps à vie. Il ne pose normalement pas de problème ; cependant, chez les personnes dont le système immunitaire (le mécanisme de lutte de l'organisme contre tout ce qui est étranger) ne fonctionne pas bien, le virus peut se réveiller. Les personnes qui ont reçu une greffe de rein, de cœur, de foie, de poumon ou de pancréas (transplantation d'organe solide) doivent prendre des médicaments puissants pour empêcher que leur corps essaye de combattre (ou rejeter) cette greffe. Ces médicaments ralentissent le système immunitaire et le virus pourrait se réactiver et affecter l’organe greffé. Le CMV est une cause majeure de maladie et de décès au cours de la première année suivant la transplantation.
Il est important de faire la distinction entre l'infection par le CMV et la maladie à CMV : tous les patients infectés par le CMV ne développeront pas une maladie clinique avec des symptômes. Deux grandes stratégies ont été adoptées afin de prévenir la maladie à CMV : 1) l'administration quotidienne de faibles doses d'un antiviral à tous les patients greffés d'organe (prophylaxie) ou 2) la prescription d'un antiviral lorsqu'un patient greffé développe une infection confirmée en laboratoire (traitement préemptif).
Que voulions-nous découvrir ?
Nous voulions savoir si le traitement préemptif destiné aux patients transplantés qui risquent de développer une maladie à CMV, plutôt que l'administration d'une prophylaxie à tous les patients, y compris ceux qui sont peu susceptibles de développer une maladie à CMV, prévient le développement d'une maladie à CMV, le décès et les événements indésirables.
Comment avons-nous procédé ?
Notre recherche a concerné tous les essais qui évaluent les bénéfices et risques du traitement préemptif avec des antiviraux pour prévenir la maladie à CMV chez les patients transplantés d'organes solides. Nous avons comparé et résumé les résultats des essais et évalué notre confiance dans les informations sur la base de facteurs tels que les méthodes et la taille des essais.
Qu’avons-nous trouvé ?
Nous avons trouvé 22 études portant sur 1 883 personnes (adultes et enfants) ayant reçu une transplantation rénale, hépatique, cardiaque, pulmonaire ou rein-pancréas. Les études ont été menées en Australie, au Brésil, en République Tchèque, en Allemagne, en Italie, au Japon, en Norvège, en Espagne, en Corée du Sud et aux États-Unis. Le nombre de participants variait de 12 à 296. Les études comparaient le traitement préemptif à un placebo ou aux soins standards (7 études), le traitement préemptif par rapport à la prophylaxie antivirale (12), le traitement préemptif par ganciclovir par voie orale par rapport à la voie intraveineuse (1), le traitement préemptif par valganciclovir par rapport au ganciclovir (1), et deux stratégies préventives avec dosages différents du létermovir (1).
Par rapport au placebo ou aux soins standards, le traitement préemptif réduit probablement le risque de maladie à cytomégalovirus (CMV), mais ferait peu ou pas de différence en termes de décès, d'atteintes d’autres organes par le CMV, de symptômes liés au CMV, de rejet aigu (le système immunitaire de l'organisme attaque l'organe transplanté), de perte du greffon, d'autres infections ou de taux faible de globules blancs.
Comparé à la prophylaxie antivirale, le traitement préemptif ferait peu ou pas de différence sur le risque de développer une maladie à CMV et fait probablement peu ou pas de différence sur le risque de décès. L'infection par le CMV pourrait augmenter avec le traitement préemptif, tandis que le risque d’un taux faible de globules blancs diminue probablement. Il y aurait peu ou pas de différence sur les risques de rejet aigu, de perte du greffon et d'infections autres que la CMV.
Quelles sont les limites des données probantes ?
Nous sommes modérément confiants dans le fait que, par rapport au placebo ou aux soins standards, le traitement préemptif réduit le risque de maladie à CMV ; cependant, nous sommes moins confiants dans les résultats pour les autres critères de jugement.
Nous sommes modérément confiants dans le fait que, par rapport à la prophylaxie antivirale, le traitement préemptif réduit probablement le risque d’un taux faible de globules blancs ; cependant, nous sommes moins confiants dans le fait que le traitement préemptif augmenterait le risque d'infection par le CMV.
Les données probantes sont-elles à jour ?
Les données probantes sont à jour à la date du 17 décembre 2024.
Nous avons inclus sept nouvelles études dans cette revue, pourtant les données probantes disponibles sont globalement d'un faible niveau de confiance et les conclusions restent similaires à la version précédente de cette revue. Le traitement préemptif réduit probablement le risque de maladie à cytomégalovirus (CMV), comparé au placebo ou aux soins standards. Il n'y avait pas de différences claires entre le traitement préemptif et la prophylaxie pour prévenir la maladie à CMV ou réduire le risque de décès (toutes causes confondues). Le risque d'infection par le CMV pourrait être plus élevé chez les patients traités par un traitement préemptif par rapport à la prophylaxie, mais le risque d'événements indésirables, tel que la leucopénie, est probablement plus faible.
Le cytomégalovirus (CMV) est une cause significative de morbidité et de mortalité chez les patients transplantés d'organes solides. Le traitement préemptif par antiviraux de patients présentant une virémie à CMV a été suggéré comme une alternative à la prophylaxie de routine pour prévenir la maladie à CMV. Il s'agit d'une mise à jour d'une revue Cochrane publiée pour la première fois en 2006 et actualisée en 2013.
Déterminer les bénéfices et les risques d’un traitement préemptif de la virémie à CMV pour prévenir la maladie à CMV, le décès (toutes causes confondues) et les effets indirects de l'infection à CMV (rejet aigu, perte du greffon, infections opportunistes) chez les patients transplantés d'organes solides.
Nous avons interrogé le registre Cochrane sur le rein et la greffe jusqu'au 17 décembre 2024 en utilisant des termes de recherche pertinents pour cette revue. Les études dans ce registre sont identifiées via des recherches dans CENTRAL, MEDLINE et EMBASE, ainsi que dans les compte-rendus de conférences, le portail de recherche du système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) et ClinicalTrials.gov.
Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) et des quasi-ECR comparant le traitement préemptif au placebo, au traitement non spécifique ou à la prophylaxie antivirale chez des transplantés d'organes solides.
Deux auteurs ont évalué de façon indépendante l'éligibilité des études identifiées, les risques de biais et ont extrait les données. Pour les critères de jugement dichotomiques, les résultats sont exprimés sous forme de risques relatifs (RR) avec des intervalles de confiance (IC) à 95 %. Les analyses statistiques sont réalisées à l'aide d'un modèle à effets aléatoires. Le niveau de confiance des données probantes est évalué pour chaque critère de jugement en utilisant l'approche GRADE (Grade of Recommendation, Assessment, Development and Evaluation).
Nous avons inclus sept nouvelles études dans cette mise à jour, ce qui porte le nombre total d'études incluses à 22 (1 883 participants). Parmi ceux-ci, sept ont porté sur le traitement préemptif par rapport au placebo ou à des soins standards, 12 ont porté sur le traitement préemptif par rapport à la prophylaxie antivirale, une a porté sur le traitement préemptif par voie orale par rapport à son administration par voie intraveineuse, une a porté sur le valganciclovir préemptif par rapport au ganciclovir préemptif, et une a porté sur le létermovir en 40 mg deux fois par jour par rapport à 80 mg une fois par jour: Les études ont été menées en Australie, au Brésil, en République Tchèque, en Allemagne, en Italie, au Japon, en Norvège, en Espagne, en Corée du Sud et aux États-Unis. Les receveurs de greffes d'organes comprenaient des greffes de rein, de foie, de cœur, de poumon et de rein-pancréas. Treize études étaient monocentriques, six étaient multicentriques et trois étaient inconnues. Le nombre de participants variait de 12 à 296 dans les études. Dans l'ensemble, le biais de sélection n'était pas clair (55 %), les biais de performance diagnostique, de détection et d'attrition étaient élevés (respectivement 91 %, 63 % et 95 %), et les biais de notification étaient faibles (55 %).
Comparé au placebo ou aux soins standards, le traitement préemptif réduit probablement le risque de maladie à CMV (7 études, 315 participants : RR = 0,29, IC à 95 % : 0,11 à 0,80 ; I 2 = 54 % ; données probantes d’un niveau de confiance modéré) mais n’entraînerait que peu ou pas de différence en termes de décès (toutes causes confondues) (3 études, 176 participants : RR = 1,23, 95, IC à 95 % : 0,35 à 4,30 ; I 2 = 0% ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Le traitement préemptif pourrait n’entraîner que peu ou pas de différence dans les atteintes d’organes liées au CMV, les symptômes associés au CMV, le rejet aigu, la perte du greffon, d'autres infections ou la leucopénie.
Il pourrait avoir peu ou pas de différence sur le risque de développer une maladie à CMV avec le traitement préemptif par rapport à la prophylaxie (11 études, 1 322 participants : RR = 0,97, IC à 95 % : 0,47 à 2,01 ; I 2 = 54 % ; données probantes d’un niveau de confiance faible) et il y a probablement peu ou pas de différence en ce qui concerne les décès (toutes causes confondues) (9 études, 1 098 participants : RR = 0,95, IC à 95 % : 0,60 à 1,52 ; I 2 = 0 % ; données probantes d’un niveau de confiance modéré). Le traitement préemptif pourrait augmenter le risque d'infections par le CMV (8 études, 867 participants : RR = 1,97, IC à 95 % : 1,48 à 2,61 ; I 2 = 66 % ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Le risque de leucopénie (7 études, 869 participants : RR = 0,57, IC à 95 % : 0,38 à 0,87 ; I 2 = 33 % ; données probantes d’un niveau de confiance modéré) et de neutropénie (5 études, 859 participants : RR = 0,63, IC à 95 % : 0,44 à 0,90 ; I 2 = 0 % niveau de confiance des données probantes modéré) diminue probablement avec le traitement préemptif. Il y aurait peu ou pas de différence sur les risques de rejet aigu, de perte du greffon et d'infections autres que la CMV.
Des études uniques ont été identifiées pour les comparaisons entre différents traitements préemptifs : 1) ganciclovir par voie orale par rapport au ganciclovir par voie IV ; 2) valganciclovir par rapport au ganciclovir ; 3) 40 mg deux fois par jour par rapport à 80 mg une fois par jour. Entre ces modalités de traitement, aucune différence en termes de maladie à CMV, de décès (toutes causes confondues) ou d’événements indésirables n'a été identifiée.
Traduction et Post-édition réalisées par Cochrane France avec le soutien de Wenzhang Yu (bénévole chez Cochrane France) et grâce au financement du Ministère de la Santé. Une erreur de traduction ou dans le texte original ? Merci d’adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr