Quelle est la question ?
Le syndrome hémolytique et urémique (SHU) est une affection caractérisée par l'obstruction de petits vaisseaux sanguins entraînant la destruction de cellules sanguines et le dysfonctionnement de plusieurs organes, notamment les reins. Elle est généralement causée par des infections, souvent par E.Coli, et peut être associée à de la diarrhée. Une forme rare de SHU, appelée SHU atypique (SHUa), est une forme plus agressive de la maladie, causée par des anomalies héréditaires ou acquises des protéines impliquées dans le contrôle d'un composant de notre système immunitaire appelé « système du complément ». Près de la moitié des cas concernent des patients âgés de moins de 18 ans. Dans le passé, le diagnostic de SHUa était associé à un mauvais pronostic, les patients évoluant souvent vers une insuffisance rénale et la mort. Plus récemment, une meilleure compréhension de cette maladie a permis d'améliorer la prise en charge. Cette revue vise à évaluer l'utilité de ces traitements en examinant systématiquement les données probantes disponibles afin de déterminer les traitements les plus efficaces pour le SHUa.
Comment avons-nous procédé ?
Nous avons effectué des recherches approfondies dans la littérature et trouvé cinq études qui ont testé des thérapies pour le SHUa. Dans quatre études, le traitement utilisé était l'éculizumab et dans une étude, le traitement était le ravulizumab. Ces deux médicaments, récemment mis au point, agissent de manière similaire et se sont révélés prometteurs dans d'autres pathologies.
Qu’avons-nous trouvé ?
Les études incluses ont démontré que la majorité des patients traités par l'éculizumab ou le ravulizumab ont eu une amélioration de la fonction rénale, et chez une grande partie l’amélioration était suffisante pour arrêter le traitement par dialyse. Les marqueurs sanguins de l'activité de la maladie se sont également améliorés de manière significative. Au cours des 26 semaines de traitement, aucun patient ayant reçu de l'éculizumab n'est décédé, bien que deux patients aient contracté des infections à méningocoques, une conséquence probable du traitement. Bien que quatre patients traités au ravulizumab soient décédés, aucun de ces décès n'a été considéré comme étant causé par le médicament. La qualité de vie des patients traités avec les deux médicaments a été améliorée de manière significative.
Conclusions
le SHUa est une maladie extrêmement rare qui, sans traitement, est souvent mortelle. Pour cette raison, nous n'avons trouvé aucune étude permettant de comparer un traitement à un autre, ou vis à vis de l'absence de traitement. Au lieu de cela, les études incluses ont donné à tous les participants soit de l'éculizumab, soit du ravulizumab, avec des résultats uniquement comparables aux données historiques obtenues avant que ces médicaments ne soient disponibles. Cela introduit un biais substantiel dans cette revue, et limite donc la confiance de toutes recommandations qui en découlent. Néanmoins, les meilleures données probantes disponibles suggèrent que le traitement par éculizumab ou ravulizumab est efficace chez les patients atteints de SHUa et semble supérieur aux traitements précédents.
Par rapport aux données historiques, l'inhibition de la voie terminale du système du complément semble offrir des critères de jugement favorables chez les patients atteints de syndrome hémolytique et urémique atypique (SHUa), sur la base de données probantes d’un niveau de confiance très faible, venant de cinq études à un seul bras. Il est peu probable qu'un ECR soit mené dans le cadre du traitement du SHUa. Par conséquent, un examen minutieux des futures données sur les essais avec un seul bras d'étude, ainsi que des données de suivi à plus long terme sera nécessaire pour mieux comprendre la durée du traitement, les effets indésirables et le risque de récidive de la maladie associés au traitement par inhibition de la voie terminale du système du complément.
Le syndrome hémolytique et urémique atypique (SHUa) est une maladie rare caractérisée par une thrombocytopénie, une anémie hémolytique microangiopathique et une insuffisance rénale aiguë. La maladie est principalement causée par un dérèglement héréditaire ou acquis des protéines régulatrices du système du complément. Environ 40 % des personnes touchées sont âgées de moins de 18 ans. Dans le passé, l'insuffisance rénale et la mort étaient des évolutions courantes, mais une meilleure compréhension de cette maladie a permis de découvrir de nouvelles thérapies.
Évaluer les bénéfices et les risques des interventions pour le SHUa.
Nous avons recherché dans le registre spécialisé du groupe Cochrane sur les reins et les greffes, les essais contrôlées randomisées (ECR) jusqu'au 3 septembre 2020, en utilisant les termes de recherche pertinents pour cette revue. Les études figurant dans le registre sont identifiées grâce à des recherches dans CENTRAL, MEDLINE et EMBASE, des actes des conférences, le système d’enregistrement international des essais cliniques de l’OMS (ICTRP) et le site ClinicalTrials.gov. Des recherches ont été menées dans MEDLINE (OVID) de 1946 au 27 juillet 2020 et dans EMBASE (OVID) de 1974 au 27 juillet 2020 pour les non-ECR.
Tous les essais cliniques randomisés et non randomisés comparant une intervention avec un placebo, une intervention avec un traitement de soutien, ou deux ou plusieurs interventions pour le SHUa ont été inclus. Compte tenu de la nature rare de l'affection en question, les études prospectives à un seul bras portant sur toute intervention pour le SHUa, ont été incluses également.
Deux auteurs ont indépendamment extrait les données pré-spécifiées des études éligibles, et ont évalué le risque de biais à l'aide d'un outil nouvellement développé, basé sur les critères Cochrane existants. La méta-analyse statistique n'étant pas appropriée, une analyse qualitative des données a alors été réalisée.
Nous avons inclus cinq études à un seul bras, qui ont toutes évalué l'inhibition de la voie terminal du système complément pour le traitement du SHUa. Quatre études ont évalué l'éculizumab, un inhibiteur de C5 à action brève, et une étude a évalué le ravulizumab, un inhibiteur de C5 à action longue. Toutes les études incluses dans la revue étaient non randomisées et à un seul bras. Le risque de biais est donc élevé et il est difficile de tirer des conclusions fermes de ces données probantes d’un niveau de confiance faible. Cent patients ont été inclus dans trois études primaires évaluant l'éculizumab, et des données supplémentaires ont été rapportées pour 37 patients dans une étude secondaire. Cinquante-huit patients ont été inclus dans l'étude sur le ravulizumab. Après 26 semaines de traitement à l'éculizumab, il n'y a eu aucun décès, et une réduction de 70 % du nombre de patients nécessitant une dialyse. Une réponse complète aux microangiopathies thrombotiques (MAT) a été observée chez 60 % des patients après 26 semaines et 65 % après deux ans. Après 26 semaines de traitement par ravulizumab, quatre patients étaient décédés (7 %) et une réponse complète au traitement de la MAT a été observée chez 54 % des patients. Des améliorations substantielles ont été observées dans le débit de filtration glomérulaire estimé et dans la qualité de vie liée à la santé, dans les études portant sur l'éculizumab et le ravulizumab. Des effets indésirables graves sont survenus chez 42 % des patients, et une infection à méningocoque est survenue chez deux patient traités par l'éculizumab.
Post-édition effectuée par Nicolas Cornière et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr