Question de la revue
Étudier si le test de d-dimères peut écarter un diagnostic d’embolie pulmonaire aiguë chez les patients traités à l’hôpital en soins ambulatoires et dans les unités d’accidentés et d’urgences.
Contexte
L’embolie pulmonaire est une pathologie grave, potentiellement mortelle, qui survient lorsqu’un caillot de sang se loge dans les vaisseaux sanguins des poumons. Lorsqu’une personne arrivant aux urgences d’un hôpital signale des difficultés respiratoires, un essoufflement et des douleurs thoraciques, plusieurs explications sont possibles mais un diagnostic rapide est nécessaire. Les tests disponibles pour détecter les caillots de sang dans les poumons peuvent être invasifs et prendre du temps, entraîner une exposition à des rayonnements et coûter cher. Des tests rapides, faciles à utiliser et peu coûteux, permettant d’exclure ce diagnostic, seraient très précieux.
L’un de ces tests est l’analyse des d-dimères, qui détecte dans le sang de petites molécules de protéines appelées d-dimères. Quand une personne présentant des symptômes d’essoufflement et de douleurs thoraciques arrive aux urgences d’un hôpital, le personnel procède à son examen et lui pose des questions sur ses antécédents médicaux et son mode de vie. Il calcule, à partir de ces questions, un score chiffrant le risque que les symptômes du patient soient dus à une embolie pulmonaire.
Si le score révèle un risque élevé, le patient est immédiatement envoyé en imagerie diagnostique (ou traité en attendant les résultats des tests). Une analyse des d-dimères peut être demandée pour les personnes à risque faible ou modéré (ou peu probable) ; si son résultat est négatif, on peut écarter le diagnostic d’embolie pulmonaire sans qu’un examen d’imagerie soit nécessaire.
Caractéristiques de l'étude
Cette revue a examiné toutes les données probantes fournies par les études qui évaluent l’utilité des d-dimères pour exclure le diagnostic d’embolie pulmonaire chez les patients de soins ambulatoires et des urgences.
Nous avons évalué tous les comptes-rendus disponibles à l’issue d’une vaste recherche dans les bases de données de littérature médicale. Deux auteurs ont évalué indépendamment les études qui répondaient aux critères de la revue, notamment l’utilisation d’un plan d’étude dit transversal, l’inclusion de personnes présentant des symptômes d’embolie pulmonaire et se présentant aux services ambulatoires et d’urgences, l’utilisation d’un score de risque puis d’un test de d-dimères et une comparaison des résultats du test de d-dimères avec ceux des meilleurs examens disponibles : scintigraphie de ventilation/perfusion, angiographie pulmonaire et angioscan pulmonaire.
Résultats principaux
Quatre études répondaient à nos critères d’inclusion et les données de 1585 patients étaient disponibles. Nous avons trouvé des preuves qu’un test de d-dimères négatif (pas d’embolie) est très efficace pour exclure l’embolie pulmonaire et identifier les personnes sans embolie. Toutefois, le nombre élevé des faux positifs suggère que les personnes présentant une élévation des d-dimères pourraient ne pas toutes avoir une embolie pulmonaire et qu’un résultat positif doit donc être suivi d’un examen d’imagerie. Dans une étude, les faux positifs étaient plus fréquents chez les personnes âgées de plus de 65 ans.
Qualité des preuves
Le flux des patients et le moment du test de d-dimères, ainsi que la norme de référence du test, ont été notre principale préoccupation méthodologique. Aucune étude ne présente un diagramme indiquant le flux de patients tout au long de son déroulement et une seule rapporte clairement le temps écoulé entre l’administration des tests d’indice et de référence. Dans les trois études restantes, le temps écoulé entre les tests d’indice et l’obtention de la norme de référence n’était pas clairement rapporté, ce qui nous conduit à considérer le biais comme incertain.
Conclusions
Des données limitées issues des études incluses dans cette revue suggèrent que les tests de d-dimères quantitatifs utilisés dans les services d’urgences donnent peu de faux négatifs mais une proportion très élevée de faux positifs, avec une bonne sensibilité dans tous les groupes d’âge. Le test est donc utile comme moyen d’exclusion mais un résultat positif nécessite un examen d’imagerie diagnostique.
