Problématique de la revue
Nous avons examiné les données sur les effets de la dihydrocodéine (DHC) pour la réduction de la consommation de substances illégales chez les adolescents de plus de 15 ans et les adultes.
Contexte
L'utilisation de substances illégales comme l'héroïne est un problème mondial, pouvant entraîner d'autres problèmes. Ce qui est particulièrement inquiétant, ce sont les conséquences sanitaires considérables de la consommation de cette substance. Cela inclut le nombre élevé de décès dus à des overdoses d'héroïne et autres opiacés, et le fait que c'est un facteur de risque pour l'hépatite C et le VIH, en particulier chez ceux qui s'injectent leurs drogues.
Nous voulions savoir si la DHC a un effet positif sur la diminution de ce type de consommation de drogue chez les adolescents et les adultes. La DHC est un type d'opiacé à base de codéine.
Date de la recherche
Les données sont à jour jusqu'en février 2019.
Caractéristiques des études
Nous avons inclus dans cette revue trois études avec 385 participants au total, avec des périodes de suivi de durée différente. Deux études de 150 participants ont comparé la DHC à la buprénorphine pour la désintoxication (gestion des symptômes physiques du sevrage), tandis qu'une étude de 235 personnes a comparé la DHC à la méthadone pour la thérapie de substitution de maintenance (fournir une substance légale pour réduire les comportements à risque et autres préjudices liés à la consommation de drogue sur une plus longue période). Toutes les études ont eu lieu au Royaume-Uni.
Notre critère de jugement principal était l'abstinence ou la fin de la consommation de substances illégales ; nos critères de jugement secondaires étaient l'achèvement du traitement, ainsi que les conséquences sur la santé de la consommation de substances et les autres comportements souvent liés à la consommation de substances, telles que les activités illégales. Nous avons également évalué l’innocuité de la DHC.
Principaux résultats
Pour la désintoxication de substances illégales telles que l'héroïne, la DHC pourrait ne pas être plus efficace que la buprénorphine pour réduire la consommation de substances, maintenir les individus sous traitement et autres comportements. Le schéma est resté le même pour les rendez-vous de suivi.
Pour le traitement d'entretien, la DHC pourrait également ne pas être plus efficace que la méthadone pour réduire la consommation de substances ou l'un des critères de jugement secondaires, mais les participants pourraient être plus susceptibles de rester sous traitement. Ce résultat est également resté le même sur des périodes de suivi plus longues.
Le seul événement indésirable rapporté fût un décès dû à une overdose de méthadone dans l'étude comparant la DHC à la méthadone comme thérapie d'entretien.
Le schéma des résultats indique que les personnes ayant reçu de la DHC pourraient ne pas avoir de meilleurs résultats concernant la réduction de consommation de substances, l’achèvement de leur traitement ou d'autres mesures de comportements liés à la consommation de substances que celles ayant reçu d'autres types de médicaments. Toutefois, il est prématuré de tirer des conclusions définitives sur l'efficacité de la DHC dans la réduction de la consommation de substances illégales, en raison de la faible qualité des données.
Qualité des données
Dans l'ensemble, les données étaient de faible qualité. Il existait deux problèmes majeurs dans les études. Il n'y a pas eu de mise en aveugle des participants ou des personnes évaluant les critères de jugement, ils savaient donc dans quel groupe ils se trouvaient. En outre, un grand nombre de participants ont abandonné deux des études.
Sources de financement des études
Ces trois études ont été financées par des organismes gouvernementaux ou des fondations de recherche.
Nous avons trouvé des preuves de faible qualité que la DHC pourrait ne pas être plus efficace que d'autres interventions pharmacologiques couramment utilisées pour réduire la consommation d'opiacés illicites. Il est donc prématuré de porter des conclusions sur l'efficacité de la DHC, et il est suggéré que d'autres études de haute qualité soient menées, en particulier dans les pays à revenu faible ou moyen.
