Le traitement de la réduction du flux sanguin dans les jambes à l'aide de cellules prélevées dans la moelle osseuse permet-il d'améliorer les symptômes ?

Pourquoi cette question est-elle importante ?

L'ischémie critique des membres survient lorsque le flux sanguin vers les jambes est réduit en raison de l'aggravation d'une maladie artérielle périphérique. Au début, les patients ressentent des crampes dans les jambes qui limitent la marche (claudication intermittente), mais avec le temps, certains patients présentent des symptômes plus graves, notamment des douleurs au repos, une ulcération de la jambe et une gangrène. Les options thérapeutiques disponibles sont très limitées lorsque la maladie atteint ce stade, en particulier lorsque la revascularisation chirurgicale ou par cathéter (procédure visant à rétablir la circulation sanguine dans les artères ou les veines obstruées) n'est pas envisageable. Un grand nombre de ces patients seront amputés du membre affecté. L'utilisation de la thérapie par cellules mononucléaires (en utilisant les propres cellules du patient) offre la possibilité d'un traitement alternatif pour les patients, en fournissant des cellules qui pourraient stimuler la formation de vaisseaux capillaires stables pour améliorer le flux sanguin dans le membre affecté. Ces cellules peuvent être obtenues à partir de la moelle osseuse. Ils sont purifiés en laboratoire et injectés dans le grand muscle situé à l'arrière du membre inférieur.

Qu’avons-nous trouvé ?

Nous avons recherché des essais contrôlés randomisés (un type d'étude où les participants sont assignés de manière aléatoire à l'un des deux groupes de traitement ou plus) comparant le traitement de personnes utilisant des cellules de moelle osseuse sélectionnées à un contrôle (soit l’absence d'intervention, soit un traitement conservateur conventionnel, soit un placebo (traitement factice)). Nous avons trouvé quatre études avec un total combiné de 176 participants testant la sécurité et l'efficacité de ce traitement. Les études ont comparé la thérapie cellulaire à différents contrôles. Notre analyse a montré qu'il n'y a pas d'effet clair de la thérapie cellulaire sur les décès, quelle qu'en soit la cause. Les études ont mesuré la douleur de différentes manières, et toutes les informations n'ont pas été rapportées, de sorte que nous n'avons pas été en mesure de regrouper les données. Individuellement, trois études n'ont pas trouvé de différence dans la réduction de la douleur entre les groupes de thérapie cellulaire et le groupe témoin. Une étude a rapporté que la douleur était davantage réduite dans le groupe de thérapie cellulaire que dans le groupe témoin. Le regroupement des données des quatre études a montré que la thérapie cellulaire pourrait réduire le nombre d'amputations, mais nous n'en sommes pas certains car le bénéfice éventuel a disparu lorsque nous avons refait l'analyse en excluant les données des études qui nous préoccupaient. Trois études n'ont rapporté aucune amélioration de l'index de pression systolique à la cheville (une façon de mesurer le flux sanguin dans la jambe), tandis qu'une étude a rapporté une plus grande amélioration de l'index de pression systolique de la cheville dans le groupe de thérapie cellulaire par rapport au groupe témoin. Aucune amélioration n'a été constatée dans la distance de marche sans douleur entre les groupes. Aucune différence nette n'a été constatée entre les groupes en ce qui concerne les effets secondaires.

Quel est le niveau de confiance des données probantes ?

Le niveau de confiance dans les données probantes était très faible en raison de préoccupations concernant la façon dont les études ont été menées. Les quatre études incluses différaient les unes des autres par la façon dont elles mesuraient les effets à différents moments ; elles utilisaient des contrôles différents ; le nombre d'événements et de participants était faible dans l'ensemble ; et il y avait des différences dans les résultats des études individuelles.

Conclusions des auteurs: 

Nous avons identifié un petit nombre d'études qui répondaient à nos critères d'inclusion, et celles-ci différaient par les contrôles utilisés et la façon dont elles mesuraient les critères de jugement importants. Les données limitées de ces essais fournissent des données probantes d’un niveau de confiance très faible à faible, et nous ne sommes pas en mesure de tirer des conclusions pour soutenir l'utilisation de l’injection intramusculaire de cellules mononucléaires de moelle osseuse pour améliorer les critères de jugement cliniques chez les personnes atteintes d’ischémie critique des membres. Des données probantes issues d'essais randomisés contrôlés de plus grande envergure sont nécessaires afin d'obtenir une puissance statistique adéquate pour évaluer le rôle de cette procédure.

