Les tumeurs qui se caractérisent par la présence de protéines HER2 sont observées chez environ une sur cinq patientes atteintes de cancer du sein métastatique. Celles-ci ont tendance à être plus agressives et le pronostic et le choix du traitement en sont affectés. Le trastuzumab (Herceptin®) est un médicament biologique ciblé (un anticorps monoclonal) qui s'attache à la protéine HER2, bloquant la croissance des cellules malignes.
Nous avons inclus dans cette revue sept essais totalisant 1 497 femmes atteintes d'un cancer du sein HER2-positif métastatique. Les patientes ont été assignées au hasard pour recevoir du trastuzumab avec ou sans chimiothérapie (taxanes, anthracyclines ou capécitabine dans quatre études), un traitement hormonal (inhibiteurs de l'aromatase y compris létrozole ou anastrozole dans deux études) ou un traitement ciblé (lapatinib dans une étude). Les femmes traitées avec du trastuzumab ont été suivies jusqu'à la progression de la maladie dans cinq études et au-delà de la progression de la maladie dans deux études. La durée d'administration du trastuzumab variait entre 8,7 et 30 mois, et le suivi moyen était de deux ans après le début du trastuzumab.
Toutes les études ont trouvé que le trastuzumab prolongeait le délai jusqu'à progression de la maladie, avec des bénéfices variables entre deux et 11 mois, et dans cinq études, il a prolongé le délai jusqu'au décès par entre cinq et huit mois. Cependant, certaines patientes développent une toxicité cardiaque grave (insuffisance cardiaque congestive) pendant le traitement. Tandis que le trastuzumab réduit la mortalité par cancer du sein par un cinquième, le risque de toxicité cardiaque est entre trois et quatre fois plus probable. Si 1 000 femmes recevaient un traitement standard seul (sans trastuzumab), environ 300 survivraient et 10 souffriraient de toxicités cardiaques. Avec l'ajout de trastuzumab à ce traitement, 73 patientes de plus prolongeraient leur vie, et 25 de plus souffriraient de toxicité cardiaque grave. En ne tenant pas compte des groupes sous anthracyclines-trastuzumab (qui ne serait pas considéré comme le traitement standard), 21 patientes souffriraient de toxicité cardiaque grave (11 de plus que dans le groupe de chimiothérapie seule). Ces toxicités cardiaques sont souvent réversibles si le traitement est arrêté une fois la cardiopathie découverte. Les femmes atteintes d'une maladie avancée pourraient choisir d'accepter ce risque. Dans l'ensemble, cette revue montre qu'avec le trastuzumab, le délai jusqu'à progression de la maladie et les effets bénéfiques sur la survie compensent le risque de problèmes cardiaques.
Le trastuzumab n'augmente pas le risque de toxicités hématologiques, telles que la neutropénie fébrile ou l'anémie ; cependant, il semble augmenter le risque de neutropénie. Il n'y avait pas suffisamment de données sur l'impact du trastuzumab sur la qualité de vie, les décès liés au traitement et les métastases cérébrales pour tirer une conclusion pour ces critères de jugement.
Nous avons évalué la qualité globale des preuves comme modérée, les principales faiblesses étant le fait que toutes les études incluses étaient ouvertes (pas en aveugle), ce qui peut avoir affecté l'évaluation des résultats pour le délai jusqu'à progression de la maladie et la toxicité, et que deux études n'ont pas publié leurs résultats pour la mortalité. En outre, dans trois des sept études le recrutement a été arrêté prématurément et dans trois essais, plus de 50 % des patientes dans les groupes témoins ont été autorisées à passer dans les groupes sous trastuzumab à la progression de la maladie, ce qui rend plus difficile à comprendre le bénéfice net réel du trastuzumab sur la mortalité. Les preuves favorables à l'utilisation du trastuzumab au-delà de la progression de la maladie sont limitées.
Il est important de souligner que, bien que le trastuzumab soit utilisé chez les femmes atteintes d'un cancer du sein HER2-positif au stade précoce, les femmes incluses dans ces essais métastatiques n'avaient pas été préalablement traitées avec le trastuzumab. L'efficacité du trastuzumab pour les patientes récidivant après l'ajout du trastuzumab est encore une question ouverte, bien qu'il soit probable que la majorité d'entre elles se le voient proposer.
Le trastuzumab a amélioré la survie globale et la survie sans progression chez les femmes HER2-positives atteintes d'un cancer du sein métastatique, mais il a également accru le risque de toxicités cardiaques, telles que l'insuffisance cardiaque congestive et une diminution de la FEVG. Les analyses en sous-groupes disponibles sont limitées par le petit nombre d'études. Les études ayant administré le trastuzumab comme traitement de première ligne, ou en association avec un schéma thérapeutique à base de taxanes, ont observé une amélioration des critères de jugement de la mortalité. Les preuves favorables à l'utilisation du trastuzumab au-delà de la progression sont limitées. Dans trois des sept études, le recrutement a été arrêté prématurément, et dans trois essais, plus de 50 % des patientes dans les groupes témoins ont été autorisées à passer dans les groupes sous trastuzumab à la progression, ce qui rend le véritable bénéfice net de trastuzumab plus difficile à comprendre.
Dans la pratique clinique, le trastuzumab est généralement utilisé chez les femmes atteintes d'un cancer du sein HER2-positif au stade précoce, tandis que les femmes recrutées dans la plupart des essais dans le contexte métastatique n'avaient jamais été traitées par le trastuzumab. Ainsi, l'efficacité du trastuzumab pour les patientes récidivant après un traitement adjuvant au trastuzumab reste une question ouverte, bien qu'il soit probable que la majorité d'entre elles se le voient re-proposer.
Les patientes atteintes de cancer du sein sont classées selon qu'elles aient des cellules surexprimant le récepteur 2 du facteur de croissance épidermique humain (HER2-positive) ou non (HER2-négative). Généralement, les patientes atteintes de maladie HER2-positive ont un plus mauvais pronostic. Le trastuzumab est un traitement sélectif qui cible la voie HER2. Les preuves disponibles étayant des schémas thérapeutiques incluant du trastuzumab reposent principalement sur les critères de substitution et, bien que les résultats sur l'efficacité semblent étayer son utilisation, d'autres incertitudes ont été soulevées quant à son bénéfice net par rapport à la toxicité cardiaque transitoire et un risque accru à long terme de métastases du système nerveux central.
Évaluer les preuves sur l'efficacité et l'innocuité du traitement par le trastuzumab (globalement) et en fonction du type de schéma co-administré et de la ligne de traitement, soit de première ligne ou au-delà de la progression, chez les femmes atteintes d'un cancer du sein HER2-positif métastatique.
Nous avons effectué des recherches dans le registre spécialisé du groupe Cochrane sur le cancer du sein et utilisé la stratégie de recherche développée par ce groupe pour rechercher des essais contrôlés randomisés (ECR) dans CENTRAL (2013, numéro 1), MEDLINE, EMBASE, BIOSIS, le portail de recherche du système international d'enregistrement des essais cliniques (ICTRP) de l'OMS et ClinicalTrials.gov (jusqu'au 17 janvier 2013).
ECR comparant l'efficacité et l'innocuité du trastuzumab seul ou en association avec la chimiothérapie, l'hormonothérapie ou des agents ciblés chez les femmes atteintes d'un cancer du sein HER2-positif métastatique.
Nous avons recueilli les données des essais publiés. Nous avons utilisé les rapports des risques instantanés (hazard ratio ou HR) pour les critères du délai jusqu'à l'évènement et le risque relatif (RR) pour les résultats binaires. Les analyses en sous-groupes incluaient le type de schéma thérapeutique (contenant des taxanes, des anthracyclines, des inhibiteurs de l'aromatase ou autre) et la ligne de traitement (de première ligne, au-delà de la progression).
La revue a trouvé sept essais, impliquant 1 497 patientes, qui remplissaient les critères d'inclusion. Les essais étaient généralement de qualité méthodologique modérée ; deux études n'ont pas publié leurs résultats sur la survie globale, de sorte que la présence de biais de notification sélective de résultats ne peut pas être exclue. Aucune des études n'utilisait la mise en aveugle à l'assignation du traitement, bien que cela ait peu de chances d'avoir faussé les résultats pour la survie globale. Les études variaient en termes de schéma co-administré et de ligne de traitement. Dans quatre études, le trastuzumab était administré avec une chimiothérapie, telle qu'un schéma contenant des taxanes, des anthracyclines ou de la capécitabine. Deux études examinaient les femmes ménopausées et administraient du trastuzumab avec des médicaments bloqueurs d'hormones, tels qu'un inhibiteur de l'aromatase. Une étude administrait du trastuzumab en plus de lapatinib. Cinq études sur sept incluaient des femmes traitées avec du trastuzumab administré jusqu'à progression comme traitement de première ligne et deux études examinaient le trastuzumab au-delà de la progression. Les HR combinés pour la survie globale et la survie sans progression étaient en faveur des schémas thérapeutiques incluant du trastuzumab (HR 0,82, intervalle de confiance (IC) à 95 % 0,71 à 0,94, P = 0,004 ; et HR 0,61, IC à 95 % 0,54 à 0,70, P < 0,00001, respectivement ; preuves de qualité modérée). Le trastuzumab a augmenté le risque d'insuffisance cardiaque congestive (RR 3,49, IC à 90 % 1,88 à 6,47, P = 0,0009 ; preuves de qualité modérée) et de diminution de la fraction d'éjection ventriculaire gauche (FEVG) (RR 2,65, IC à 90 % 1,48 à 4,74, P = 0,006). Pour les toxicités hématologiques, telles que la neutropénie fébrile ou l'anémie, il n'y avait pas de preuve claire que les risques différaient entre les groupes, alors que le trastuzumab semblait augmenter le risque de neutropénie. L'amélioration de la survie globale a été maintenue en prenant en compte les patientes traitées de première intention ou les patientes recevant des schémas à base de taxanes. L'amélioration de la survie sans progression a été maintenue en prenant en compte les patientes recevant des schémas à base de taxanes ainsi que les les patientes traitées de première intention ou les lignes de traitement subséquents. Peu de données ont été recueillies sur la progression dans le système nerveux central. De même, peu d'études avaient rendu compte de la qualité de vie et des décès liés au traitement.
Translated by: French Cochrane Centre
Translation supported by: Financeurs pour le Canada : Instituts de Recherche en Santé du Canada, Ministère de la Santé et des Services Sociaux du Québec, Fonds de recherche du Québec-Santé et Institut National d'Excellence en Santé et en Services Sociaux; pour la France : Ministère en charge de la Santé