Le traitement médical et la désintoxication des troubles liés aux opiacés comprennent l'administration orale d'agonistes opioïdes. Le traitement de substitution à la dihydrocodéine (DHC) est généralement à seuil bas et peut donc atteindre des groupes plus larges d'utilisateurs d'opiacés. La décision de prescrire la DHC aux patients souffrant de troubles opiacés moins graves est axée sur son innocuité perçue, sa toxicité réduite, sa demi-vie plus courte et son début d'action plus rapide, ainsi que sur la rétention potentielle des patients. Cette revue a pour but d'étudier les effets de la DHC par rapport à d'autres opioïdes pharmaceutiques et placebos dans la désintoxication et les traitements de substitution des personnes souffrant de troubles liés à l'utilisation d'opiacés.
Étudier l'efficacité de la DHC pour réduire la consommation d'opiacés illicites et les autres effets sur la santé chez les adultes, par rapport à d'autres médicaments ou placebos utilisés pour la désintoxication ou les traitements de substitution.
En février 2019, nous avons effectué des recherches dans le registre spécialisé de Cochrane Drogues et alcool, CENTRAL, PubMed, Embase et Web of Science. Nous avons également recherché des études en cours et non publiées via ClinicalTrials.gov, le Système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et Trialsjournal.com. Toutes les recherches ont inclus les documents non rédigés en anglais. Nous avons effectué des recherches manuelles dans les références bibliographiques des revues systématiques liées au sujet et dans leurs listes d’études incluses.
Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés évaluant l'effet de la DHC pour la désintoxication et la thérapie de substitution d'entretien pour les adolescents (15 ans et plus) et les adultes consommateurs d'opiacés illicites.
Les principaux critères de jugement étaient l'abstinence de la consommation illicite d'opiacés après une désintoxication ou une thérapie d'entretien, mesurée par auto-déclaration ou par analyse d'urine. Les critères de jugement secondaires étaient la rétention du traitement et d'autres critères de santé et de comportement.
Nous avons suivi les procédures méthodologiques standard décrites par Cochrane. Cela inclut l'approche GRADE pour évaluer la qualité des preuves.
Nous avons inclus dans cette revue trois essais (dans cinq articles) avec 385 participants faisant usage d’opiacés et qui ont mesuré les critères de jugement à différentes périodes de suivi. Deux études portant sur 150 personnes ont comparé la DHC à la buprénorphine pour la désintoxication, et une étude portant sur 235 participants a comparé la DHC à la méthadone pour le traitement de substitution de maintien. Nous avons abaissé la qualité des données probantes principalement en raison du risque de biais et d'imprécision.
Pour les deux études comparant la DHC à la buprénorphine, nous avons trouvé des données probantes de faible qualité d’une différence non significative entre la DHC et la buprénorphine pour la désintoxication lors du suivi à six mois (rapport de risque (RR) 0,59, intervalle de confiance (IC) à 95% 0,25 à 1,39 ; P = 0,23) dans la méta-analyse du critère de jugement principal qu’était l'abstinence en opiacés illicites. De même, des données probantes de faible qualité n'ont pas indiqué de différence pour la rétention du traitement (RR 1,29, IC à 95% 0,99 à 1,68 ; P = 0,06).
Dans l'unique essai ayant comparé la DHC à la méthadone pour le traitement de substitution de maintien, les données probantes étaient également de faible qualité, et il pourrait ne pas y avoir de différence d'effets entre la DHC et la méthadone pour l'abstinence déclarée d'opiacés illicites (différence moyenne (mean difference, MD) -0,01, IC à 95 % -0,31 à 0,29). Pour la rétention du traitement à six mois de suivi dans cet essai unique, le RR calculé avec une analyse en intention de traiter indique également qu'il pourrait ne pas y avoir de différence entre la DHC et la méthadone (RR 1,04, IC à 95 % 0,94 à 1,16).
Les études ayant comparé la DHC à la buprénorphine n'ont pas rapporté des événements indésirables graves, tandis que l'étude sur la DHC par rapport à la méthadone a rapporté un décès dû à une overdose de méthadone.
Post-édition effectuée par Carole Lescure et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr