Médicaments pour réduire l'inflammation chez les personnes atteintes de la fièvre méditerranéenne familiale

Problématique de la revue

Les traitements tels que la colchicine, l'anakinra, le rilonacept, le canakinumab, l'étanercept, l'infliximab, l'adalimumab, la thalidomide, le tocilizumab, l'interféron-α et ImmunoGuard (un supplément à base de plantes)) peuvent-ils réduire l'inflammation chez les personnes atteintes de fièvre méditerranéenne familiale (FMF) ?

Contexte

La fièvre méditerranéenne familiale est une maladie inflammatoire héréditaire dont les crises se caractérisent par des symptômes comme une fièvre supérieure à 38°C, des douleurs et une inflammation des membranes entourant la cavité thoracique, les articulations ou les poumons. Nous voulions savoir, chez les personnes atteintes de FMF, si ces médicaments étaient plus efficaces qu’un placebo (un traitement factice ne contenant aucun médicament actif) ou qu’à l'absence de traitement pour réduire l’inflammation, ainsi que comparer ces médicaments entre eux.

Date de la recherche

Les données probantes sont à jour jusqu'au 17 août 2021.

Caractéristiques des études

La revue a porté sur 10 études réalisées auprès de 312 personnes atteintes de FMF et âgées de 3 à 53 ans. Huit études ont comparé cinq médicaments, la colchicine, le rilonacept, l’ImmunoGuard, l'anakinra et le canakinumab, à un placebo. Les participants ont reçu au hasard un médicament ou un placebo pendant un à quatre mois. Les deux autres études ont comparé 1 mg de colchicine une fois par jour à 1 mg de colchicine deux ou trois fois par jour, pendant six à huit mois chez des enfants.

Principaux résultats

Notre objectif était d'établir un rapport sur le nombre de participants ayant subi une crise, le moment des crises, la prévention de l'amylose A (qui est une réaction à une maladie inflammatoire chronique ou à une infection entraînant l'accumulation d'une protéine anormale appelée amyloïde dans les organes et les tissus de l'organisme les empêchant de fonctionner correctement), ainsi que sur les éventuels effets secondaires du traitement et les niveaux de certains marqueurs de l'inflammation pendant une crise. Toutes les études ne rapportaient pas ces critères de jugement. Compte tenu des différences dans les traitements et la conception des études, il n'a pas été possible de combiner les résultats obtenus à partir de ces études.

Une étude (15 participants) portant sur 0,6 mg de colchicine trois fois par jour par voie orale et une autre étude (63 participants) portant sur 150 mg toutes les quatre semaines pendant 16 semaines de canakinumab par voie sous-cutanée (sous la peau), réduiraient le nombre de personnes souffrant de crises de FMF. En revanche, 0,5 mg deux fois par jour de colchicine par voie orale (20 participants), le rilonacept (14 participants) ou l'anakinra (25 participants) n'ont pas réduit le nombre de personnes présentant des crises. L’ImmunoGuard™ (24 participants) n'a pas réduit les niveaux des marqueurs de l'inflammation dans le sang qui sont élevés lors de la phase de crise dans la fièvre méditerranéenne familiale ; il s'agit notamment de la vitesse de chute des globules rouges lorsqu'ils sont placés dans un tube à essai, du nombre de globules blancs et de la présence de la protéine C-réactive (protéine produite dans le foie). L'anakinra et le canakinumab ont réduit les taux de protéine C-réactive. La colchicine une fois par jour et deux ou trois fois par jour n’engendrerait pas des critères de jugement différents, notamment concernant le moment des crises, les effets secondaires du médicament et les indicateurs de réponse en phase aiguë.

Qualité des données probantes

Quatre études étaient bien conçues, tandis que les autres présentaient des problèmes de conception susceptibles d’avoir un impact sur les résultats. Quatre études n'ont pas indiqué clairement comment les personnes étaient assignées à chaque groupe de traitement. Quatre études n'ont pas indiqué si les chercheurs, qui ont évalué les critères de jugement de l'étude, savaient quelles personnes étaient affectées à quel traitement. Quatre études n'expliquaient pas clairement les raisons pour lesquelles les participants se retiraient d'une étude et une étude avait un pourcentage élevé de retraits. Nous n'avons pas été en mesure de confirmer si chacun des critères de jugement établis ont été rapportés dans cinq études. Cinq études n'ont pas rapporté la gravité du FMF dans les groupes au début du traitement. Nous avons déterminé que les données probantes sur les critères de jugement rapportés étaient de qualité modérée à très faible.

Conclusions des auteurs: 

Il existe peu d'ECR évaluant les interventions chez les personnes atteintes de fièvre méditerranéenne familiale (FMF). Selon les données probantes, la colchicine administrée trois fois par jour réduirait le nombre de personnes subissant des crises, la colchicine en dose unique et en doses fractionnées ne seraient pas différentes chez les enfants atteints de FMF, le canakinumab réduit probablement le nombre de personnes subissant des crises, et l'anakinra ou le canakinumab réduisent probablement la CRP chez les participants résistants à la colchicine ; toutefois, seuls quelques ECR ont fourni des données pour l'analyse. D'autres ECR examinant des interventions actives et pas uniquement la colchicine, sont nécessaires avant de pouvoir conclure définitivement sur l'efficacité et la tolérance des interventions visant à réduire l'inflammation dans la FMF.

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Contexte: 

La fièvre méditerranéenne familiale (FMF), une maladie auto-inflammatoire héréditaire, touche principalement les groupes ethniques vivant dans la région méditerranéenne. Les premières études ont indiqué que la colchicine pourrait prévenir les crises de FMF. Pour les personnes résistantes ou intolérantes à la colchicine, des médicaments tels que l'anakinra, le rilonacept, le canakinumab, l'étanercept, l'infliximab ou l'adalimumab pourraient être bénéfiques. Il s'agit d'une mise à jour de la dernière revue publiée en 2018.

Objectifs: 

Évaluer l'efficacité et la tolérance des interventions visant à réduire l'inflammation chez les personnes atteintes de FMF.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL, MEDLINE, Embase et quatre bases de données chinoises en août 2021. Nous avons recherché les registres d'essais cliniques et les bibliographies de rapports pertinents.

La dernière recherche effectuée date du 17 août 2021.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) portant sur des personnes atteintes de FMF, comparant des interventions actives (y compris la colchicine, l'anakinra, le rilonacept, le canakinumab, l'étanercept, l'infliximab, l'adalimumab, la thalidomide, le tocilizumab, l'interféron-α et ImmunoGuard (complément alimentaire à base de plantes)) avec un placebo ou l'absence de traitement, ou comparant les médicaments actifs entre eux.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons utilisé la méthodologie standard de Cochrane. Nous avons évalué le niveau de confiance des données probantes en utilisant le système GRADE.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 10 ECR avec 312 participants (âgés de trois à 53 ans), dont cinq études parallèles et cinq études croisées. Six études ont utilisé la colchicine par voie orale, une a utilisé ImmunoGuard par voie orale, et les trois autres ont utilisé le rilonacept, l'anakinra ou le canakinumab en injection sous-cutanée. La durée de chaque groupe d'étude variait de un à huit mois.

Il y avait des problèmes de conception d’étude pour les quatre essais les plus anciennes sur la colchicine et pour deux études comparant une dose unique à une dose fractionnée de colchicine. Cependant, les quatre études portant sur ImmunoGuard, le rilonacept, l'anakinra et le canakinumab étaient globalement bien conçues.

Notre objectif était d'obtenir des informations sur le nombre de participants ayant subi une crise, le moment des crises, la prévention de l'amylose A, les effets indésirables des médicaments et la réponse d'un certain nombre de marqueurs biochimiques de la phase aiguë d'une crise ; mais aucune étude n'a rapporté la prévention de l'amylose A.

La colchicine (par voie orale) par rapport au placebo

Après trois mois, 0,6 mg de colchicine trois fois par jour réduirait le nombre de personnes subissant des crises (risque relatif (RR) 0,21, intervalle de confiance (IC) à 95 % entre 0,05 et 0,95 ; 1 étude, 10 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Une étude (20 participants) portant sur 0,5 mg de colchicine deux fois par jour a montré qu'il pourrait ne pas y avoir de différence dans le nombre de participants ayant subi des crises au bout de deux mois (RR 0,78, IC à 95 % entre 0,49 et 1,23 ; données probantes d’un niveau de confiance faible).