Un test de d-dimères négatif est utile pour exclure une embolie pulmonaire chez les patients qui se présentent aux urgences avec une probabilité d'embolie pulmonaire basse. Les données d’une étude suggèrent que ce test serait moins utile dans les populations âgées, mais nous n’avons trouvé aucune donnée empirique en faveur d'une élévation du seuil de diagnostic dans l’interprétation des résultats de d-dimères pour les patients de plus de 65 ans.
L’embolie pulmonaire survient quand un caillot sanguin (thrombus) chemine dans les veines et vient obstruer les artères des poumons. Les personnes considérées comme à risque sont les patients atteints d’un cancer, ayant récemment subi une intervention chirurgicale ou immobilisés pendant longtemps, ainsi que les femmes enceintes. La présentation clinique peut varier mais des symptômes respiratoires inexpliqués, tels que des difficultés respiratoires, des douleurs thoraciques et une augmentation de la fréquence respiratoire, sont courants.
Les d-dimères sont des fragments de protéines libérés dans la circulation quand un caillot sanguin se dissout, que ce soit au cours de processus physiologiques normaux ou sous l’effet de médicaments fibrinolytiques. La recherche des d-dimères par un test en laboratoire permet d’exclure une thromboembolie veineuse (TEV) si leur taux n’est pas élevé. Le test de d-dimères est rapide, simple et peu coûteux et permet d’éviter les frais liés à d’autres méthodes de diagnostic onéreuses.
Étudier si le test de d-dimères peut écarter un diagnostic d’embolie pulmonaire aiguë chez les patients traités à l’hôpital en soins ambulatoires et dans les unités d’accidentés et d’urgences, dont la probabilité d’embolie pulmonaire a été déterminée avant le test suivant une règle de prédiction clinique, en évaluant la précision du test selon des estimations de sensibilité et de spécificité. Cette revue se concentre sur les patients qui n’ont pas déjà un traitement anticoagulant établi au moment du recrutement dans l’étude.
Nous avons effectué une recherche dans 13 bases de données, de leur création à décembre 2013. Nous avons croisé les listes de références des études pertinentes.
Deux auteurs de la revue ont appliqué indépendamment les critères d’exclusion aux articles complets et résolu les désaccords par la discussion.
Nous avons inclus des études transversales des d-dimères utilisant la scintigraphie de ventilation/perfusion, l’angiographie pulmonaire, l’angiographie pulmonaire sélective et l’angiographie par résonance magnétique (angio-IRM) comme norme de référence.
• Participants : les adultes pris en charge à l’hôpital en soins ambulatoires ou aux urgences et soupçonnés de présenter une embolie pulmonaire aiguë étaient éligibles à l’inclusion dans la revue si leur score avant le test, réalisé sur la base d’une règle de prédiction, indiquait une probabilité d’embolie.
• Tests d’index : analyses quantitatives, semi-quantitatives et qualitatives des d-dimères.
• Pathologie visée : embolie pulmonaire aiguë symptomatique.
• Normes de référence : nous avons inclus des études des d-dimères utilisant l’angiographie pulmonaire, la scintigraphie de ventilation/perfusion, l’angiographie pulmonaire sélective et l’angio-IRM comme norme de référence.
Deux auteurs de la revue ont extrait indépendamment les données et évalué leur qualité suivant le modèle QUADAS-2 (évaluation de qualité de la précision diagnostique). Nous avons résolu les désaccords par la discussion. Les auteurs de la revue ont extrait les données disponibles pour remplir des tables de contingence de 2 × 2 (vrais positifs [VP], vrais négatifs [VN], faux positifs [FP] et faux négatifs [FN]).
Nous avons inclus quatre études dans la revue (n = 1585 patients). Aucune des études ne présentait un risque élevé de biais dans aucun des domaines de QUADAS-2, mais la validité des études dans quelques domaines à risque de biais incertain était elle-même incertaine. Les tests de d-dimères ont fait preuve d’une sensibilité démontrée dans les quatre études, mais avec des taux élevés de faux positifs, en particulier chez les patients âgés de plus de 65 ans. Les estimations de sensibilité variaient de 80 % à 100 %, et les estimations de spécificité de 23 % à 63 %.
Traduction réalisée par Suzanne Assénat et révisée par Cochrane France