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Contexte: 

Les maladies artérielles périphériques constituent un problème de santé majeur. Chez environ 1 à 2 % des patients, la maladie évolue vers une ischémie critique des membres (ICM). Chez un nombre important de personnes souffrant d'une ICM, il n'existe aucune autre option thérapeutique efficace que l'amputation, et environ un quart de ces patients doivent subir une amputation majeure au cours de l'année suivante. Il s'agit de la deuxième mise à jour d'une revue publiée pour la première fois en 2011.

Objectifs: 

Évaluer les bénéfices et les risques de l’injection intramusculaire de cellules mononucléaires de moelle osseuse adulte autologue comme traitement de l'ischémie critique.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons utilisé les stratégies de recherche Cochrane standard et étendues. La dernière date de recherche était le 8 novembre 2021.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus tous les essais contrôlés randomisés (ECR) sur l’ICM dans lesquels les participants ont été répartis de manière aléatoire entre l'administration intramusculaire de cellules mononucléaires de moelle osseuse adultes autologues et le contrôle (soit l’absence d'intervention, soit un traitement conservateur conventionnel, soit un placebo).

Recueil et analyse des données: 

Nous avons utilisé les méthodes standard de Cochrane. Nos principaux critères de jugement d'intérêt étaient la mortalité toutes causes confondues, la douleur et l'amputation. Nos critères de jugement secondaires étaient l'analyse de l’angiographie, l'index de pression systolique de la cheville (IPSC), la distance de marche sans douleur, les effets secondaires et les complications. Nous avons évalué le niveau de confiance des données probantes en utilisant la méthode GRADE.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus quatre essais contrôlés randomisés impliquant un total de 176 participants avec un diagnostic clinique d’ischémie critique. Les participants ont été randomisés pour recevoir soit une injection intramusculaire de cellules mononucléaires de moelle osseuse, soit un contrôle. Les bras de contrôle variaient d'une étude à l'autre et comprenaient un traitement conventionnel, du sang périphérique autologue dilué et une solution saline. Il n'y avait pas de données probantes suggérant un effet sur la mortalité lié à l'administration de cellules mononucléaires de moelle osseuse par rapport au contrôle (risque relatif (RR) 1,00, intervalle de confiance (IC) à 95 % 0,15 à 6,63 ; 3 études, 123 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Tous les essais ont évalué les changements dans l'intensité de la douleur, mais les essais ont utilisé différentes formes d'outils d'évaluation de la douleur, de sorte que nous n'avons pas été en mesure de regrouper les données. Trois études ont rapporté individuellement qu'aucune différence dans la réduction de la douleur n'a été observée entre le groupe injection de cellules mononucléaires de moelle osseuse et le groupe témoin. Une étude a rapporté que la réduction de la douleur au repos était plus importante dans le groupe injection de cellules mononucléaires de moelle osseuse par rapport au groupe témoin (données probantes d’un niveau de confiance très faible). Les quatre essais ont rapporté le taux d'amputation à la fin de la période d'étude. Nous ne sommes pas certains que les amputations ont été réduites dans le groupe injection de cellules mononucléaires de moelle osseuse par rapport au groupe témoin, car un petit effet possible (RR 0,52, IC à 95 % 0,27 à 0,99 ; 4 études, 176 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible) a été perdu après avoir entrepris une analyse de sensibilité (RR 0,52, IC à 95 % 0,19 à 1,39 ; 2 études, 89 participants). Aucune des études incluses n'a rapporté d'analyse angiographique. L'index de pression systolique à la cheville a été rapporté différemment par chaque étude, nous n'avons donc pas été en mesure de regrouper les données. Trois études n'ont pas rapporté de changement entre les groupes, et une étude a rapporté une plus grande amélioration de l’IPSC (en tant qu'amélioration hémodynamique) dans le groupe injection de cellules mononucléaires de moelle osseuse par rapport au groupe témoin (données probantes d’un niveau de confiance très faible). Une étude a rapporté la distance de marche sans douleur, ne trouvant pas de différence claire entre le groupe injection de cellules mononucléaires de moelle osseuse et le groupe témoin (données probantes d’un niveau de confiance faible). Nous avons regroupé les données relatives aux effets secondaires signalés au cours du suivi, et cela n'a pas montré de différence claire entre les groupes injection de cellules mononucléaires de moelle osseuse et témoin (RR 2,13, IC à 95 % 0,50 à 8,97 ; 4 études, 176 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Nous avons revu à la baisse le niveau de confiance des données probantes en raison des préoccupations relatives au risque de biais, à l'imprécision et à l'incohérence.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Judith Catella et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.