Il n'y aurait pas de différences dans la durée des crises (résumé narratif ; données probantes d’un niveau de confiance très faible), ni dans le nombre de jours entre les crises : (résumé narratif ; données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Concernant les effets indésirables du médicament, une étude a rapporté des selles molles et un transit accéléré tandis qu’une seconde étude a rapporté des diarrhées (résumé narratif ; toutes deux des données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Il n'y avait pas de données sur la réponse en phase aiguë.

Le rilonacept par rapport au placebo

Il n'y a probablement pas de différence dans le nombre de crises à trois mois (RR 0,87, IC à 95 % entre 0,59 et 1,26 ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Il pourrait ne pas y avoir de différences dans la durée des crises (résumé narratif ; données probantes d’un niveau de confiance faible) ou dans le nombre de jours entre les crises (résumé narratif ; données probantes d’un niveau de confiance faible).

Concernant les effets indésirables du médicament, l'étude sur le rilonacept a rapporté qu'il pourrait ne pas y avoir de différence dans les symptômes gastro-intestinaux, l'hypertension, les maux de tête, les infections des voies respiratoires, les réactions au site d'injection et l'herpès, par rapport au placebo (résumé narratif ; données probantes d’un niveau de confiance faible).

L'étude rapporte de manière narrative qu'il n'y aurait pas de différences dans les indicateurs de réponse en phase aiguë après trois mois (données probantes d’un niveau de confiance faible).

L’ImmunoGuard par rapport au placebo

L'étude sur l’ImmunoGuard a constaté qu’il n’y a probablement pas de différence dans les effets indésirables (données probantes d’un niveau de confiance modéré) ni dans les indicateurs de réponse en phase aiguë après un mois de traitement (données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Aucune donnée n'a été rapportée sur le nombre de personnes ayant subi une crise, la durée des crises ou entre les crises.

L’anakinra par rapport au placebo

Une étude portant sur l'anakinra administré à 25 participants résistants à la colchicine a montré qu'il n'y a probablement pas de différence dans le nombre de participants ayant subi une crise au bout de quatre mois (RR 0,76, IC à 95 % entre 0,54 et 1,07 ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Il n'y avait pas de données concernant la durée des crises ou la durée entre les crises.

Il n'y a probablement pas de différences entre l'anakinra et le placebo concernant la réaction au site d'injection, les céphalées, la présyncope, la dyspnée et les démangeaisons (résumé narratif ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Pour la réponse en phase aiguë, l'anakinra réduit probablement la protéine C-réactive (CRP) après quatre mois (résumé narratif ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Le canakinumab par rapport au placebo

Le canakinumab réduit probablement le nombre de participants ayant subi une crise à 16 semaines (RR 0,41, IC à 95 % entre 0,26 et 0,65 ; 1 étude, 63 participants résistants à la colchicine ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Il n'y avait pas de données concernant la durée des crises ou celle entre les crises.

L'étude incluse a rapporté que le nombre d'effets indésirables graves pour 100 patients-années était probablement de 42,7 avec le canakinumab contre 97,4 avec le placebo, chez les personnes atteintes de FMF résistants à la colchicine (données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Pour la réponse en phase aiguë, le canakinumab augmente probablement la proportion de participants ayant un niveau de CRP de 10 mg/L ou moins par rapport au placebo (68 % avec le canakinumab contre 6 % avec le placebo ; 1 étude, 63 participants ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

La colchicine en dose unique ou fractionnée

Il n'y a probablement pas de différence dans la durée des crises à trois mois (DM -0,04 heures, IC à 95 % entre -10,91 et 10,83) ou à six mois (DM 2,80 heures, IC à 95 % entre -5,39 et 10,99 ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Il n'y avait pas de données concernant le nombre de participants ayant subi une crise ou le nombre de jours entre les crises.

Il n'y a probablement pas de différence entre les groupes concernant les effets indésirables (y compris l'anorexie, les nausées, la diarrhée, les douleurs abdominales, les vomissements et l'élévation des enzymes hépatiques) (résumé narratif ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Pour la réponse en phase aiguë, il pourrait ne pas y avoir de données probantes suggérant une différence entre les groupes (résumé narratif ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Astrid Zessler et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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